Didier Ratsiraka est l’un des principaux acteurs des nouveaux accords de coopération franco-malgaches avant de devenir président de la RDM. |
La République démocratique de Madagascar (1975-1991) aura duré seize ans. La base idéo-logique de la Constitution, la Charte de la révolution socialiste (Boky Mena qui rappelle le Djouché nord-coréen) et contient les grandes lignes du programme général du président Didier Ratsiraka, elle est approuvée par le référendum populaire du 21 décembre 1975, avec la Constitution de la IIe République et le nouveau Président.
Ce programme se base, entre autres, sur « l’agriculture comme base, l’industrie comme moteur » et se caractérise notamment par la nationalisa-tion de nombreuses grosses entreprises détenues par des étrangers (Compagnies Lyonnaise et Marseillaise ainsi que leurs différentes filiales, les banques, les assurances, les compagnies pétrolières), les investissements à outrance, les tentatives de réformes agraires, la malgachisation de l’enseignement, les nouvelles structures admini-stratives sur la base du centralisme démocratique…
Sur le plan politique, à défaut de réussir à fonder un parti unique, le chef de l’État crée le Front national pour la défense de la révolution qui regroupe alors l’Arema (parti présidentiel), le Monima Ka Miviombio, l’AKFM-KDRSM, le MFM, le Vonjy iray tsy mivaky (VITM), l’Udecma/ KMTP, le Vondrona sosialista Monima. Les leaders et membres de ces partis se retrouvent alors dans différentes institutions de la RDM, le Conseil suprême de la Révolution (sorte de Sénat), l’Assemblée nationale populaire, le Conseil économique et culturel. Ceux qui refusent d’intégrer le FNDR ne peuvent pas pratiquer.
Si l’on résume les faits marquants que l’on retient de cette période, on citerait les accidents d’avions et d’hélicoptères dans lesquels de hautes personnalités trouvent la mort, les opérations contre les commerçants karana d’Antananarivo (OPK) autrement appelées « rotaka à la mode », l’attaque par les pratiquants du Kung Fu contre les bâtiments de Pochard devenus officiellement siège des jeunes « Tanora tonga saina » (jeunes responsables), officieusement « tanière de bandits », la réponse officielle par une attaque à l’artillerie lourde du siège du Kung Fu à Amboditsiry… Bref, autant d’évènements dignes des films d’action américains, mais dans lesquels les victimes décèdent vraiment…
Mais il y a aussi des points positifs, dont la visite du Pape Jean-Paul II et la suppression de la censure de la presse ne sont pas des moindres.
Vers la fin des années 1980-début des années 1990, un grand vent de changement souffle sur la planète (en particulier avec la glasnost et la pérestroïka). Sur environ mille quatre cents soixante-dix États, seuls une douzaine se réclament encore du marxisme révolutionnaire. « Outre la grande vague de décommunisation observée au Centre et à l’Est du continent européen, des pays du Tiers-Monde aujourd’hui abandonnent, officiellement ou dans la pratique politique et économique quotidienne, leur idéologie révolutionnaire » (Discours d’intronisation de Pascal Chaigneau devant l’Académie des Sciences d’Outre-mer de Paris, février 1990).
Ainsi, à la fin de 1989, le Bénin évacue toutes références au « socialisme scientifique ». La Grande Ile, elle, préfère opter pour une orientation politique. Officiellement, c’est encore le Boky Mena qui sert de base idéologique à la Constitution de la RDM. En réalité, une « désocialisation » de l’économie s’opère, ainsi qu’une redéfinition de l’échiquier politique local.
Depuis le début des années 1980, la doctrine économique de 1975 n’est plus que de la littérature. Après la vague de nationalisations, les pouvoirs publics procèdent à la « privatisation de nombreuses entreprises socialistes », « souvent pour le franc (malgache) symbolique ». Dans le cadre de cette libéralisation, il fait surtout appel aux investisseurs étrangers. « Le nouveau Code des investissements ainsi que la loi sur les zones franches industrielles vont dans le sens d’une grande ouverture de l’économie malgache vers les marchés solvables, en général occidentaux. »
Si en 1985, Madagascar compte trois investisseurs étrangers, quatre ans plus tard, elle en accueille cinquante-trois. Cette libéralisation s’accompagne enfin d’une ouverture politique. Cette ouverture est aussi la fin du FNDR, mise en relief par la participation de Manandafy Rakotonirina (MFM), Monja Jaona (Monima ka miviombio) et Marojama Razanabahiny (VITM) aux élections présidentielles de 1990.
Pela Ravalitera