Dans une interview qu’il a donnée à la branche francophone de la télévision russe RT, le colonel Michaël Randrianirina fait part de la ligne diplomatique du pouvoir transitoire. Il prône une coopération tous azimuts, en écartant toute idée de préférence.
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| Dans cette interview, le colonel Randrianirina indique aussi que le départ de l’ancien président Rajoelina “a facilité” la mise en place du nouveau pouvoir. |
On est ouvert à tout le monde». Ces mots ont été dits à plusieurs reprises par le colonel Michaël Randrianirina, durant une interview accordée à la branche francophone de la télévision russe RT. Des mots sur lesquels l’officier supérieur a mis l’accent pour souligner la politique diplomatique du nouveau pouvoir.
À s’en tenir aux réponses du locataire d’Iavoloha donc, sous sa présidence, la Grande Île applique une diplomatie tous azimuts. Indiquant que, bien qu’il soit «panafricaniste», le colonel Randrianirina souligne : «On a déjà prôné, on a déjà dit haut et fort qu’on est ouvert à tout le monde», en réponse à la journaliste de RT dans cette interview qui date du 20 novembre et partagée par l’ambassade de Russie sur sa page Facebook, hier.«On peut travailler avec les Américains, les Français, les Russes, les Africains surtout, puisque moi, je suis Africain», ajoute le Chef de l’État, pour écarter toute idée d’exclusivité dans le partenariat diplomatique de Madagascar. À l’entendre, la seule condition est que ce soit équilibré et mutuellement bénéfique. «On est convaincu que le partenariat gagnant-gagnant peut nous sortir de cette situation précaire», affirme le président de la Refondation de la République.
C’est la 2e fois que le colonel Randrianirina accorde une interview exclusive à un média russe. La première a été faite par visioconférence après la cérémonie de sa prestation de serment, le 17 octobre. La Russie, par le biais de son ambassade, a également été le premier pays étranger à avoir tendu la main au nouveau pouvoir, en allant à la rencontre des cinq colonels de la Présidence de la Refondation, au camp du Corps d’armée des personnels et des services administratifs et techniques (Capsat), dans la soirée du 14 octobre. Soit juste après qu’ils ont déclaré qu’ils pre naient le pouvoir.
Depuis, la Russie garde le cap de son offensive diplomatique pour séduire les nouveaux tenants du pouvoir. Outre la Présidence de la Refondation, l’opération de charme s’organise également autour du président de l’Assemblée nationale. Face à l’enchaînement des événements, certains observateurs lisent une éventuelle relation privilégiée entre les autorités russes et le pouvoir transitoire. Une situation que les chancelleries occidentales suivraient d’un regard attentif étant donné le contexte géopolitique mondial et aussi africain.
Rassurer
Pour les Occidentaux, la France en particulier, la hantise serait que la Grande Île prenne un virage radical dans ses relations internationales à l’instar des membres de l’Alliance des États du Sahel (AES). Les trois pays au sein de cette entité régionale ont pris leur distance avec l’Occident, notamment avec la France, et se sont rapprochés de la Russie après la prise de pouvoir des militaires. La journaliste de RT a justement posé une question relativement directe dans ce sens, au colonel Randrianirina.
«(...) Dans cette logique de souveraineté, envisagez-vous de renforcer votre coopération avec la Russie et si oui, quels secteurs souhaiteriez-vous privilégier ?», est la question de la journaliste de RT. Visiblement, le locataire d’Iavoloha en a profité pour rassurer les partenaires de Madagascar. «Comme j’ai dit tout à l’heure, on est ouvert à tout le monde.»
«Pour l’instant, on est dans la phase où on étudie où est-ce qu’on peut avancer plus rapidement. Où est-ce que le peuple malgache peut bénéficier le plus. Où est-ce que le pays peut avancer dans la prospérité le plus rapidement. On n’a pas encore décidé avec qui on pourra travailler rapidement, mais je sais seulement qu’on est ouvert à tout le monde et on peut travailler avec tout le monde», soutient ainsi le Chef de l’État.
En réponse à une précédente question, le locataire d’Iavoloha déclare : «On n’est pas ici pour choisir de ne pas travailler avec un autre pays. Mais on est là pour s’ouvrir à tout le monde, puisque Madagascar ne peut pas s’en sortir sans la coopération internationale, sans les investisseurs étrangers.» La journaliste du média russe a également soulevé l’état des relations entre les nouveaux tenants du pouvoir et la France. Elle a souligné que la France avait fait part de son inquiétude sur le déroulement de la crise politique à Madagascar.
Vendredi, à Maurice, Emmanuel Macron, président français, a indiqué que la France «accompagnera» la Transition malgache. Pourtant, en marge d’un déplacement en Égypte, le 13 octobre, le président Macron avait fait part de ses préoccupations face à la crise à Madagascar, en espérant que le mouvement de la Gen Z «ne soit pas récupéré par des factions militaires ou des ingérences étrangères». Étant donné les circonstances internationales, des analystes pensent que le locataire de l’Élysée avait fait référence à d’éventuelles influences russes.
«Comment s’articule votre discours panafricain d’émancipation par rapport à cette position française ?», a alors demandé la journaliste de RT. Soulignant la diplomatie tous azimuts qu’il prône, le colonel Randrianirina répond : «Je pense que la France ne doit pas avoir de souci là-dessus puisqu’on est ouvert à tout le monde. On discute avec tout le monde.»
Garry Fabrice Ranaivoson
