PÉNURIE D’EAU  - Les bidons jaunes s’entassent devant les bornes fontaines

De longues files de bidons jaunes aperçues au Fort Duchesne.

Scène de pénurie à Antananarivo. Dans plusieurs quartiers de la capitale, des files interminables de bidons jaunes s’entassent devant les bornes-fontaines. 

Chaque jour, des centaines d’habitants attendent un filet d’eau, pendant parfois des heures. Une corvée quotidienne devenue insoutenable. À Fort-Duchesne, Androndra Ampamantanana, Fasan’ny Karana, Ambanilàlana Itaosy ou encore Andavamamba, la situation est critique. Armés de patience, les riverains – souvent des femmes accompagnées de leurs enfants – se relaient jour et nuit, espérant remplir quelques seaux. « Il faut attendre des heures, parfois même des jours, pour obtenir de l’eau », témoignent-ils. Cette pénurie dépasse le cadre domestique. Elle met en péril l’hygiène et la santé publique. 

À Anosibe, un père de famille confie : « Nous ne pouvons plus nous laver les mains régulièrement, alors que la grippe et d’autres maladies circulent. » Un professionnel de santé alerte sur les risques accrus de propagation des maladies hydriques, comme la diarrhée ou la fièvre typhoïde, en raison de la baisse de consommation d’eau imposée par la rareté. « Je peux attendre deux heures pour un seul seau d’eau », raconte Jacqueline, habitante d’Andavamamba. 

Aucun changement

Aux heures de pointe, la tension monte : disputes, veilles prolongées, voire nuits passées sur place pour ne pas perdre sa place dans la file. La crise s’explique par une combinaison de facteurs : vétusté des infrastructures, urbanisation incontrôlée, saison sèche persistante, et coupures d’électricité récurrentes qui perturbent le pompage et la distribution. La Jirama, la compagnie nationale de l’eau et de l’électricité, évoque des « contraintes techniques» et un « déficit de production», appelant à la compréhension des usagers. Un discours jugé répétitif et lassant par ces derniers, qui disent n’avoir vu aucun changement concret. 

Face à l’urgence, des mesures ont été annoncées lors du Conseil des ministres de mai. Trente-cinq nouveaux forages sont en cours à Antananarivo et ses environs. Certains sites de production seront déplacés vers des zones à fort rendement, avec un débit estimé supérieur à un mètre cube par heure. Des ajustements techniques sont également prévus pour améliorer les infrastructures existantes. L’objectif affiché: réduire la dépendance aux camions-citernes, qui assurent encore la distribution dans de nombreux quartiers. À terme, les nouveaux forages pourraient remplacer deux à trois véhicules de grande capacité. Mais en attendant, les habitants s’accrochent à l’espoir d’un changement durable… et remplissent leurs bidons, sous le soleil ou à la lueur des lampes torches.

Mialisoa Ida

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