ÉCONOMIE VERTE - Un écosystème de plus en plus dynamique

Les énergies propres pèsent beaucoup dans l’économie verte.

Se développant à vitesse accélérée au niveau mondial, l'économie verte commence aussi à connaître un dynamisme certain au plan national. De la promotion des énergies renouvelables à l'instauration d'une industrie plus verte en passant par la mise en valeur des aires protégées, les initiatives se multiplient dans la Grande île.

Pour les plus enthousiastes, Madagascar est bel et bien entré dans l'ère de l'économie verte. Certains, se disant plus réalistes, estiment que le pays doit encore produire de gros efforts pour verdir son économie mais reconnaissent que les mesures gouvernementales prises ces derniers temps, les contributions multiples des partenaires techniques et financiers ainsi que les projets privés (énergies renouvelables, traitement des déchets, agroécologie, écotourisme, pêche responsable, commerce équitable…) qui ne cessent d'augmenter prêtent à l'optimisme. Parallèlement, les instruments financiers permettant de mettre en orbite les projets dits durables tendent à se diversifier.

Du côté des partenaires au développement, on s'attelle à renforcer la sensibilisation des différents acteurs aux bienfaits de l'économie verte. Pour les Nations unies, c'est une nouvelle opportunité pour des pays comme Madagascar de parvenir à une croissance forte et inclusive inscrite dans la durée. "Elle permet d’envisager sous un autre angle la solution des problèmes de développement, notamment la persistance de la pauvreté et du chômage, la détérioration de l’environnement, la vulnérabilité au changement climatique et l’accroissement rapide de la population", soutient la Commission Économique pour l'Afrique des Nations unies. Cette dernière ajoute que si l’économie verte peut favoriser la croissance, c’est grâce à l’énorme patrimoine de ressources naturelles qui forme pour des pays la base de la croissance économique.

Pour le ministère en charge de l'Environnement et du Développement durable (MEDD), l’atteinte des objectifs d'émergence fixés par Madagascar passe par le verdissement de son économie. Et ce département précise que, par définition, l’économie verte est un catalyseur de développement durable, en ce sens qu’elle favorise la promotion de modes de consommation et de production durables. "Économie verte et croissance verte sont actuellement des expressions à la mode. Selon le Programme des Nations unies pour l’Environnement, l’économie verte est une économie qui engendre une amélioration du bien-être humain et de la justice sociale, tout en réduisant sensiblement les risques environnementaux et les pénuries écologiques".

Toujours selon ce département piloté actuellement par Max Fontaine, l’économie verte promeut le bien-être social des hommes, l’équité, le respect du genre tout en faisant en sorte que les ressources naturelles ne soient pas détruites de façon irréversible. La protection de l’environnement, la gestion des ressources naturelles (ressources en eau, maîtrise de l’énergie renouvelable) sont ainsi les principaux grands ensembles des activités de l’économie verte.

Quarante-sept parcs solaires à créer

Mais au-delà des discours des théoriciens du développement, force est de constater que les projets appelés à porter la croissance de l'économie verte tendent à monter en envergure à l'instar de celui annoncé dernièrement pour la construction de quarante-sept parcs solaires. Lors de son passage au port de Toamasina ce 18 avril, le chef de l’État malgache, Andry Rajoelina, a présidé la cérémonie de réception des panneaux solaires de 50 mégawatts destinés à ce grand projet qui touche dix-huit régions du pays. Occasion pour le Président de préciser que les autorités de la Grande île veulent faire de l’énergie verte une priorité. Le programme est inscrit dans la Politique Générale de l’État afin de “résoudre les problèmes énergétiques récurrents à Madagascar”.

Pour Andry Rajoelina, cette option exige non seulement une solution pérenne, mais également une gouvernance efficace. “Le choix de l’État malgache s’oriente vers une politique énergétique propre mais aussi économique, visant à alléger les charges financières de l’État”, a-t-il soutenu. Du côté du ministère en charge de l’Énergie, on explique que Madagascar inaugure une nouvelle ère énergétique en faisant cet investissement. Et la première cargaison de deux cent soixante-trois conteneurs arrivée à Toamasina est considérée comme le coup d’envoi d'un grand projet visant à mettre fin au délestage et à accélérer le développement de l’économie verte.

