AGRICULTURE - L’arachide présente un fort potentiel de croissance

Madagascar a produit 13 500 tonnes d’arachide en 2024.

L’arachide est une légumineuse annuelle qui se cultive surtout dans des régions chaudes et ensoleillées. Sa culture se fait en saison chaude et pluvieuse sur les Hautes-Terres centrales. Les spécialistes soutiennent que la filière arachide dispose d’un potentiel de développement très intéressant à Madagascar.

Selon le ministère de l’Agriculture et de l’Élevage (MINAE), l’arachide figure aujourd’hui parmi les filières prioritaires qui bénéficient d’un appui conséquent de l’État et des partenaires dans le cadre de la mise en œuvre de la politique visant à atteindre l’autosuffisance alimentaire, mais aussi à développer le tissu industriel malgache. C’est la raison pour laquelle Madagascar a également choisi d’intégrer le réseau d’amélioration de l’arachide pour l’Afrique (GINA), qui regroupe treize pays. On sait en outre que deux mille cinquante-cinq producteurs d’arachides dans la région Menabe bénéficient d’un programme d’accompagnement à travers le projet PURPA (Projet d’Urgence de Renforcement de la Production Alimentaire) et avec la collaboration de la direction régionale du MINAE et du Fonds de Développement Agricole (FDA).

Lors de la préparation de la campagne culturale 2023-2024, les paysans du Menabe ont été dotés de 57,5 tonnes de semences certifiées ainsi que de 246,6 tonnes d’engrais. Ils ont également pu profiter d’une action d’encadrement technique et de divers appuis de plusieurs partenaires techniques et financiers dont l’USAID Mikajy et l’ONG Durell. Ces initiatives ont produit des résultats qualifiés de satisfaisants : une hausse de l’ordre de 32% de la production d’arachide est notamment enregistrée. 

La production d’arachide pour la campagne de grande saison de 2024 est estimée à 13 500 tonnes. C’est la région Menabe, connue pour être une zone à forte potentialité en matière de production d’arachide, avec 10 000 tonnes d’arachides produites en moyenne chaque année, qui est en pole position. Il est précisé que l’abondance de la pluviométrie dans cette partie de l’île, notamment dans les cinq districts (Manja, Miandrivazo, Mahabo, Belo sur Tsiribihina et Morondava), favorise le développement de la culture d’arachide. Et les producteurs bénéficient de divers appuis tout en disposant d’unités permettant de décortiquer les arachides à coque.

On rappelle également que l’arachide est la première culture oléagineuse dans le pays et que la filière génère trente-cinq mille emplois directs et indirects rien que pour le Menabe. Afin de promouvoir cette filière, des événements économiques et culturels sont organisés annuellement, en particulier dans le district de Belo sur Tsiribihina. Une unité de transformation d’arachide en huile alimentaire a aussi été installée dans le district de Morondava afin de développer cette chaîne de valeur. Jusqu’ici, 60 tonnes d’arachides sont seulement transformées en huile par les producteurs artisanaux sur place chaque année. Pour le ministère chargé de l’Industrialisation et du Commerce, il est possible de multiplier la production nationale par deux à court terme. D’où l’appui renforcé aux producteurs et la multiplication des petites unités de transformation comme celles ouvertes à Tsiroanomandidy et à Anjozorobe.

Un calendrier cultural à suivre

Il est constaté en outre que la demande d’arachide est en constante augmentation tant sur le marché local qu’à l’international. En plus de la production issue de la campagne pluviale, les paysans sont accompagnés pour préparer la culture de contre saison d’arachide, prévue entre juin et juillet. L’arachide exige un sol meuble ou ameubli, bien drainé, une humidité du sol élevée permettant l’imbibition de la graine lors de la germination, à la formation des gousses, et au grossissement des graines. Les pluies bien reparties durant le cycle lui sont favorables ainsi qu’une température ambiante entre 15 ° C - 32 ° C. Si la saison pluviale est longue, on peut choisir entre les variétés à cycle court (90 jours, semer plus tardivement), cycle intermédiaire (120 jours) et cycle long (150 jours).

