Propreté intellectuelle

La ville est propre. Que demande le peuple ? Il faut remonter à l’ère coloniale et à la première République pour retrouver ces clichés immortalisés sur les cartes postales. Une autre époque, bien évidemment. Il fallait des endroits paradisiaques pour séduire les apprentis épistoliers. Avec l’avènement de l’enfer socialiste, on perdait tout ce qui avait trait à la discipline, au respect des biens publics, au savoir-vivre. Voilà pourquoi les bornes fontaines en fonte massive, les bornes d’alerte incendie, les panneaux de signalisation succombent à la furie du vandalisme. La pauvreté complique une situation, un état d’esprit qui frôle la démence.  

C’est un fait. La capitale respire un bol d’air frais. Quel que soit le motif de cet assainissement, il a le mérite d’avoir répondu à une longue attente, à un rêve que l’on croyait définitivement inaccessible. Les acquis vont rester, qu’on le veuille ou non. Mais le plus difficile reste à faire. Comment préserver et maintenir ces infrastructures après la visite des chefs d’État et des présidents venus pour le Sommet de la COI ?  

Là, il faut faire appel à la « propreté intellectuelle» de la population. C’est loin d’être évident. Cela ne pourra pas se faire à coups de crosse. On a vu la capacité de résistance des marchands de rue qui a eu raison de la détermination de la CUA de les dégager des trottoirs. Tout est question d’éducation. C’est une œuvre de longue haleine. Quand on sait que 80 % de la population est pauvre, sans état civil, déscolarisée pour la plupart, on réalise l’immensité de la tâche et de l’effort à fournir pour redresser la situation.  

À preuve, même dans les grands matchs de football ou lors des grands spectacles où le public, qui paie cher le ticket d’entrée, est censé avoir une certaine éducation, on n’hésite pas à monter sur les chaises. Les toilettes sont « mutilées » après chaque représentation.  

L’assainissement ne doit pas se limiter au niveau du nettoyage, de l’enlèvement des ordures, du ravalement des façades ou de la réhabilitation des rues, il doit s’effectuer d’abord au niveau de la population elle-même. L’exode rural a fait que la population de la capitale est maintenant composée d’individus inéligibles à la vie citadine. Comment les renvoyer d’où ils viennent, c’est la grande question dont la réponse constituera le fil d’Ariane dans cet écheveau.  

Sylvain Ranjalahy

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