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| Selon la Banque mondiale, Madagascar doit avoir un système de gestion de l’identité efficace et sûr. |
Les observateurs avertis sont unanimes sur le fait que la mise en œuvre de la politique d’identification numérique va aider grandement le pays à atteindre ses objectifs économiques. Car Madagascar mise beaucoup sur la transformation digitale pour rattraper son retard en matière de développement.
Il y a cinq ans, le gouvernement a adopté la loi relative à l’état civil qui consacre la mise en place d’un identifiant unique à la naissance. Il a, alors, initié le Projet de gouvernance digitale et de gestion de l’identité malagasy (Prodigy), dont l’idée maitresse est de bâtir les fondamentaux d’une gouvernance digitale responsable qui s’articulera autour de la modernisation des systèmes d’identité et d’identification, et la transformation digitale du secteur public.
L’adoption de la nouvelle loi relative à l’état civil, par la mise en place d’un identifiant unique pour chaque citoyen, suppose une redéfinition des systèmes de gestion de l’état civil et de l’identification civile. Elle permet, en outre, une réorganisation de la fourniture de services de façon inclusive, tirant le meilleur usage des possibilités offertes par le numérique. Et ces dernières années, différentes structures ont été mises en place et plusieurs actions menées pour opérer cette réforme d’envergure.
Cette semaine, le ministère du Développement numérique, de la transformation digitale, des postes et des télécommunications (MNDPT) a expliqué à la presse que le troisième pilier de son plan d’actions, qui concerne la gouvernance, vise à garantir une administration efficace et transparente. Dans ce cadre, l’attribution d’un identifiant unique à chaque citoyen permettra, notamment, l’attribution des Cartes nationales d’identité (CNI) biométriques pour les personnes majeures à partir de 18 ans. L’enrôlement de toute la population se fera à partir de 15 ans sur les deux prochaines années.
Pour ce département ministériel, les différents programmes de mise en place du registre de la population digitalisé de l’État vont optimiser les aides aux plus vulnérables. « Mais surtout, ils vont nous permettre de planifier les investissements nécessaires en termes d'infrastructures (écoles, lycées, universités, centres de soins, hôpitaux, commissariats de police, routes, zones industrielles…).»
De son côté, l’Unité de gouvernance digitale (UGD) soutient que Madagascar s’est engagé à asseoir une administration de proximité, à l’écoute de la population et de ses attentes socioéconomiques. De ce fait, une stratégie est mise en œuvre pour améliorer l’accès aux services publics, à travers la réforme du système de gestion de l’identité, ainsi que la simplification et la digitalisation des services publics clés pour la population et les entreprises.
Aussi, la transformation des services publics figure-t-elle aussi parmi les principales priorités. « Les technologies numériques, avec leurs méthodologies, leurs modèles économiques ainsi que leurs procédures offrent une opportunité unique de fournir des services publics plus rapides, efficaces et accessibles à Madagascar », précise l’UGD. Et c’est dans cette perspective que le programme Loharano a été lancé, afin de collecter les données d’identification de la population, en partant de la saisie de tous les registres (papiers) au niveau des Fokontany.
Au mois de mai dernier, Madagascar a participé à la rencontre « ID4Africa », à Nairobi, au Kenya, pour mieux cerner les conditions pour avoir une politique de digitalisation de l'identité efficiente : l'accès aux infrastructures (Internet, équipement), la stratégie de communication, la coordination des différents départements de l'État, partenariat public-privé, interopérabilité des systèmes et des données, etc.
L'utilisation de l'intelligence artificielle au service de l’identification numérique, a aussi été à l’ordre du jour. ID4Africa, en tant que plateforme de partage et de rencontre pour la promotion de l'identité numérique en Afrique, a mis en place des réflexions pour prendre en compte cette technologie nouvelle pour l’implémentation des processus au niveau national et régional. « L’inclusion par l'identité numérique doit être au centre des actions pour réduire l'exclusion de certains groupes de la population et donner à l’économie de nouveau outils pour se développer », souligne-t-on durant cette rencontre.