À Madagascar, les cultures d’arachide se font essentiellement sur des sols ferralitiques et sur des sols ferrugineux tropicaux qui sont tous deux caractérisés par leur grande pauvreté en minéraux. Aussi, les techniciens soulignent-ils la nécessité d’apporter de la fumure minérale, celle recommandée est le NPK. Apporter aussi de la Dolomie (Ca et Mg) en un seul apport avant ou pendant le semis. Pour les récoltes et les traitements post-récolte, ils doivent se faire en période sèche. Au cas où la période de récolte coïncide avec la période pluvieuse, il est recommandé de faire un suivi de près de la récolte pour les variétés non dormantes. 

Les techniciens notent également que le stockage doit être bien conduit pour éviter les moisissures induisant la synthèse d’aflatoxines. En général, les ennemis de culture sont les champignons durant le semis, à la récolte et au stockage, les pucerons et virus durant le stade végétatif et les vers blancs durant les stades végétatif et reproductif. Si la saison pluviale est courte, le choix des variétés à cycle court est conseillé. Ainsi, on ne devrait pas cultiver l’arachide en tête de classement des spéculations sur une parcelle fertilisée au fumier de ferme. Ce dernier, surtout s’il est frais, provoque un fort développement de la partie aérienne et provoque l’apparition des gousses vides. Il vaut mieux placer l’arachide en seconde position dans une rotation.  

Cependant, dans les sols très pauvres, il est bon de mettre 10 t/ha de fumier bien décomposé. Dans le Sud-Ouest, la saison pluviale trop courte ne permet pas la culture d’arachide sur tanety. Elle devra alors se faire sur les berges des fleuves ou rizières, sur Baiboho en période de décrue. Dans le Sud Est (Atsimo Atsinanana, Fitovinany, Vatovavy), la culture est possible à partir du début juillet obligatoirement. Étant donné les différents impacts de la variabilité climatique sur l’agriculture, le ministère de tutelle et son homologue des Transports et de la Météorologie (MTM) se sont concertés pour proposer des calendriers culturaux. Ces derniers concernent plusieurs spéculations dont l’arachide. Ces calendriers ont été élaborés selon les perspectives climatiques de la saison chaude et humide 2024 -2025 avec les recommandations sur les variétés mieux adaptées à chaque région, et ce, dans le cadre d’une agriculture climato-intelligente.

Les techniciens issus de la Direction Générale de l’Agriculture (DGA), du FOibem -pirenena momba ny FIkarohana ampiharina amin’ny Fampandrosoana ny eny Ambanivohitra (FOFIFA) et de la Direction Générale de la Météorologie (DGM) ont effectué un atelier technique sur l’élaboration de ces calendriers culturaux en décembre 2024. Ces calendriers culturaux se focalisent sur les cultures qui dépendent de la pluviométrie d’octobre 2024 à avril 2025. Un document a ainsi été élaboré concernant les calendriers pour la culture d’arachide en saison pluviale. 

Les unités de transformation de l’arachide se sont multipliées.

Produire plus et mieux

L’arachide, nous la consommons nature, salée, caramélisée, en confiserie, en sauce ou encore sous forme d’huile. Les animaux préfèrent les résidus transformés en tourteaux. En termes de surfaces cultivées – plus ou moins 5 % –, elle se situe encore loin derrière le riz (50 %), le manioc (25 %) et le maïs (10 %), mais la demande locale et internationale augmentant, producteurs locaux et investisseurs s’y intéressent de plus près. La Chine notamment. Selon Hary Raveloson, ingénieur agronome et opérateur économique dans le secteur agricole, il est temps de donner une nouvelle dimension à la filière arachide de Madagascar. Il soutient notamment que le pays a la possibilité de produire plus de 30 000 tonnes d’arachides chaque année et dont la moitié pourrait être transformée par des petites et moyennes unités industrielles.

Mais malgré ces potentialités, les producteurs locaux rencontrent diverses difficultés qui les empêchent d’en tirer pleinement les bénéfices et, in fine, des revenus adéquats. « Les faibles compétences techniques des agriculteurs, la rareté des organisations professionnelles dynamiques, la fragilité de l’environnement économique et logistique, ainsi que l’absence d’une règlementation spécifique nationale sur la production de l’arachide sont autant de freins au développement harmonieux de la filière », a expliqué Jean-Patrick Masquelier, directeur national à Madagascar pour l’ONG Louvain Coopération.

