Le passé décomposé

Autres temps autres mœurs. Alors que jadis un maître d’école qui punit physiquement des élèves était tout à fait normal et aucun parent ne cherchait à ester l’affaire au tribunal, naguère une telle scène est vite relayée sur les réseaux sociaux et le coupable est lynché par les commentaires. C’est le cas du directeur d’une école privée à Ivandry pris en flagrant délit par une caméra cachée en train de gifler un élève et de proférer des mots durs. La toile s’enflamme bien évidemment. La majorité des internautes sont indignés par la scène et en appellent à une sévère sanction contre le directeur indélicat. Depuis 2017, il est interdit de taper et de lever la main sur les élèves. Une note prise suite à une scène similaire à Ambohipo où une maîtresse a maltraité un élève. L’enseignante a été mise en détention préventive avant d’être traduite au tribunal. Elle a écopé de huit mois de prison avec sursis.

Le débat est ainsi ouvert. Une partie de l’opinion défend les bienfaits de la méthode de la vieille école où les punitions physiques ou administratives étaient autorisées. C’est ainsi qu’on était envoyé au coin à genoux sur du paddy ou des cailloux si on ne savait pas réciter toutes les tables de multiplication par cœur. Aujourd’hui, la faculté mentale des élèves est anéantie par l’utilisation de la calculette et du téléphone portable. De même, cette méthode a permis de maîtriser les modes et les temps des verbes de tous les groupes, du passé décomposé au futur pas simple en passant par l’imparfait du présent. Une mauvaise maîtrise de l’accord du participe passé avec l’auxiliaire avoir ou être équivaut à des tours de marche canard dans la salle de classe.

Beaucoup d’élèves, éduqués avec ce système, devenus aujourd’hui des hommes de devoir et des citoyens modèles, remercient leurs «  bourreaux » qui n’ont pas lésiné sur les moyens de pression pour la réussite de leurs apprenants.

Le relâchement de la discipline enlève une grande partie de l’autorité des enseignants et impacte sur le résultat scolaire des élèves. Ici comme ailleurs, les cas d’enseignants agressés par des élèves deviennent de plus en plus fréquents. Sous d’autres cieux, certains élèves en arrivent à abattre leurs enseignants.

L’insolence et le mépris envers les enseignants gagnent du terrain surtout lorsque les maîtres n’ont pas le niveau nécessaire pour exercer leur métier comme c’est le cas de certains maîtres Fram.

Il est clair que les excès de violence envers les élèves sont répréhensibles à l’image de cette scène d’Ivandry. Il ne s’agit pas de s’acharner sur un élève ou de le torturer devant toute la classe, mais de l’apprendre à accepter une certaine discipline. Trouver l’équilibre entre la sévérité et la méchanceté relève parfois d’un exercice d’équilibriste. Mais on préfère un enseignant funambule à un enseignant gifleur.

Sylvain Ranjalahy

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