Au-delà des sessions de travail, la délégation malgache a pu mener des échanges bilatéraux. D'une part, avec le secteur public pour comprendre comment les autres pays ont mis en place leur processus d'identification numérique. D'autre part, avec le secteur privé pour amorcer le dialogue et identifier les appuis qui peuvent être proposés.
La Banque Mondiale en appui
Ayant approuvé un crédit de 140 millions de dollars du Mécanisme de financement complémentaire de l'Association internationale de développement et une subvention de 3 millions de dollars du Mécanisme de financement mondial, pour renforcer le système de gestion de l'identité du pays, la Banque Mondiale est convaincue que Madagascar doit rationaliser et numériser les services clés et améliorer la capacité du gouvernement à fournir des services sociaux et économiques.
Toujours selon l’institution de Bretton Woods, le projet se concentre sur la création d'un système de gestion de l'identité efficace et sûr, notamment en modernisant le registre d'état civil interopérable et les bases de données nationales d'identité. Dans le cadre de cet effort, le projet appuie la création du Centre national d'enregistrement et d'identification des faits d'état civil, des procédures simplifiées d'enregistrement et de gestion des identités, un numéro d'identification unique dès la naissance et une meilleure sécurité des données. Ce qui permettra d’authentifier les données dans l'ensemble des services gouvernementaux, et offrira une utilisation plus facile et plus rapide des données pour la fourniture de services. Cela facilitera également le recensement régulier des faits d'état civil à des fins démographiques et de statistiques.
« Cette opération fait partie d'un ensemble plus large d'ajustements des programmes nationaux (…). Investir dans la transformation numérique est à la fois un investissement bon et pertinent, et nous saluons la détermination du gouvernement à agir rapidement dans ce domaine », indique la Banque Mondiale, avant d’ajouter que « la rationalisation et la numérisation des services et l'amélioration de l'identification des citoyens peuvent contribuer à fournir des services plus rapides et plus efficaces à la population et au secteur privé, et jouer un rôle essentiel pour s'adapter au changement climatique. »
Il s’agit également d’améliorer la capacité du gouvernement à rationaliser et à numériser les services clés destinés aux citoyens et aux entreprises, notamment ceux qui s'appuient sur le registre d'état civil et les bases de données nationales d'identité. En renforçant l'infrastructure et sa capacité à fournir des services publics par des moyens numériques ou multimodaux, le gouvernement augmentera la couverture et la qualité de ses prestations.
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| Le MNDPT annonce l’arrivée prochaine des Cartes Nationales d’Identité (CNI) biométriques. |
Accélérateur de performances
« La numérisation des services peut contribuer à améliorer les performances, la redevabilité et la transparence du secteur public, tout en réduisant les fuites grâce à l'automatisation », souligne, pour sa part, Heriniaina Andrianasy, un des chargés du projet. Et il ne faut pas oublier l’accroissement de la résilience au changement climatique, en réduisant la vulnérabilité des systèmes numériques et des services publics aux catastrophes naturelles. Et ce, grâce à des protocoles solides de continuité des activités, en cas d'interruption de service qui peut résulter d'événements climatiques. En cas de catastrophes naturelles ou d'événements extrêmes liés au climat, les infrastructures, y compris le stockage externe de données numériques, pourront être exploitées pour protéger les données, les dossiers et les canaux de prestation de services électroniques essentiels.
De plus, le pays dispose, d’une part, d'une réserve non négligeable de talents en matière de développement de logiciels, avec environ cinq cents à six cents ingénieurs en logiciels qualifiés qui obtiennent leur diplôme chaque année, et, d’autre part, d'un secteur privé dynamique dans le domaine des technologies de l'information et de la communication, qui peut être mis à profit pour fournir des services numériques adaptés aux besoins de la population. Toutefois, la Banque Mondiale souligne le fait que le coût de la connectivité internet mobile, qui représente 40 % du PIB par habitant pour 1 gigaoctet (Go), reste prohibitif : 10 % de la population utilise l'internet et environ deux tiers de la population possède un téléphone mobile.
