DÉFICIT MONÉTAIRE - L’euro franchit la barre des 5 000 ariary

L’euro dépasse les 5 000 ariary.

L’ariary poursuit sa dépréciation face à l’euro, qui dépasse désormais le seuil des 5 000 ariary. Une situation qui s’explique par la faiblesse de la production locale et la forte dépendance aux importations.

Le taux de change de l’euro a atteint 5 060,41 ariary hier, selon un site de référence en devises. D’après la dernière mise à jour de la Bank of Africa, il s’établissait à 4 979,33 ariary au 7 mars 2025.

« Le déficit monétaire résulte principalement d’un déséquilibre entre les entrées et les sorties de devises. Les revenus en devises étrangères ne suffisent pas à couvrir les dépenses liées aux importations, ce qui entraîne une baisse de la valeur de l’ariary », explique un économiste de l’Université d’Ankatso.

L’une des causes principales de cette situation réside dans le faible niveau de production locale. « Le problème est que nous importons massivement des biens stratégiques : carburant, produits de première nécessité, divers produits manufacturés. En revanche, nos exportations restent limitées à des matières premières comme la vanille, le litchi, le café, des minéraux non transformés, et quelques produits finis, notamment dans le textile », poursuit-il.

À cela s’ajoutent les fluctuations des devises sur le marché international. « Les variations de la valeur de l’euro à l’échelle mondiale influencent notre taux de change, même si cela ne dépend pas directement de notre économie », souligne l’économiste.

À Madagascar, cependant, le facteur déterminant demeure le déséquilibre de la balance commerciale. 

« L’euro est en hausse et le dollar suit de près. Or, la majorité des produits de première nécessité sont échangés en dollars. Cela renchérit le coût des importations et accentue la pression sur l’économie nationale », alerte-t-il.

Il convient toutefois de nuancer l’impact de cette dépréciation monétaire. « Ce n’est pas parce que l’ariary baisse que les exportateurs en tirent automatiquement profit. Certes, ils gagnent plus en monnaie locale, mais en parallèle, le coût des importations augmente, ce qui pèse sur l’ensemble de l’économie », tempère l’économiste.

Quelles solutions ?

Pour inverser la tendance, il est impératif de réduire la dépendance du pays aux importations en stimulant la production locale. « Le véritable problème ne réside pas tant dans le taux de change que dans notre capacité de production. Nous ne produisons pas assez », insiste-t-il.

« Si nous voulons améliorer la situation, nous devons impérativement développer le secteur secondaire, c’est-à-dire transformer nos matières premières sur place au lieu de les exporter à l’état brut », explique l’économiste. Le tourisme pourrait également constituer un levier stratégique pour générer davantage de devises et réduire le déficit monétaire, ajoute-t-il.

Certains experts suggèrent d’envisager un régime de change fixe, à l’image de plusieurs pays asiatiques et africains. 

 « Cette approche permettrait à l’État de fixer un taux stable afin d’éviter les fluctuations excessives », explique un spécialiste.

Toutefois, une telle solution comporte des risques, notamment en matière de gestion des réserves de devises. « Un taux fixe nécessite une capacité d’intervention régulière sur le marché des changes, ce qui suppose de disposer de réserves suffisantes en devises étrangères », met en garde Isidore Razanakoto, directeur général du Commerce.

Au-delà des ajustements monétaires, une réforme économique structurelle s’impose pour redresser la situation. « Tant que nous ne produisons pas, nous achetons le travail des autres. La production locale existe, mais elle demeure insuffisante pour couvrir les besoins du pays. Résultat : nous devons importer, et cela nous coûte cher », souligne le directeur général du Commerce.

Pour limiter cette dépendance, le gouvernement doit intensifier son soutien aux initiatives locales et favoriser une économie plus circulaire, recommande-t-il.

En conclusion, la stabilité monétaire ne pourra être atteinte sans une modernisation en profondeur du modèle économique malgache. « La clé pour résoudre cette crise réside dans une réforme ambitieuse de notre économie. Il est impératif de renforcer la production locale et de réduire notre dépendance aux importations », conclut Isidore Razanakoto.

 Irina Tsimijaly

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