CONJONCTURE - L’atmosphère politique reste tendue

La tension est perceptible ces derniers jours. Entre perquisitions, arrestations, remplacements musclés et convocations pour enquête, les querelles politiques bousculent la quiétude des fêtes de fin d’année.

Des gendarmes sur le chemin menant vers le domicile du général Ravalomanana, à Ambatovinaky, mercredi.

Point de trêve cette année. C’est ce que laissent entrevoir les enchaînements d’événements politiques de ces derniers jours. Même la veille de Noël a été chahutée par un épisode politique houleux.

Le 24 décembre en fin d’après-midi, juste avant le réveillon de Noël, les aficionados des buzz sur les réseaux sociaux ont été tenus en haleine par une scène qui s’est jouée aux alentours d’Ambohijatovo Ambony et d’Ambatovinaky. Plusieurs éléments des forces de l’ordre, armes à la main, s’y sont rassemblés. Selon les informations relayées par plusieurs médias, il s’agirait d’une manœuvre dans le but de procéder à l’arrestation du général retraité Richard Ravalomanana, ancien président du Sénat, à son domicile à Ambatovinaky.

L’officier général retraité aurait fait l’objet d’une convocation pour enquête auprès de la gendarmerie nationale, son corps d’origine, en date du 24 décembre. Il serait sous le coup d’une accusation d’« atteinte à la sûreté de l’État ». Une convocation à laquelle l’ancien chef d’institution aurait refusé de répondre, ce qui aurait entraîné le déploiement d’éléments autour de son domicile. Jusqu’à l’heure, les sources se murent dans le silence quant à la suite de cette affaire.

De prime abord, toutefois, il pourrait s’agir de la suite d’une procédure préparée. En début de journée, le 24 décembre, la Haute Cour constitutionnelle (HCC) a constaté la démission d’office de Richard Ravalomanana de son poste de sénateur. De même pour Lalatiana Rakotondrazafy, désormais ex-sénatrice. Un constat faisant suite à la saisine de Jean André Djemanjary, président de la Chambre haute par intérim, au motif « qu’ils ont manqué à la totalité des séances de l’une des deux sessions ordinaires, sans excuse valable admise par le Sénat ».

L’opportunité de cette saisine pour constatation de démission d’office intrigue, étant donné que le mandat des membres de l’institution d’Anosy arrive à terme en janvier. Soudain est survenu, cependant, le scénario d’Ambatovinaky. La HCC, justement, est l’un des deux protagonistes de l’autre événement politique qui a agité les derniers jours précédant la fête de la Nativité. L’autre acteur étant la présidence de la Refondation de la République.

Questionnements

Lundi, un décret pris par le président de la Refondation de la République, publié dans la matinée, acte la démission de trois membres de la Cour d’Ambohidahy désignés sur le quota présidentiel. Leurs trois remplaçants ont été nommés via ce même acte réglementaire. Cependant, dans la soirée, les trois hauts conseillers remplacés ont publié une lettre contestant l’existence d’une démission de leur part. Une résistance qui leur a valu la visite d’une escouade de militaires à leur domicile, mardi matin.

C’est sous escorte militaire que les trois hauts conseillers ayant démenti l’existence d’une démission ont été conduits à la HCC, puis au palais d’État d’Iavoloha, « pour des pourparlers ». Finalement, c’est dans la soirée de mardi que leurs remplaçants ont prêté serment. C’est la première fois qu’une cérémonie solennelle de prestation de serment s’est tenue en soirée à la Cour d’Ambohidahy.

Outre cet épisode concernant la Cour d’Ambohidahy, la semaine a démarré avec la confirmation d’une autre affaire judiciaire. Il s’agit de l’arrestation de Moussa Soalihy, ancien chargé de mission de la présidence de la République et actuel conseiller technique du député Philobert Milavonjy, vice-président de l’Assemblée nationale et chef de l’opposition parlementaire. Particulièrement critique envers le pouvoir transitoire sur Facebook, sa tourmente judiciaire fait suite à l’une de ses publications.

Cependant, Moussa Soalihy a été interrogé par la brigade criminelle de la police nationale et non par le service de lutte contre la cybercriminalité. En parallèle à ces événements, les séries de perquisitions se poursuivent. Le Conseil des ministres de lundi a touché mot sur le sujet en rappelant la nécessité d’observer strictement les procédures. Un rappel à l’ordre qui tend à confirmer les dérives dénoncées depuis le début des descentes militaires chez des particuliers, sans égard pour les règles de droit.

Selon une source avisée, une nouvelle perquisition s’est déroulée hier, jour de Noël, dans des hangars appartenant au groupe Sodiat « Il s’agit d’éléments mixtes. Ils ont mené la perquisition sans attendre l’avocat qui devait représenter le propriétaire. Une fois sur place, lui et l’huissier ont, par ailleurs, été intimidés, et contraints de rester dehors », confie-t-elle. La présidence de la Refondation de la République et le commandement des Forces de défense et de sécurité justifient les perquisitions par la recherche d’« armes lourdes », qui auraient été introduites de manière illicite dans le pays.

À l’heure, ce sont les écarts vis-à-vis des procédures durant ces opérations qui font le plus d’écho. Toutefois, ces différents événements tendent à laisser entrevoir un durcissement de ton de la part du régime transitoire. Dans cette conjoncture tendue, « la remise d’équipements à la garde présidentielle» par une délégation de militaires russes, comme l’a confirmé Siteny Randrianasoloniaiko, président de l’Assemblée nationale, suscite des questionnements.

Garry Fabrice Ranaivoson

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