Le gouvernement entend relancer une filière vanille fragilisée par la chute des prix à l’international et l’érosion de ses recettes d’exportation. La « remise sur les rails » du Conseil national de la vanille (CNV) et une utilisation des fonds collectés ont été annoncées. Dans l’immédiat, les activités du CNV sont suspendues.
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| Des ouvriers en train de préparer de la vanille. |
Lors de son intervention télévisée dimanche, le président de la Refondation, le colonel Michaël Randrianirina, a confirmé l’arrêt temporaire du prélèvement de quatre dollars par kilo sur les exportateurs, une mesure appliquée depuis 2023. Il a rappelé que les fonds doivent être « redistribués de manière plus équilibrée » pour soutenir des actions de développement au bénéfice des producteurs.
La contraction de la demande mondiale, combinée à des volumes de production proche des 3 000 tonnes par an sur les trois à quatre dernières années – alors que le marché international n’en absorbe qu’entre 1 500 et 2 000 – a entraîné une accumulation de stocks à l’étranger et, mécaniquement, une baisse des prix.
Selon plusieurs sources, plus de 160 milliards d’ariary seraient aujourd’hui disponibles dans les comptes du CNV. Des ressources importantes, « restées intactes », souligne le chef de l’État, et qui devront financer des projets structurants pour la filière.
Créé dans le sillage de la crise du Covid-19, le CNV a pour mission de servir de plateforme de concertation entre acteurs publics et privés. Il intervient dans la fixation du calendrier de campagne, des prix de référence et dans la régulation générale de la filière.
C’est sous l’impulsion d’Edgard Razafindravahy, alors ministre de l’Industrialisation et du Commerce, que la plateforme a été mise en place. Il avait défendu un partenariat public-privé structuré, fondé sur un prix plancher de 250 dollars le kilo et sur une contribution obligatoire de quatre dollars par kilo exporté. Ces mesures avaient permis, dès la première année, d’alimenter de manière significative la trésorerie du CNV : plus de 104 milliards d’ariary collectés entre 2023 et 2024. Ces 104 milliards d’ariary avaient été réunis et conservés en intégralité durant cette période, et laissés à la disposition de l’État.
L’ancien ministre revendiquait une gestion rigoureuse et transparente : les fonds étaient déposés dans des banques primaires et leur mouvement nécessitait l’accord conjoint du président du conseil, d’un membre du gouvernement, du trésorier issu du secteur privé et du directeur général du Trésor. Un cabinet d’expertise international supervisait également la gestion.
Stratégie commune
Ces moyens devaient financer des opérations de contrôle, des actions de terrain et potentiellement des infrastructures structurantes pour la filière. Plusieurs observateurs estiment qu’ils auraient permis, par exemple, la création d’un laboratoire public d’analyse, étape décisive pour renforcer la traçabilité et sécuriser les chaînes d’approvisionnement, alors que Madagascar fournit près de 80 % du marché mondial.
Edgard Razafindravahy plaidait par ailleurs pour une montée en gamme de la vanille malgache. Il avait défendu l’idée d’une cotation en bourse – à Londres, Tokyo ou Paris – lors d’échanges en février 2024 avec l’ambassadeur du Royaume-Uni, David William Ashley. Une démarche destinée, selon lui, à stabiliser les prix et à renforcer la transparence du marché.
La même année, en marge de la réunion ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce, à Abou Dhabi, il avait soutenu la création d’une structure internationale regroupant les pays producteurs. L’objectif : défendre un prix de référence, promouvoir la vanille naturelle et renforcer toute la chaîne de valeur. Des représentants de l’Ouganda, de Papouasie–Nouvelle-Guinée et des Comores avaient alors rejoint cette initiative.
La relance de la filière dépendra désormais d’une stratégie commune et de l’usage qui sera fait des fonds du CNV. La gouvernance publique-privée instaurée ces dernières années a posé des bases, mais l’avenir de la structure reste suspendu aux décisions qui seront prises dans les prochaines semaines.
L'Express de Madagascar
