Sava pas non?

Un boomerang. Les producteurs de vanille de Sava en général et d’Antalaha ne peuvent que s’en mordre le doigt. Depuis quelques jours, ils manifestent dans la rue à fort renfort de banderoles et de mégaphone pour faire part de leur détresse. Ils sont au bout du rouleau. La vanille ne trouve plus preneur. Les entreprises et sociétés ayant un agrément n’achètent plus la production même si elle est vendue à vil prix, moins cher que le haricot vert. Ils pointent du doigt la libéralisation sauvage en vigueur. Ils font appel à l’État en général et au président de la République pour les sauver du naufrage. Ils n’ont plus aucune ressource, à en juger leurs complaintes écrites sur les banderoles.  

Étrange retournement de situation tout compte fait prévisible. 

S’agit-il des mêmes producteurs qui ont été manipulés par quelques politiciens véreux et qui ont exigé la fin d’un soi-disant monopole et la libéralisation du secteur? Ils avaient également sommé l’État d’abandonner les prix planchers de 75.000 ariary le kilo pour la vanille verte et 250 dollars le kilo pour la vanille préparée. Des mesures destinées à protéger les planteurs, les producteurs de vanille en particulier. 

Des représentants diplomatiques étrangers ont épaulé les producteurs et des politiciens pour faire plier l’État en 2022. Eux aussi ont réclamé la fin du « monopole ».  Leurs revendications ont été donc satisfaites à 100%. L’État a fini par se détacher discrètement du secteur vanille. 

Aucune action n’a plus été entreprise. Et voilà que les producteurs réclament le retour aux affaires de l’État. 

Les politiciens les ont visiblement abandonnés à un moment où ils ont le plus besoin d’eux. 

Maintenant l’affaire se corse. L’État ne peut pas tenir un miracle pour absorber tout le stock de vanille actuel dans la Sava et ailleurs. Autant on peut décréter des prix planchers, autant on ne peut pas obliger les exportateurs à acheter au prix que l’on veut. Il faut tout simplement se soumettre à la sacro-sainte loi de l’offre et de la demande pour relancer le prix. Une situation déjà vécue dans le passé où il a fallu brûler tout le stock existant pour redémarrer le mécanisme. C’est aussi simple que ça. 

L’erreur a été de croire qu’une libéralisation totale serait profitable à la vanille. Avec une pléthore d’exportateurs, le prix baisse en toute logique. Tout le monde veut acheter à un prix dérisoire. Les acheteurs peuvent attendre jusqu’à la fin du monde pour que le prix baisse. En revanche, les producteurs ne peuvent pas se permettre d’entamer un bras de fer. Ils n’ont pas une surface financière assez large pour tenir le coup.

Il est évident que l’État ne laisse pas la vanille courir vers sa date de péremption. C’est un suicide que d’abandonner un des produits pourvoyeurs de devises étrangères. Comme on apprend de ses erreurs, gageons que cette situation servira de leçon pour ne plus faire l’expérience d’un retour de… manivanille.

Sylvain Ranjalahy

1 Commentaires

  1. Il y a une erreur d'analyse économique dans cet article: une pléthore d'exportateurs ne peut pas nuire au marché, bien au contraire: cela engendre une concurrence entre acheteurs et cela tend naturellement à favoriser les producteurs qui peuvent vendre au plus offrant. L'analyse historique du marché nous révèle surtout que durant la période de contrôle part l’État, le marché mondial commençait déjà diminuer, d’où les difficultés pour les exportateurs à offrir le prix planché fixé par l'Etat d'une part et d'autre part, les prix trop élevés à Mada ont poussé les importateurs à se tourner vers d'autres pays et à passer des contrats d'approvisionnement à long terme. Maintenant les producteurs subissent la double peine: les stocks accumulés viennent s'ajouter à la nouvelle production d'un coté et de l'autre les importateurs achètent beaucoup moins à Mada en raison des contrats passés avec les autres pays fournisseurs. Bref, l'intervention de l'Etat malgache n'a pas permis de soutenir les prix mais a détourné les acheteurs internationaux vers d'autres pays, cette intervention a masqué la chute des prix sur le marché international et à provoquer l'accumulation de stocks qui saturent le marché et empêche les prix de remonter. Une erreur économique tragique qui démontre une absence de compréhension des mécanismes de marché ou (pire) de la pure démagogie de politiciens avides de s'attirer les faveurs d'un électorat peu instruit et facilement manipulable.

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