FFKM ET LES AFFAIRES NATIONALES - Les enjeux de la présidence tournante

Le pasteur Denis Rakotozafy (a.g), assurera la présidence tournante du FFKM durant l'année 2024

Le président de l’église FLM sera le président du FFKM durant l’année 2024. Il sera en frontline des relations entre le Conseil œucuménique et l’État après les péripéties de l’élection présidentielle.

Un rôle politique. C’est l’une des facettes de la fonction de chef d’une des quatre confessions au sein du Conseil œucuménique des églises chrétiennes de Madagascar (FFKM). Un rôle qui  sera encore plus marqué lorsque viendra le tour de l’un d’entre eux d’assurer la présidence tournante du Conseil. Comme l’indique la déclaration issue de la 45e réunion du Comité central du FFKM, la semaine dernière, à Fianarantsoa, ce sera le pasteur Denis Rakotozafy, président de l’Église luthérienne malgache (FLM), qui assurera la présidence tournante du FFKM durant l’année 2024. Une présidence tournante qui dure un an. Il succède ainsi au pasteur Ammi Irako Andriamahazosoa, président de l’Église réformée de Madagascar (FJKM). La passation entre les deux religieux est prévue le 21 janvier, lors d’un culte à la cathédrale FJKM, Analakely. 

À l’instar de son prédécesseur, le pasteur Denis Rakotozafy sera la voix et le visage du FFKM durant un an. Outre sa fonction œucuménique, il sera aussi en frontline des activités politiques du Conseil. En matière politique, les quatre chefs des églises au sein du Conseil œucuménique jouent en équipe. C’est à celui qui assure la présidence tournante de parler au nom de tous. Il sera ainsi le principal interlocuteur des acteurs politiques, notamment, des tenants du pouvoir. 

Bien que l’État soit laïc, les Églises au sein du Conseil œucuménique, individuellement, mais aussi collectivement disposent d’un poids politique important. Sans quoi, le FFKM ne serait pas systématiquement plébiscité pour être le médiateur de la moindre querelle politique. À l’instar de l’épisode de l’élection présidentielle, le FFKM, selon les circonstances, pousse sa participation aux joutes politiques à la limite de “l’ingérence religieuse” dans les affaires étatiques. 

Après les péripéties qui ont jalonné le processus électoral, justement, le pasteur Rakotozafy aura du pain sur la planche. Il devra s’employer à ce que les quatre confessions parlent et avancent à nouveau de façon univoque. Mais il devra aussi travailler à combler le fossé qui s’est creusé entre le FFKM et les tenants du pouvoir, notamment, Andry Rajoelina, président de la République. Au sujet de la présidentielle, en effet, le FFKM a avancé en ordre dispersé. 

Impartialité

Mené par le pasteur Irako Andriamahazosoa, le Conseil œucuménique a, officiellement, pris partie pour le report du vote, au profit de la quête d’un consensus politique. Par la voix de la Conférence des évêques de Madagascar (CEM), cependant, l’église catholique a prêché en faveur de l’élection. La teneur de sa déclaration, à l’issue de la 45e réunion de son Comité central, indique que le FFKM veut retrouver une cohésion et un langage commun sur les affaires nationales. 

Affirmant qu’il compte poursuivre sa mission de conciliation et de médiation comme voulue par l’évangile, le FFKM “veillera”, à ce que les prêches, à cet effet, soient univoques à tous les niveaux de ses démembrements. Le plus dur maintenant, sera de décrisper les relations entre le Conseil œucuménique et l’État. Certes, en tant qu’observateur privilégié et, en principe, bien informé, des affaires nationales, le rôle de conseil et même de “garde-fou”, des actions étatiques, est accepté de tous. 

Durant son année de mandat, le pasteur Rakotozafy aura à travailler pour que les actes du Conseil œucuménique ne soient cloisonnés dans la rubrique des “sermons ou attaques”, motivés par une antipathie envers les tenants du pouvoir, particulièrement, le président de la République. La fronde contre l’élection présidentielle menée conjointement par le FFKM et Christine Razanamahasoa, présidente de l’Assemblée nationale, sous l’étiquette d’une plateforme de médiation, a brisé le statut d’acteur impartial du Conseil œucuménique. 

La coalition de médiateurs a été particulièrement véhémente à l’endroit des tenants du pouvoir. La contestation de la candidature de Andry Rajoelina à la présidentielle a été un des non-dits dans la démarche de cette entité. Le pasteur Irako Andriamahazosoa a tant bien que mal essayé de préserver l’impartialité du FFKM. Ceci, bien que plusieurs cadres et dignitaires de l’église FJKM soient ouvertement contre le président de la République nouvellement réélu. Le voir co-dirigé la plateforme de médiation, certes, au nom du FFKM, a réduit à néant ses efforts.

Le pasteur Rakotozafy va démarrer la présidence tournante du FFKM avec le même handicap que son prédécesseur. Au sein de l’église FLM, des cadres et dignitaires, dont la présidente de l’Assemblée nationale, ne cachent pas leur antipathie envers les tenants du pouvoir. Reste à voir comment le nouveau président du Conseil œucuménique des églises chrétiennes de Madagascar agira ou se limitera-t-il à ménager la chèvre et le chou ? Sa réponse à l’invitation pour l’investiture de Andry Rajoelina, sera un indicateur majeur de la posture du FFKM sur les affaires étatiques. 

Garry Fabrice Ranaivoson

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