Avec une production prévue de 70 gigawattheures par an, ces nouveaux équipements sont prévus pour augmenter le taux d’accès à l'électricité propre et réduire les coûts de production énergétique, face aux coûts exorbitants consacrés chaque année à l'approvisionnement en carburant des centrales thermiques, qui s'élèvent à 250 millions de dollars. “Ce qui permettra à la Jirama de se passer des coûteux groupes thermiques et de renforcer sa stabilité financière”, a-t-on également fait savoir avant de noter que les économies attendues s'élèvent à 19 000 m³ de carburants par an, représentant environ 85 milliards d'ariary (17,9 millions d’euros).

Le coût total du projet d’implantation des quarante-sept parcs solaires s’élève à 286 milliards d'ariary (60,3 millions d’euros), comprenant l’acquisition du matériel, la préparation des sites, le transport, et la construction des lignes de transmission électrique. En tout, soixante-quinze mille panneaux photovoltaïques seront livrés. Le projet prévoit en outre l’installation de batteries de stockage d'énergie et d'onduleurs. Selon un technicien, les technologies utilisées garantissent une durée de vie des panneaux de 25 ans et offrent des garanties de dix ans pour les batteries et de cinq ans pour les onduleurs. Les travaux d'installation des parcs solaires sont prévus pour ce mois de mai. Un calendrier confirmé par Olivier Jean-Baptiste, le ministre de l'Énergie et des Hydrocarbures.

Rencontre entre le ministre de l’Environnement et les industriels.

Les industriels jouent le jeu

De son côté, le Syndicat des industries de Madagascar (SIM) tient aussi à faire savoir que les entreprises de transformation comptent renforcer leur contribution au développement de l’économie verte. Tiana Rasamimanana, actuel président du SIM, lors d'un échange récent entre les industriels et le ministre de l’Environnement et du Développement durable et son équipe, a expliqué que l'heure est au partenariat public-privé pour "trouver des solutions aux problèmes qui limitent la marche vers une industrie plus verte". À noter que la rencontre entre les deux parties a été axée sur les enjeux et les débats relatifs à la protection de l’environnement et à la promotion de l’industrie durable à Madagascar.

Une occasion pour le MEDD de présenter la politique environnementale du gouvernement, mettant en avant la collaboration entre ce département et le secteur industriel. "Les activités industrielles et l’environnement sont deux aspects étroitement liés. La majorité des matières premières utilisées par ces entreprises proviennent des ressources naturelles. Néanmoins, la croissance de l’industrie exerce une pression sur l’environnement et il est impératif d’établir un plan organisationnel afin d’engendrer des retombées positives pour le pays", a soutenu Max Fontaine.

On sait en outre que les sujets abordés comprenaient la promotion d’une gestion durable des ressources naturelles, l’établissement d’un "système de traçabilité des matériaux utilisés", la gestion des déchets industriels, la lutte contre la pollution atmosphérique et les incendies forestiers, ainsi que la question du marché carbone et de la répartition équitable des bénéfices tirés de l’extraction des ressources naturelles, y compris l’Accès aux partages des avantages (APA) et la Responsabilité sociétale des entreprises (RSE).

"Les entreprises affiliées au SIM ont exprimé un fort engagement envers la préservation de l’environnement et ont manifesté leur volonté de collaborer étroitement avec le ministère de l’Environnement et du Développement durable pour concrétiser les points discutés lors de cette réunion", a-t-on également fait savoir. Tiana Rasamimanana qui a aussi mis à profit cette rencontre pour saluer l'initiative du MEDD et exprimer la volonté des industriels à travailler main dans la main avec le gouvernement. Parmi les points mis en avant figurent également les énergies renouvelables. À savoir qu'un certain nombre d'entreprises industrielles opérant à Madagascar se sont déjà lancées dans l'autoproduction d'énergie verte. "Le SIM est convaincu que ce genre de rencontre permettra de renforcer la collaboration entre le Gouvernement et le secteur privé et de contribuer ainsi à la croissance économique verte de Madagascar", a-t-on conclu.

