En ce mois de mai 2024, le traité germano-malagasy du 15 mai 1883 a 141 ans. Si les Malgaches l’oublient parfois, les Allemands en commémorent la date. Sauf peut-être en 2006, quand, le 23 avril 2006, quinze jours seulement après la visite officielle du président allemand Horst Köhler à Madagascar, l’ambassadeur d’Allemagne, Dieter H. Zeisler, décède subitement à Antananarivo.
Du 22 au 26 février 1966, le président allemand Heinrich Lübke fut le premier Chef d’État étranger à visiter Madagascar depuis le retour de l’indépendance. À cette occasion, il se rendit également à Toamasina, Foulpointe et Antsirabe. À son tour, le président Philibert Tsiranana vint en Allemagne (27 août - 4 septembre 1962). Il faudra attendre quarante ans, jusqu’en avril 2006, et la visite officielle de Horst Köhler, pour des contacts de ce niveau.
Dès le retour de l’indépendance, en 1959-1960, la mémoire du «faha tany gasy» se réveille. Oui, car l’histoire de Madagascar ne commence pas seulement le 1er octobre 1895 ou le 6 août 1896. Parmi ce travail de «mamoha fota-mandry» (réveiller la boue qui dort), à moins que ce ne soit simplement de «mihady volamena» (déterrer l’or des anciens hauts faits), figure l’article de Georges Ranaivosoa dans Madagasikara-Magazine : «15 mey 1883 - 15 mey 1962 : ilay Ambasady Malagasy tany Alemaina sy ny Fifanekem-pihavanana Jermano-Malagasy». Il récidivera quelques années plus tard, en octobre 1968, avec l’ouvrage «Documents pour l’histoire des relations entre le Royaume de Madagascar et l’Allemagne», qui sera réédité par l’Ambassade d’Allemagne en mai 2000.
À la lecture des documents exposés, on réalise l’ingénuité du Gouvernement de la Reine Ranavalona II et du Premier Ministre Rainilaiarivony. À leur décharge, d’abord, la jeunesse de l’État malgache (tout juste 66 ans se sont écoulés depuis le traité entre Radama et Robert Farquhar) sans ossature administrative «moderne» (malgré les Instructions de 1878 et le Code de 1881) ni cadres strictement fonctionnaires (le Premier Ministre affectionnant le centralisme du tout «akarina an-dRova») ; ensuite, la situation géographique périphérique de Madagascar qui l’a toujours tenu éloignée des courants d’idées et de l’actualité internationale ; enfin, le jeu des relations complexes entre les vieilles puissances installées d’Europe.
Les pouvoirs des deux ambassadeurs, Ravoninahitriniarivo et Ramanikara, leur furent confiés le 19 juillet 1882 au palais de Tsarahafatra. Le 1er août, par télégramme, le Consul de Madagascar à Londres, Samuel Procter, informait le Ministère allemand des Affaires étrangères de l’arrivée prochaine de cette ambassade. Le 11 août, le comte Paul Hatzfeldt, Secrétaire d’État allemand aux Affaires étrangères, informe l’Empereur Guillaume, lequel lui demande un rapport sur Madagascar. Extraits : «La tribu dirigeante de Madagascar est depuis l’année 1813 celle des Hovas qui, du centre montagneux ont submergé l’île, la domine au moins nominalement (...) le conflit actuel avec le Gouvernement français était provoqué par les prétentions que la France soutenait sur des territoires de la côte Nord-Ouest de l’île (...) Le Gouvernement des Hova refuse de reconnaître ces prétentions parce que le côté français n’a fait aucune réserve concernant ces régions en litige dans le traité d’État conclu entre lui et la France en l’année 1868 (...) Pour prendre éventuellement position vis-à-vis de la Légation annoncée, j’ai instruit l’ambassade à Londres de s’informer en sous main et confidentiellement sur l’attitude du Gouvernement britannique».
(À suivre)
Nasolo-Valiavo Andriamihaja