En Allemagne, il incombe au service des Affaires étrangères d’assurer la mission d’information également qualifiée de «promotion de l’image de l’Allemagne à l’étranger» (DiA). C’est à ce titre que j’ai été invité à participer au «Programme des visiteurs de la République fédérale d’Allemagne» par un voyage d’information au pays des écrivains Goethe, Schiller, Thomas Mann et des musiciens Bach, Beethoven, Brahms.
Pris en charge par le Goethe-Institut, je ne m’attendais certes pas à avoir une session de travail dans une salle de classe avec, au tableau blanc, la fameuse récitation mnémonique «aus-bei-mit-nach-seit-von-zu» de mes années de «Deutsch als Fremdsprache». Et, comme c’était déjà de «coutume» en 1982, j’ai encore oublié «ab».
Je me situais alors plus souvent à 5 sur une échelle dont 1 correspondait à la meilleure note. Pourtant, malgré les nombreux «schlecht» récoltés à cette époque, quarante ans plus tard, et à ma grande surprise, je pouvais encore communiquer en allemand. Bravo à mes enseignantes de l’époque, au Cercle Germano-Malagasy, qui auront donc su m’imprégner des fondamentaux.
Cette décision 1982-1983 d’une inscription en cours de langue allemande doit beaucoup au parcours de la bande à Rummenigge et Schumacher à la Coupe du monde en Espagne, malgré leur défaite en finale contre l’Italie, le 11 juillet 1982.
Première Coupe du monde de football que le déjà fan du Bayern de Munich allait vivre en direct. En supporter d’une Mannschaft «Breitnigge». Comme si c’était hier.
RFA-Algérie (1-2), 16 juin. Grosse catastrophe. Après l’ouverture surprise du score par Madjer, l’Allemagne pensa avoir fait le plus dur quand Rummenigge égalisa un quart d’heure plus tard ; mais juste à la remise en jeu, la chevauchée des Fennecs lâchait irrémédiablement le trop lourd décathlonien Briegel et Belloumi pouvait ajuster Harald Schumacher à bout pourtant.
RFA-Autriche (1-0), 25 juin. L’Autriche compte déjà 4 points, et peut se permettre le luxe de perdre par deux buts d’écart, mais pas davantage sous peine de risquer une élimination à la différence de buts ; l’Allemagne revenue du «cauchemar algérien», vient d’assurer le minimum syndical de 4 points avec l’ouverture du score par Hrubesch, et peut même se reposer sur un goal average confortable après son large succès (4-1, et triplé de K-H Rummenigge) contre le Chili ; de toutes façons, l’Algérie n’avait pas su conserver ses trois buts d’avance contre le Chili... Après, on pourra toujours parler du «Nichtangriffpakt von Gijon», le «pacte de non agression de Gijon», entre les deux nations germaniques.
RFA-France, 3-3 (4p3), 8 juillet. «Séville, What else». «Ce soir là, on était d’accord en Andalousie, sans «Kalle», la RFA ne s’en sortait pas» écrira plus tard L’Équipe. J’étais seul contre tous dans une famille où le grand-oncle et mon père ont grandi au son de «La Marseillaise». Une victoire vicieuse, violente même avec le choc Schumacher-Battiston, mais des Allemands remontant un handicap de deux buts pour se qualifier au mental. À l’allemande.
Seul contre tous, comme l’Allemagne en 39-45. Mais, chut, cette image là n’est pas celle que le Ministère des Affaires étrangères veut communiquer, nous recevant pour la réunion inaugurale en la «Saal des 20. Juli 1944», en souvenir du jour de l’attentat de Klaus Schenk von Stauffenberg contre Adolf Hitler, l’opération Walkyrie.
Dans «Qui sont les Allemands ?», Jean-Louis de la Vaissière consacre cinq pages denses à analyser cette affaire. «Ce qui était clair dans les motivations et espoirs des conjurés, c’était de signifier aux alliés américains et britanniques qu’il y avait certains militaires et civils allemands avec qui ils pouvaient traiter. L’ont-ils fait pour «l’Allemagne éternelle», «l’Allemagne sainte», - selon l’expression que l’on prête à Stauffenberg devant le peloton d’exécution à Berlin -, au nom d’idéaux chevaleresques décalés ? Langage d’un autre temps qui soulignait la vocation de «nation chrétienne» de la patrie.
La hauteur de vues des conjurés, leur courage, leur référence à Dieu en ont frappé plus d’un lors de leur procès. Ont-ils agi pour arrêter un bain de sang, un massacre de civils, de soldats, de juifs, de populations étrangères ? L’ont-ils fait surtout pour sauvegarder les intérêts militaires et stratégiques de la nation, pour éviter une capitulation sans condition, préserver les cartes de leur pays dans le futur ? On peut répondre avec certitude que tous ces éléments jouaient un rôle. Beaucoup pensent que le dernier aspect, le point de vue militaire et stratégique, a été décisif. Sans exclure les autres». Et citant, Jean-Paul Picaper, «Leur action se situait au-delà de l’Histoire immédiate, et seul l’avenir pouvait lui trouver un sens». Ce sens : «la République d’Allemagne fédérale est née de cette volonté transcendante».
Nasolo-Valiavo Andriamihaja