EMPOISONNEMENT - Un survivant peine à retrouver une vie normale

Lucas Hajarimamy, 27 ans, fait partie des survivants de la tragique fête d’anniversaire survenue à Ambohimalaza. Il nous confie quelques souvenirs douloureux de cet événement.

Lucas Hajarimamy, parmi les survivants de la fête d’anniversaire meurtrière. 

Plus de trois semaines se sont écoulées depuis sa sortie de l’hôpital, et Lucas Hajarimamy témoigne de la difficulté à reprendre le cours normal de sa vie. « Je me sens toujours fatigué. Le moindre effort m’épuise. Et mentalement, je ne suis pas encore en paix. Je reste très perturbé par ce que j’ai vécu. C’est vraiment difficile. On dirait un cauchemar », confie-t-il hier.

Cousin de Fenohasina, l’hôtesse de la fête, Lucas a perdu six proches lors de cette journée, dont son petit frère. « C’est extrêmement douloureux de perdre une personne qu’on aimait plus que tout », ajoute-t-il, la voix nouée.

Ce jeune homme a été hospitalisé dans la soirée du 15 juin et est rentré chez lui dans la nuit du 17. « Je suis allé à l’hôpital le dimanche soir, quand les douleurs à l’estomac ont commencé. Mes cousines y avaient déjà été admises un peu plus tôt. J’ai également eu du mal à respirer. À l’hôpital, j’ai vu mourir des amis, un par un. J’avais vraiment peur de ne pas m’en sortir moi non plus», raconte-t-il.

Il pense avoir échappé au pire parce qu’il avait peu mangé pendant la fête. « Je suis arrivé en soirée, car j’étais encore au travail. Mon petit frère, lui, était là depuis le matin pour aider aux préparatifs. Vers 16 heures, il a commencé à se sentir mal. Il a vomi et sa langue s’est paralysée. C’est ma sœur qui l’a conduit chez le médecin. Toute la soirée, je n’étais pas concentré sur la fête, je pensais à lui. J’ai donc très peu mangé. Puis, vers minuit et demie, on m’a annoncé sa mort », confie-t-il, encore bouleversé.

Profondes séquelles

Selon le Dr Kiady Razafindralambo, psychiatre, une personne confrontée à la mort ou à un événement aussi traumatisant peut en garder de profondes séquelles. « La peur s’installe, puis le cerveau tente de se protéger en provoquant une sensation d’irréalité. On parle alors de dissociation péritraumatique », explique-t-il.

Les signes les plus alarmants, précise-t-il, sont l’insomnie, les cauchemars à répétition, les accélérations du rythme cardiaque sans cause physique apparente. « La personne peut ne plus se reconnaître, et reprendre le travail devient alors très difficile», poursuit-il. Il insiste sur l’importance d’un accompagnement psychologique pour les victimes de cette tragédie.

« Elles peuvent consulter des psychiatres dans les Centres hospitaliers universitaires Joseph Raseta Befelatànana (CHU JRB), Soavinandriana, au CHU de santé mentale d’Anjanamasina, ou des professionnels libéraux. Elles peuvent aussi s’adresser à des psychologues. L’essentiel est de se faire aider. Le stress post-traumatique causé par de tels événements peut être lourd», conclut-il.

Miangaly Ralitera