Les chiffres sont inquiétants en ce qui concerne les indicateurs de développement des secteurs sociaux prioritaires dans la région Atsimo Andrefana. La représentante résidente de l’Unicef à Madagascar, Christine Jaulmes, donne des détails sur les réponses apportées par l’organisme onusien pour soutenir les communautés.
Avec un taux élevé de mariage d’enfants atteignant 66 % à Madagascar, un accès à l’eau potable limité à 59 %, et un abandon scolaire massif après le primaire, peut-on réellement affirmer que les droits des enfants sont respectés dans la région Atsimo Andrefana ?
Les chiffres sont en effet alarmants, avec un enfant sur quatre qui arrive à terminer le cycle primaire. Le mariage des enfants est également très préoccupant, avec 66 % des très jeunes filles qui se marient avant l’âge de 18 ans. L’éloignement des Centres de santé de base (CSB), situés en moyenne à 5 km des foyers, complique l’accès aux soins. De plus, la santé des enfants est préoccupante, car ils ne sont pas vaccinés ou n’ont pas accès à des services de santé. La région enregistre un faible taux de couverture vaccinale de 25 %. Les chiffres ne sont pas bons et sont même plus mauvais que la moyenne nationale pour la région Atsimo Andrefana. Mais on ne peut pas se satisfaire de cette situation, et c’est pour relever ces nombreux défis que nous sommes là.
Quelles solutions pourriez-vous envisager pour remédier à la faible couverture vaccinale ?
C’est le milieu urbain qui est plus problématique. Les mères, souvent occupées, négligent la vaccination gratuite de leurs enfants, de leur progéniture. Elles ne réalisent pas souvent les frais que la non-vaccination pourrait engendrer plus tard. Elles ont du mal à se projeter et à comprendre que l’enfant en bonne santé aujourd’hui peut tomber malade demain. Les approches et la communication sont à intensifier, même si nous déployons tous les moyens nécessaires pour acheminer les vaccins jusqu’en milieu rural. Nous mettons en place ce qu’on appelle stratégies mobiles, ou cliniques mobiles, avec un personnel de santé muni de paquets intégrés comprenant la vaccination, les consultations et des soins, pour se rendre vers les communautés, car un habitant sur deux habite à plus de 5 km.
Il y a également les agents communautaires, qui jouent le rôle d’interface, car ils sont à proximité des communautés. Formés et équipés par l’Unicef, ils effectuent des visites à domicile pour informer les familles et les inciter à se rendre dans les centres de vaccination. Ils peuvent aussi administrer des traitements immédiats contre la diarrhée, le paludisme et les maladies respiratoires. Ils nous sont très importants, car ils assurent ces premières interventions indispensables.
De nouvelles approches sont-elles envisagées, vu le contexte un peu particulier de la région Atsimo Andrefana en termes de superficie, d’us et coutumes, et d’indice de pauvreté ?
Nous continuerons à travailler avec les acteurs locaux : l’administration, les pouvoirs publics, les ONG, les chefs de tribu, les autorités religieuses, et les chefs de fokontany. Nous avons constaté, par exemple, qu’en cas de refus de vaccination par un ménage, le chef de fokontany intervient souvent pour convaincre la famille de faire vacciner ses enfants. Des maires se mobilisent également en faveur du développement social. Le maire de Saint-Augustin, à qui nous avons parlé lors de notre passage à Toliara la semaine dernière, est très impliqué et a approvisionné le CSB en eau et en électricité. Tous ces acteurs contribuent efficacement à la promotion du développement social.
Pareil pour la mobilisation autour de la construction de latrines, afin de faire comprendre les enjeux, notamment sur l’hygiène et la gravité de la contamination quand les villageois défèquent à l’air libre. C’est tout le village qui doit décider ensemble. La stratégie de proximité reste un moyen de mobilisation efficace.
Pour l’éducation, c’est un travail de longue haleine. Si on veut que les élèves aillent jusqu’au collège, il est nécessaire de les accompagner pendant 8 à 9 ans. Notre attention se porte sur le primaire et l’apprentissage de base, en mettant l’accent sur la formation des enseignants.
Mirana Ihariliva