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Un atelier de deux jours a été organisé pour établir notamment la liste des biens stratégiques à double usage à Madagascar. |
L’utilisation des armes à double usage fera bientôt l’objet d’un encadrement légal. Une loi est en cours d’élaboration pour limiter les risques de détournement à des fins malveillantes.
L’importation de certains produits, souvent destinés à des usages civils, sera bientôt strictement encadrée à Madagascar. Ces produits, anodins en apparence, peuvent pourtant être détournés à des fins militaires et utilisés pour fabriquer des armes de destruction massive s’ils tombent entre de mauvaises mains. Afin de prévenir de telles dérives, une loi sur le commerce des biens stratégiques et à double usage est actuellement en cours d’élaboration. Un atelier de deux jours s’est tenu à l’hôtel Radisson d’Ambodivona, réunissant divers acteurs concernés, pour définir les éléments fondamentaux qui devront figurer dans ce texte législatif. À ce jour, aucune réglementation spécifique ne régit l’importation de certains produits sensibles, comme les composants entrant dans la fabrication des vernis à ongles, des engrais chimiques ou encore certains déchets radiographiques, autant de matières susceptibles d’être détournées à des fins malveillantes.
« Certains composants de ces produits peuvent être utilisés à mauvais escient par des individus malintentionnés qui peuvent les transformer en armes de destruction massive. D’où la nécessité de réglementer leur importation », explique une source au sein du ministère des Forces armées.
Menace
Depuis 2011, les modes opératoires des groupes terroristes ont évolué. Les explosifs artisanaux issus de composants militaires, plus facilement repérables par les dispositifs de sécurité, ont progressivement laissé place à des dispositifs fabriqués à partir de matériels d’apparence civile. Cette évolution a conduit plusieurs pays, notamment européens, à adopter des lois strictes sur la régulation des biens stratégiques à double usage. Si Madagascar n’a, pour l’instant, détecté aucune menace concrète en la matière, les autorités nationales souhaitent agir en amont pour éviter toute vulnérabilité.
Le futur texte visera non seulement à dresser une liste précise des biens concernés, mais également à instaurer un mécanisme de détection permettant d’identifier les importateurs suspects. L’objectif est clair : sans interdire l’importation de produits indispensables à l’économie civile, il s’agira de surveiller les flux, d’analyser les volumes commandés et de vérifier la cohérence entre les produits importés et l’activité déclarée de l’importateur. « L’objectif est de comprendre pourquoi telle personne importe massivement des produits qui n’ont a priori aucun lien avec ses activités quotidiennes. Ces personnes peuvent en effet présenter un risque potentiel pour la sécurité », poursuit notre source.
En parallèle, le projet de loi devra aussi trancher sur la question de l’autorité compétente pour délivrer les autorisations d’importation. Le ministère de la Défense nationale pourrait être chargé de cette mission, mais d’autres scénarios sont envisagés, notamment une collaboration entre la Défense, la Direction générale des Douanes et d’autres services spécialisés. La coordination entre plusieurs entités semble, à ce stade, la voie privilégiée pour assurer une surveillance efficace et éviter les failles dans le contrôle des importations sensibles.
Tsilaviny Randriamanga