Ce fut au cours d’un autre 17 mars, celui de 1808, qu’a été officiellement lancé, pour le bonheur ou le malheur des élèves, un rite de passage dont l’accomplissement deviendra pour un nombre considérable de parents et d’adolescents un des graals à conquérir. Ce jour-là, Napoléon Ier concrétisa la création du baccalauréat qui commença alors à s’imposer comme la consécration à acquérir pour valider l’aboutissement des études secondaires et pour déverrouiller la porte sacrée des études supérieures.
Sous l’impulsion de son désir de centraliser et de laïciser l’enseignement, alors principalement sous l’égide d’institutions religieuses dont les cours variaient d’une région à une autre, celui qui était empereur des Français mit au monde l’un des joyaux de ses réformes éducatives qui convergèrent vers ce grand carrefour qui matérialisait la nationalisation de l’instruction. Et plus de deux siècles plus tard, il n’a pas perdu sa brillance, et continue à scintiller majestueusement pour éblouir les yeux des lycéens normaux qui veulent tous l’obtenir.
Si le nom, qui désignait déjà le premier diplôme de l’université de Paris depuis l’époque médiévale, n’est pas sorti du chapeau de Napoléon, son essence actuelle est, contrairement à ses conquêtes militaires qui se sont vite émancipées de l’emprise de l’empire français, une de ses contributions qui ont survécu à la succession des générations avec, entre autres, le code civil. Nonobstant les différentes formes qu’il a arborées, d’exclusivement oral au début avant un tournant qui donna à l’écrit l’importance qu’il a aujourd’hui, son aura est restée la même, celle que lui procure son statut de sésame qui va ouvrir plus de portes.
Nul doute que Napoléon Ier, en donnant ce prestige et en donnant au baccalauréat cet éclat qui suscite les convoitises, a poli l’image de l’éducation qui a gagné en attrait. Il a ainsi accompli le devoir du bon dirigeant qui, selon Aristote dans son ouvrage Politique, se reconnaît dans sa capacité à bien former les citoyens, étant conscient de l’importance de l’éducation pour une cité qui aspire à la prospérité et, dit-on, c’est justement ce que nous, à Madagascar, voulons. On devrait donc savoir, pour ne plus nous égarer, sur ce chemin du développement, quel est le bon chemin à prendre.
La finalité du baccalauréat, dans sa formule actuelle où la réflexion est sollicitée et les connaissances testées, est d’accomplir l’idéal de Montaigne de la tête «bien faite», ce qui ne l’empêche pas cependant d’être «bien pleine». Mais quand le terrain à nourrir est déjà intoxiqué par de mauvaises graines et de mauvaises herbes qui sont en nombre considérable au sein d’un système éducatif à purifier, et qui demandent des mesures draconiennes qui se font désirer, cette épreuve décisive peut peiner à remplir sa noble mission.
Fenitra Ratefiarivony