C’est sur ce constat que le programme de transformation digitale du pays adopte une approche de financement basée sur les résultats, y compris l'utilisation de conditions basées sur la performance, et sera donc évalué par la part de la population qui obtient un nouveau justificatif d'identité comprenant son numéro d'identification unique et le nombre d'utilisateurs qui bénéficient de services conformes aux nouvelles normes. Enfin, pour Sahaza Marline, entrepreneur numérique et fondateur de STEM For Good, la biométrie peut jouer un rôle significatif dans la sécurisation des transactions et des processus administratifs, contribuant ainsi à l'efficacité des services publics. C’est un pas vers l'optimisation de la gestion des ressources et une meilleure gouvernance au profit, entre autres, de l’économie.
Protection du droit à l’identité
La « RECI » joue un rôle central
Selon le Programme de réformes pour l’efficacité de l’administration (Prea), Madagascar a mis en orbite la Réforme de la gestion de l'état civil et de l'identité (Reci), dont la raison d’être est la protection du droit à l’identité et à la nationalité. D’une part, l’identité légale est un élément clé des droits humains, en garantissant la personnalité juridique d’un individu devant la loi ; d’autre part, l’état civil constitue une composante essentielle dans la réhabilitation de l’Administration publique, en fournissant des statistiques vitales.
Ce qui permettra, entre autres, d’établir le plan de développement économique à partir de données fiables. On sait, en outre, que la Reci se base sur la loi du 8 février 2019, relative à l'état civil à Madagascar, élément clé de la réforme, pour un meilleur accès à l’identité, l’enregistrement exhaustif des faits d’état civil, le traitement numérique et la centralisation des données aux moyens d’un système informatisé.
Ainsi, le laboratoire Reci de Toamasina, ville pilote de la réforme, a été mis en place en mai 2023. Une mission d’évaluation de ce dernier, a été conduite, du 12 au 16 janvier, par le Prea, avec l’équipe du Centre national de l’état civil et de l’identité, de l’Unité de gouvernance digitale, ainsi que du Prodigy. Un atelier a été organisé à cette occasion et a vu la participation de tous les acteurs impliqués dans la chaîne de l’état civil, aussi bien au niveau central que territorial et local, notamment les ministères de la Santé publique, de l’Intérieur, du Développement numérique, de la transformation digitale, des postes et des télécommunications.
Les critères d’évaluation retenus sont la pertinence, l’efficacité, l’efficience et la durabilité. Les réalisations positives, telles que la réduction des délais de traitement et de délivrance des copies d’acte de naissance, l’allègement des procédures pour le citoyen, ont été appréciées si l’on se base sur l’observation, les enquêtes et la récolte des anomalies et imperfections constatées sur le terrain. Toutefois, des points d’amélioration existent. De ce fait, des recommandations ont été émises en vue de la mise en place rapide à l’échelle nationale, pour bénéficier à toute la population.
Il a été, enfin, rappelé que, depuis son lancement en 2019, le Prodigy s'engage avec ambition à garantir un accès inclusif à l'identité légale pour chaque citoyen malgache et à améliorer la qualité des services publics clés. Financé par la Banque Mondiale à travers l'Association internationale de développement, il vise à mettre en place des solutions innovantes pour répondre aux besoins essentiels des citoyens.
VERBATIM
Tahina Razafindramalo, ministre du Développement numérique
« L’attribution d’un identifiant unique à chaque citoyen permettra la confection des Cartes nationales d’identité (CNI) biométriques pour les majeurs à partir de 18 ans. L’enrôlement de toute la population se fera à partir de 15 ans sur les deux prochaines années. Nous allons ainsi suivre la voie d’autres pays, tels que la Tunisie ou la Grèce, qui sont récemment passés à la carte d’identité biométrique. »
Nantenaina Rakotonirina, maire de la commune urbaine de Toamasina
« Plus besoin d’aller dans les arrondissements pour déclarer la naissance d’un enfant. Plus la peine d’attendre plusieurs jours pour la délivrance d’un acte de naissance. Le système d’état civil et d’identité sera digitalisé. Cette réforme est, actuellement, en phase d’essai, dans la commune urbaine de Toamasina. Cette réforme fera gagner du temps à la population et sera bénéfique pour les acteurs économiques. »
L’IDENTIFICATION NUMéRIQUE EN CHIFFRES
L'Express de Madagascar