Pour améliorer la sécurité alimentaire et économique des communautés locales et renforcer sensiblement la place de l’arachide sur l’échiquier agro-industriel, les acteurs de la filière souhaitent que davantage d’experts soient impliqués dans le processus de développement de la chaîne de valeur et pour enrichir les réflexions concernant les enjeux techniques, agronomiques, économiques et écologiques posés par l’expansion de l’arachide dans les régions concernées.

PROJET APEMBA - Promouvoir l’arachide, le sorgho et le millet 

Équipement de transformation de l’arachide à Ankadinondry Sakay. 

Le projet agricole pour l’amélioration des activités commerciales du sorgho, du millet et de l’arachide (Apemba), qui dispose d’un budget de 2,5 millions USD, a été lancé l’année dernière dans le pays pour une période de deux ans. Le projet ambitionne d’accélérer la croissance de ces trois filières porteuses à travers des initiatives de recherche permettant d’augmenter leur productivité et leur rentabilité.

Selon les experts, l’arachide et les deux autres produits concernés peuvent renforcer sensiblement la sécurité alimentaire et garantir des moyens de subsistance durables pour des milliers d’agriculteurs. Des experts nationaux et internationaux spécialisés dans les cultures d’arachides, de sorgho et de millet, venant des États-Unis, de l’Ouganda et du Sénégal, ont pris part à une séance de travail qui a permis de présenter ce projet à toutes les parties prenantes. La réunion a été organisée par Feed The Future Innovation Lab for Peanut de l’Université  de Georgie avec le Global Collaboration on Sorghum and Millet de l’Université du Kansas ainsi que le centre de recherche FOFIFA. On sait également que le projet accordera un intérêt particulier à l’intégration des femmes et des jeunes dans le développement des chaînes de valeur.

Pour le centre FOFIFA, la recherche constitue la pièce centrale de ce projet. Ainsi, 28 nouvelles variétés de semences, dont 13 variétés d’arachides, ont été introduites. Leur adaptabilité par rapport aux conditions climato-pédologiques du pays est testée au niveau de 12 sites répartis dans 6 régions. Il s’agit notamment d’Analamanga, du Menabe, du Boeny, d´Ihorombe, d´Androy, d´Atsimo Andrefana. Les techniciens vont identifier les variétés les plus prometteuses face aux besoins spécifiques du pays tout en effectuant des recherches approfondies sur les transformations des cultures, et en explorant des moyens innovants dans l’alimentation animale. 

Selon toujours les explications fournies, le développement des pratiques minimisant les pertes post-récolte figure parmi les priorités, ainsi que les recherches sur la qualité nutritionnelle des produits.  Il est souligné que ce projet vise notamment à transformer radicalement ces trois chaînes de valeur, en utilisant les résultats des recherches et développement et en valorisant leurs cultures.

VERBATIM 

Mina Tsiriarijao Randrianarisoa,  coordonnateur du projet Apemba 

« Les nouvelles variétés d’arachide introduites à Madagascar sont déjà confirmées dans d’autres pays comme l’Ouganda et le Sénégal. Elles sont résilientes au changement climatique et possèdent de hauts éléments nutritifs. En plus, elles permettent d’enregistrer de hauts rendements de productivité atteignant 2 tonnes à 3 tonnes/ha dans les autres pays africains contre 800 kg à 1 tonne/ha dans la Grande île. Les variétés d’arachide utilisées sont également résilientes à la maladie virale dite “rosette” touchant cette filière ».  

Sesy Soja, coordonnateur national du PROGRES  

« Un nouveau programme intitulé Programme de renforcement de l’entrepreneuriat durable et de soutien à l’insertion économique des jeunes ruraux (PROGRES) est mis en œuvre actuellement à Madagascar. L’objectif consiste à transformer durablement les conditions de vie des jeunes ruraux malgaches. Au moins, cinquante mille emplois seront ainsi créés et soixante-quinze mille jeunes seront formés pour monter leurs propres entreprises rurales. La création d’opportunités entrepreneuriales sera soutenue par le développement des filières porteuses sur les marchés dont l’arachide ».

LA FILIÈRE ARACHIDE EN CHIFFRES

L'Express de Madagascar

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