L’ariary poursuit sa dépréciation. Passé près de 5 000 ariary pour un euro au premier trimestre, il atteint désormais 5 300 sur les marchés informels. La hausse des importations et le recul des exportations en seraient la cause.
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Les exportations du pays ont fléchi pendant les six premiers mois de cette année, tandis que les importations ont grimpé. |
À un rythme soutenu, la monnaie nationale continue de se déprécier de façon « spectaculaire » ces trois derniers mois. Lors de la dernière opération de la Banky Foiben’i Madagasikara (BFM), datée du 4 juillet, l’ariary s’échangeait à 5 161 pour un euro. Sur les marchés non officiels, le taux grimpe à environ 5 300 ariary pour un euro.
Les exportations du pays sont en net recul, avec une baisse marquée dans des secteurs stratégiques comme la vanille, le girofle et le textile. Selon la Banque centrale, dans sa note de conjoncture économique, les exportations de la Grande Île ont chuté de 11,9 % au premier trimestre 2025. La vanille enregistre une baisse de 45,3 %, conséquence d’une diminution de 44,5 % des volumes exportés, en raison des stocks. Le girofle connaît une baisse de 47,9 %.
« Cette situation démontre que les produits d’exportation sont malmenés par les conditions climatiques et l’incertitude de la conjoncture internationale », estime un observateur.
Selon plusieurs chercheurs en économie, la hausse des importations pèse également sur le cours de change et fragilise davantage la valeur de l’ariary.
« Depuis la fin de l’année 2024, les importations ont fortement augmenté, notamment dans des secteurs clés comme les infrastructures, le BTP ou encore les produits de première nécessité. Cela contribue au déficit commercial et à la baisse des rentrées de devises», explique un économiste de l’Université d’Antananarivo.
Importations massives
À titre d’exemple, la consommation de ciment a progressé de 20 % en 2024, une tendance qui s’est maintenue sur le premier semestre 2025, avec un marché fortement dominé par les importations. Ce secteur représente un volume estimé à 1,2 million de tonnes pour Madagascar, selon les données les plus récentes. Les importations ont atteint environ 1,03 million de tonnes sur les onze premiers mois de 2024, pour une valeur CAF de 345 milliards d’ariary, d’après la Direction générale des douanes.
Les importations de riz ont également fortement augmenté au premier semestre. Selon les données fournies par la DGD, les volumes importés durant les cinq premiers mois de 2025 ont déjà dépassé le total annuel de 2024. Le volume atteint 348 500 tonnes, contre 262 100 tonnes pour l’ensemble de l’année précédente. Cette hausse s’accompagne d’un bond en valeur : 795,8 milliards d’ariary en 2025 contre 307 milliards sur la même période en 2024. Cela représente une augmentation de 185 % en volume et de 159 % en valeur.
Des importations massives avaient d’ailleurs été signalées par la Banque centrale dans sa note de conjoncture publiée en mai. Elles avaient pour objectif de faire face à une production locale affaiblie par les conditions climatiques, provoquant un déséquilibre entre l’offre et la demande de riz sur le marché.
La Banky Foiben’i Madagasikara avait confirmé ces importations massives de riz au premier trimestre, justifiées par la nécessité d’éviter les pénuries et de stabiliser les prix.
« Les mauvaises conditions climatiques ont provoqué un déséquilibre entre l’offre et la demande de riz. Pour garantir l’approvisionnement du marché national et contenir les prix, d’importantes importations ont été réalisées», indique le rapport de la BFM.
La reprise des exportations de riz en provenance d’Inde a par ailleurs contribué à faire baisser les cours mondiaux, ce qui a favorisé l’augmentation des achats de la part de Madagascar.
Enfin, certains facteurs conjoncturels ont également alimenté cette pression sur la monnaie. Durant la période des festivités nationales, un afflux massif de produits importés, comme les lampions électriques, a été observé.
Itamara Otton