À Madagascar, les cartes bancaires peinent à s’imposer comme moyen de paiement. Faible bancarisation, manque d’information et méfiance freinent encore l’inclusion financière.
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Des professionnels du secteur bancaire réunis lors de l’Atelier d’Étude sur l’Industrie des Paiements, organisé par Visa, hier à Antananarivo. |
Bien que des efforts soient déployés pour moderniser les systèmes de paiement, l’usage des cartes bancaires demeure limité dans la vie quotidienne. Ce constat a été partagé en marge de l’Atelier d’Étude sur l’Industrie des Paiements, organisé par Visa, hier au Radisson Blu Ambodivona.
Selon les données partagées à cette occasion, seuls 3,25 % des Malgaches possèdent une carte bancaire active. Et parmi elles, seulement un tiers sont réellement utilisées. « Le taux d’activation est de 33 %, ce qui montre qu’une grande partie des cartes reste inutilisée », explique Evrard Nezeko, Senior Client Consulting Manager chez Visa.
Les opérations effectuées sont majoritairement des retraits d’espèces, qui représentent 44 % des transactions, y compris celles effectuées à l’étranger. Les paiements par carte restent marginaux, notamment parce que seuls 3 % des commerçants les acceptent. Plusieurs raisons expliquent cette faible adoption. D’abord, un taux de bancarisation encore très faible, estimé à moins de 10 %, freine l’accès aux services financiers formels. Cela rend difficile toute généralisation des moyens de paiement modernes.
Freins
Ensuite, la méfiance persiste. « 27 % des personnes disent ne pas comprendre le fonctionnement d’une banque, et 65 % pensent qu’il faut être riche pour y avoir accès », précise Christian Mbonampeka, Visa Country Manager pour les îles de l’océan Indien.
Du côté des commerçants, l’utilisation des cartes reste également limitée. « Certains ne savent pas utiliser leur terminal de paiement. D’autres ignorent qu’ils peuvent accepter le sans contact », poursuit Evrard Nezeko. S’ajoutent à cela des problèmes de connexion, de maintenance et des coûts jugés élevés pour les petits commerces.
Le faible usage des cartes présente aussi des risques. L’économie reste largement informelle, ce qui limite la traçabilité des flux financiers, freine l’accès au crédit et peut favoriser des activités illicites. C’est là qu’intervient aussi le rôle des grands réseaux comme Visa : « Lorsqu’un client utilise une carte, nous pouvons tracer les flux et offrir plus de sécurité à l’utilisateur et au système », affirme un responsable de Visa.
Pour améliorer la situation, Visa propose des solutions comme les cartes virtuelles, mais insiste sur l’importance de l’éducation financière. « Il faut aussi utiliser les bons canaux. Aujourd’hui, 49 % des Malgaches s’informent encore via la radio », rappelle Titus Gachuhi, directeur de Visa Consulting pour l’Afrique subsaharienne.
Le potentiel est là, porté par la jeunesse de la population et le mobile money. Mais sans un accompagnement ciblé, l’inclusion financière par le biais des cartes bancaires restera marginale.
Irina Tsimijaly