L’humilité… la leçon a-t-elle été retenue ?

On ne connaîtra pas de société qui inculque autant de valeurs sur l’humilité que la société malgache. Dans notre cocon familial, notre éducation religieuse et celle acquise dans notre parcours scolaire, il nous a été appris à baisser la tête plutôt que de lever la voix, à laisser parler les actes plutôt que les mots, à ne jamais chercher à éclipser les autres, même lorsque nos réussites le permettraient. Cette leçon nous a été donnée, mais le cours de la vie et les sentiers du cheminement professionnel ont fait que, pour beaucoup, ces valeurs se sont évanouies dans l’ombre, reléguées au second plan.

Nous parlons de partage, de collectif, mais quand notre rigueur et nos efforts nous ont amenés à assumer le rôle de leader tant souhaité, l’humilité se trouve souvent balayée par l’éclat trompeur de soi.

Et c’est là que l’on se perd. Nous parlons de « nous », de « notre équipe », et pourtant, derrière les mots, parfois se cache l’illusion du « moi ». On célèbre nos réussites, mais l’humilité, celle qui nous a été enseignée dès l’enfance, semble s’effacer. Parler au nom des autres devient un prétexte pour exister davantage.

Il y a quelques semaines, et pour la première fois dans un discours officiel politique, un Président de la République s’est repenti, « nifona » auprès du peuple malagasy… mais il a immédiatement enchaîné par la justification de ses manquements en invoquant l’incompétence de son gouvernement. L’humilité s’est heurtée à l’ombre de l’ego. L’auditoire s’est perdu dans un flux incessant de « je », de « moi », de « mes actions », où chaque phrase semblait rappeler que le centre du monde était celui qui parlait. La sincérité que l’on espérait s’est effacée derrière la brume de l’orgueil.

Pourtant, la personne n’était pas dépourvue de bonté. Mais elle était aveuglée et portée par une idolâtration sans limite, des éloges excessifs, tout en étant victime de vérités cachées et de réalités embellies. Une faiblesse qui a coûté la crédibilité aux yeux de la majorité.

Comme si l’adage malgache « Hazo avo alan-drivotra » ne pouvait être un rempart contre tout excès de zèle, certains leaders oublient que leur rôle n’est pas de briller pour eux-mêmes, mais de porter l’institution qu’ils représentent. La quête de reconnaissance personnelle prend le pas sur le service, et l’ego supplante l’humilité nécessaire à toute fonction de responsabilité.

À des moments, on est tenté d’accepter que plus la position est élevée, plus la tentation de se montrer grand est forte. Pourtant, le leadership n’a, pour réussir, qu’un allié plausible : l’humilité. C’est une force silencieuse qui guide avec justesse et assure la durabilité. Chercher sans cesse à briller pour être vu ou reconnu, c’est risquer de perdre l’essence même du collectif. Car plus on veut être au centre, moins on laisse d’espace à ceux qui nous entourent.

L’humilité – la leçon a-t-elle été retenue ? Il le faudrait, s’il vous plaît. Ce sera un cri doucement proclamé – pas à forte résonance comme les revendications sociales et politiques actuelles – mais un cri du cœur. Nous nous inspirerons toujours de ceux que nous voyons, de leur comportement, de leur manière d’être. Les gestes simples, les actions sincères laissent une marque bien plus profonde que les éclats de gloire éphémères.

Celui qui force connaît un instant de reconnaissance éphémère. Mais celui qui, sous la lumière du Delta, éclaire, révèle sans écraser, guide sans imposer, marque des existences, inspire et laisse une trace durable. Sa lumière n’est pas seulement la sienne : elle se propage, comme le reflet d’une flamme qui éclaire progressivement le sentier devant lui. Chaque geste posé avec discernement, chaque parole prononcée avec humilité devient une pierre ajoutée au chemin collectif, polie avec soin ou frappée avec justesse.

Ainsi, le rayonnement du leader véritable n’éblouit pas : il trace, il guide, il construit un parcours solide et durable. Alors, souhaitons-nous être une personne qui aura forcé pour briller seule, ou celle qui aura transmis sa lumière pour éclairer et guider ceux qui nous entourent ? 

Par Evey Hammond

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