Mais il n'est pas possible d'asseoir une économie verte dynamique sans une forte capacité de mobilisation des ressources nécessaires. D’où les diverses actions pour s’arrimer aux exigences des bailleurs et d’accéder davantage à des outils de financement dits verts. Pour Sunref Madagascar, label de finance verte de l’Agence française de développement (AFD), il est capital pour les entreprises de la Grande île de bénéficier de plus de soutiens financiers pour lancer des investissements leur permettant de surfer sur la vague de l’écoresponsabilité. Notons que ce programme accorde une ligne de crédit mise à la disposition des banques partenaires, avec des conditions de partenariats privilégiées pour le financement d’investissements verts. On sait par exemple que la société Phael Flor a inauguré récemment sa station solaire grâce au financement de la BNI Madagascar dans le cadre du programme Sunref.

D’autres programmes sont également disponibles comme le projet « FIER », financé par le Fonds conjoint des Nations unies pour les Objectifs de développement durable. Il permet aux entreprises d’accéder à des prêts concessionnels, des garanties et des subventions complémentaires pour le financement des projets sur l’énergie renouvelable et durable à Madagascar. L'appel à manifestation d'intérêt y afférent a été lancé par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et le Fonds d’équipement des Nations unies (UNCDF). À ne pas oublier également que Madagascar a signé un contrat de vente de carbone qui entre dans le cadre du mécanisme de Réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts dans les pays en développement.

Aires marines protégées
Un atout pour l’économie verte

Les aires marines protégées génèrent 182 millions USD par an.

Une aire marine protégée est un espace délimité en mer afin d’assurer à long terme la conservation de la nature ainsi que les services écosystémiques et les valeurs culturelles qui lui sont associés. Ces aires protégées sont dévolues à protéger des espèces, à promouvoir l’exploitation durable des ressources et à maintenir le patrimoine culturel.
Selon une étude de la Fondation pour les aires protégées et la biodiversité de Madagascar (FAPBM), les aires marines protégées (AMP) génèrent 182 millions USD par an grâce à la pêche dans les aires protégées marines et 10 millions USD par an grâce à la pêche dans les mangroves protégées. En conséquence, financer les aires marines protégées équivaut à préserver les bénéfices socio-économiques apportés par les mers et les océans.
“Les aires marines protégées, si elles sont convenablement financées, peuvent générer d’importants bénéfices mesurables. Par exemple, l’AMP de Nosy Tanikely, qui attire près de cinquante mille visiteurs par an, génère un rendement de 7 088 USD par ha par an soit 52 à 60 millions USD par an, faisant d’elle l’aire protégée la plus rémunératrice du Système des aires protégées de Madagascar (SAPM), soutient la FAPBM.
Dernièrement, la FAPBM a lancé un appel à manifestation d’intérêt pour assurer la conduite d’une étude sur les valeurs économiques des aires marines protégées de Madagascar. “L’objectif principal de l’étude est de disposer d’un document de base sur les valeurs économiques des aires marines protégées de Madagascar en vue de démontrer l’importance de leur gestion et de leur préservation”, a-t-on expliqué.

VERBATIM

Baomiavotse Vahinala Raharinirina, conseillère spéciale du président de la République

“En matière de crédit carbone, Madagascar a signé un contrat portant sur 50 millions de dollars (2020 - 2025), qui équivaut à 10 millions de tonnes de carbone séquestrées sur cinq ans. Le décaissement récent de 8,8 millions de dollars correspond à notre performance de l’année 2020. Je tiens à le préciser, c’est vraiment l’idée du “trade not aid”. Ce n’est ni de l’aide ni de l’emprunt, c’est du commerce et du business”.

Bruno Rajaspera, président du conseil d’administration de la FAPBM

“Les impacts immédiats de nos financements font que les aires protégées, et donc la biodiversité et notamment les forêts qu’elles abritent, sont conservées. Mais nos financements vont au-delà des régions et des communautés concernées en contribuant à des secteurs économiques comme l’écotourisme, la pêche ou l’hydroélectricité”.

L'ÉCONOMIE VERTE EN CHIFFRES


L'Express de Madagascar

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