Souffle populaire

Les différentes forces politiques cherchent la recette secrète pour obtenir l’adhésion de tout un peuple, le pouvoir de susciter une vague populaire où tout le monde se reconnaît comme faisant partie des gouttes. Ce phénomène a pu être provoqué, dans notre histoire récente, par le football, quand son potentiel fédérateur a pu s’exprimer, quand sa puissance se déploie. Le football, chez nous, a cette vertu qu’il détient de manière exclusive : cette capacité à rassembler les hommes et les femmes, les enfants, les adolescents et les adultes sous le même drapeau, dont l’importance est sujette à débat durant les événements annuels qui devraient pourtant l’honorer.

Récemment, l’engouement fut à nouveau créé par nos représentants qui ont réussi à obtenir le respect de tout un continent. Leur parcours a été suivi à l’unisson, même par celles et ceux qui n’ont qu’une indifférence assumée vis-à-vis du football. La télévision, la radio ou Internet se réglaient tous à l’heure du football, autour duquel se réunissaient tous les membres de la famille, chacun pris par la même passion que rien ne pouvait réprimer. Presque tout le monde, même ceux qui ne possèdent qu’une connaissance rudimentaire du football et de ses règles, fut emporté par la vague qui s’est offerte à la vue lors de l’accueil des héros, après s’être manifestée dans les différents cris de joie.

«Le but est l’orgasme du football», écrivait Eduardo Galeano dans son livre Le Football : Ombre et lumière (1997), qui déplore aussi cependant que «comme l’orgasme, le but est de plus en plus rare dans la vie moderne.» Mais quand il se produit, c’est toute une nation qui jubile, qui fait entendre à des kilomètres à la ronde ses exclamations de plaisir. Grâce au football, on a connu les délices qui ouvrent de plus en plus rarement leurs portes. S’affirme alors, à ces moments-là, ce qu’Émile Durkheim appelle «effervescence collective», un enthousiasme commun qui transcende les individualités.

«Ce que je sais de la morale, c’est au football que je le dois», disait Albert Camus. Le football est, entre autres, une école de la solidarité dont les leçons, appliquées sur le terrain, ont aussi contaminé les supporters qui ont tous fait leurs les épopées de l’équipe malgache. Et alors que l’euphorie ne peut perdurer et laisse à nouveau la place aux soucis quotidiens, avec un nouvel éclatement de cette fragile union nationale, le football n’a pas perdu ce privilège qui lui donne la capacité de rallier ceux que différentes tendances (politiques...) ont séparés.

Fenitra Ratefiarivony

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