ACHAT DE VOIX - La corruption électorale échappe aux attributions du Bianco

Le Bianco ne peut pas encore poursuivre les cas de corruption électorale, faute de base légale claire. Ces pratiques relèvent uniquement de la loi électorale, limitant ainsi la portée de la lutte anticorruption.

Le président du CSI, Jean Louis Andriamifidy, a souligné que les achats de voix sont  qualifiés de fraudes électorales.

Les cas de corruption survenant pendant les élections ne peuvent, à ce jour, être poursuivis par le Bureau indépendant anticorruption (Bianco). Bien que les achats de voix ou la distribution de cadeaux en échange d’un vote puissent être assimilés à des formes de corruption, la loi n°2016-020 sur la lutte contre la corruption ne les considère pas explicitement comme tels. Pour l’instant, ces pratiques relèvent des fraudes électorales, sanctionnées par la loi organique relative au régime général des élections et des référendums, a rappelé hier Jean Louis Andriamifidy, président du Comité pour la sauvegarde de l’intégrité (CSI), en marge de la célébration de la Journée africaine de lutte contre la corruption, au Havoria Anosy.

« Bien que ces pratiques présentent toutes les caractéristiques d’un acte de corruption, nous devons nous en tenir aux textes en vigueur. Tant que la loi ne les définit pas clairement comme des actes de corruption, le Bianco ne peut ni ouvrir une enquête ni engager de poursuites sur cette base », a-t-il précisé.

Cette situation met en évidence une faille dans l’arsenal juridique malgache. D’un côté, la corruption électorale porte atteinte à la crédibilité des scrutins et affaiblit la démocratie ; de l’autre, l’organisme principalement chargé de lutter contre la corruption, le Bianco, se trouve limité dans ses compétences lorsqu’il s’agit de pratiques liées aux processus électoraux.

Simples contentieux

Ce cloisonnement, qui confie la répression de ces faits à la seule loi électorale, restreint la portée des actions de lutte contre la corruption. En pratique, il affaiblit les mécanismes de prévention et de sanction, les fraudes électorales étant souvent traitées comme de simples contentieux administratifs, sans la même rigueur que les affaires de corruption classiques.

À ce jour, aucune des plaintes déposées pour achat de suffrages n’a donné lieu à des poursuites, bien que l’article 233 de la loi organique relative au régime général des élections prévoie des sanctions. Cette situation s’explique notamment par les difficultés liées à la constitution de preuves. Dans le domaine électoral, les photos et vidéos ne sont pas encore admises comme éléments probants, faute de moyens techniques permettant d’en garantir l’authenticité. De ce fait, les requêtes pour achat de voix sont fréquemment rejetées par les juridictions électorales. Dans un contexte où les pratiques clientélistes et les soupçons d’achat de voix restent fréquents à chaque scrutin, cette lacune juridique contribue à installer un climat d’impunité.

 Tsilaviny Randriamanga

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