Les tensions montent au sein de la Jirama, sur fond de menace de grève et de soupçons de sabotage interne. Une crise qui risque d’aggraver les difficultés d’accès à l’électricité et au carburant pour la population.
![]() |
Un leader syndical au sein de la Jirama (au micro) prenant la parole lors de l’assemblée générale des employés à Mandroseza. |
Il y a anguille sous roche. La menace de grève au sein de la compagnie nationale d’eau et d’électricité, Jirama, plonge la population dans l’inquiétude. Officiellement, les syndicats protestent contre le nouveau statut juridique de l’entreprise et contre le plan de restructuration qui prévoit une réduction du personnel. Mais en coulisses, d’autres motivations moins vertueuses seraient à l’œuvre.
Lors d’une interview télévisée diffusée à la veille de la fête nationale, le président de la République a dénoncé l’existence d’un réseau mafieux opérant au sein même de la Jirama. Ce réseau serait impliqué dans des détournements massifs de carburant, destiné à alimenter les groupes thermiques de la société. Le chef de l’État a affirmé que tous les membres de ce réseau, quel que soit leur statut, devront répondre de leurs actes devant la justice.
L’enquête en cours progresse rapidement, selon des sources proches du dossier. Happés par les investigations et dos au mur, certains présumés membres du réseau chercheraient désormais à créer une instabilité interne en attisant la fronde syndicale.
Stocks suffisants
Des connexions suspectes apparaissent également entre ces agitateurs et des acteurs du secteur du transport et de la livraison de carburant.
Cette situation coïncide avec une pénurie de carburant constatée dans plusieurs stations-service de la capitale, alors même que les autorités assurent que les stocks sont suffisants. Le problème résiderait dans la distribution. Antananarivo est à ce jour la seule ville concernée par ces ruptures d’approvisionnement, ce qui renforce les soupçons d’un sabotage organisé.
Il y aurait aussi des liens entre ces soubresauts et la persistance du délestage, bien que l’État ait déjà accordé la demande d’augmentation du carburant pour la Jirama afin de faire tourner à plein régime les centrales thermiques. Avec le ralentissement de la centrale hydroélectrique d’Andekaleka, dû à la baisse du niveau d’eau, la production énergétique repose en grande partie sur les groupes thermiques. Pour éviter les délestages, le président a autorisé une augmentation de la dotation en carburant pour la Jirama. Mais cette mesure peine à produire ses effets, vraisemblablement entravée par les manœuvres de ce réseau parallèle.
Dans cette guerre d’intérêts, c’est la population qui paie le prix fort : coupures de courant, files interminables pour faire le plein, incertitudes sur la continuité des services de base. En attendant que la lumière soit faite sur ces réseaux de malfaiteurs, le quotidien des citoyens est pris en otage au nom d’intérêts privés et présumés illicites de quelques-uns.
L'Express de Madagascar