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Pour Denis Alexandre Lahiniriko, les résultats des travaux de la Commission mixte sur les événements de 1947 devraient établir une relation plus sereine entre Madagascar et la France. |
Selon Emmanuel Macron, président français, lui et Andry Rajoelina, président de la République, ont convenu de la création d’une Commission mixte franco-malgasy, sur les événements de 1947. Le docteur Denis Alexandre Lahiniriko, enseignant-chercheur et historien à l’université d’Antananarivo, réagit sur le sujet.
L’Express de Madagascar. Que pensez-vous de la décision des présidents Rajoelina et Macron de mettre en place une Commission mixte sur les événements de 1947 ?
Denis Alexandre Lahiniriko. En tant qu’historien, je me réjouis particulièrement de la décision de créer cette commission mixte d’historiens aussi bien malgaches que français qui vont se pencher sur les violences commises pendant la période coloniale. L’idée d’une telle commission n’est pas nouvelle et se place dans une dynamique déjà enclenchée dans plusieurs anciennes colonies françaises comme l’Algérie ou récemment le Cameroun. J’ai moi-même lancé cette idée avec le soutien de mes collègues malgaches et français qui ont senti sa nécessité dans le contexte géopolitique mondial actuel.
Était-il nécessaire de mettre en place cette Commission avec tous les travaux de recherche déjà effectués sur le sujet ?
Mettre en place une telle commission est importante afin d’apaiser la mémoire commune entre la France et Madagascar, pour établir une relation plus sereine tournée vers un meilleur avenir. Il appartient maintenant aux responsables des deux pays de définir le cadre de travail de cette commission. Nous les historiens malgaches, nous sommes prêts et le projet est déjà défini.
Que fera-t-elle dans ce cas ?
Si je me fie aux déclarations du président Macron, la commission se chargera d’étudier les différents événements traumatiques de la période coloniale. Bien sûr, il y a les événements de 1947 et notamment leurs répressions multiformes. Mais il y a également les événements de la période sombre de la pacification pendant laquelle des massacres ont été commis. Le plus connu est celui d’Ambiky avec la décapitation du roi Toera. Mais cet événement n’était pas isolé. Il y a eu d’autres massacres encore inconnus et qui méritent d’être mis au jour. Nous aimerions également étudier les autres formes de violences coloniales telles que les arrestations, les emprisonnements ou encore les exécutions judiciaires voire extrajudiciaires.
De quelle manière devra-t-elle procéder ?
La commission devrait faire un travail de recherches et notamment dans les archives entreposées en France. Je pense au Centre d’archives de la France d’Outre-mer à Aix-en-Provence, les Archives nationales de Paris, les archives diplomatiques de Nantes et de La Courneuve ou encore le Centre d’archives militaires de Vincennes. Les historiens des deux pays mettront à profit cette commission pour accéder à d’autres centres archivistiques inédits et en particulier en ce qui concerne les archives de la Sûreté Générale. Pour tous ces travaux, comme au Cameroun, les historiens doivent bénéficier d’une autorisation spéciale qui leur permettra un total libre accès.
Selon vous, comment devrait être la composition des membres de cette Commission ?
Les membres de cette commission doivent être des historiens universitaires. À Madagascar, les historiens sont prêts. On a déjà anticipé cette décision et nous n’attendons que les décisions que les autorités politiques prendront pour se mettre au travail. On a hâte de s’y mettre.
Garry Fabrice Ranaivoson