Le ministère des Transports et de la Météorologie réaffirme la thèse de la falsification de documents sur l’affaire des avions d’immatriculation malgache, retrouvés en Iran. Une plainte pour faux, usage de faux et atteinte à la sûreté de l’État a été déposée.
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Des responsables étatiques dont le ministre des transports ( au c.) durant la conférence de presse d’hier. |
Atteinte à la sûreté de l’État, et faux et usage de faux. Telle est la nature de la plainte déposée par le ministère des Transports et de la Météorologie dans l’affaire des avions immatriculés à Madagascar retrouvés en Iran.
L’information a été donnée par Valery Ramonjavelo, ministre des Transports et de la Météorologie, hier, durant une conférence de presse à Anosy. Selon les explications, l’atteinte à la sûreté de l’État est motivée par les risques que peut engendrer le dossier sur les relations internationales de Madagascar. Un des objectifs de la sortie médiatique d’hier est justement de rassurer les partenaires de la Grande Île sur sa bonne foi dans cette affaire.
Aussi, le ministre Ramonjavelo a-t-il été entouré de ses collègues, le ministre de la Sécurité publique et celui délégué à la Gendarmerie nationale. Le procureur près la Cour d’appel d’Antananarivo et la procureure de la République près le tribunal de première instance d’Antananarivo ont aussi été de la partie.
L’existence de cinq avions Boeing 777-200, d’immatriculation malgache, “livrés” à l’Iran, en partance du Cambodge, durant la première partie de juillet, a été révélée par un média international la semaine dernière. L’information fait grand bruit, puisque l’Iran est sous la coupe de sanctions internationales, dont la principale est un embargo imposé par les États-Unis. Le ministre Ramonjavelo atteste que l’État n’a su ce fait que lors de la parution de cet article de presse.
“L’État s’estime avoir été trompé puisque l’immatriculation a été utilisée à des fins frauduleuses”, réagit le ministre des Transports et de la Météorologie. Il explique qu’en novembre 2023, un opérateur local a approché son département pour signaler qu’un investisseur étranger était prêt à travailler avec Air Madagascar pour renforcer ses liaisons aériennes internationales.
Des techniciens de l’Aviation civile de Madagascar (ACM) avaient été dépêchés en Chine pour vérifier l’existence des avions et leur état. Ils ont affirmé que des révisions techniques étaient nécessaires. “Un certificat d’immatriculation provisoire (CIP) a ainsi été délivré le 17 janvier 2025 et valable jusqu’au 17 avril 2025”, selon les explications d’hier. Le CIP a été assorti d’un certificat de navigabilité (CDN) provisoire, délivré le 21 janvier 2025 et valable jusqu’au 21 avril 2025.
Intérêt supérieur de l’État
Les deux documents étaient destinés à permettre le convoyage des appareils jusqu’au Kenya pour les révisions techniques auprès du MRO ou “Maintenance, Repair and Overhaul”. Depuis, le promoteur local et l’investisseur international n’auraient plus donné suite aux discussions, affirme le ministre Ramonjavelo. “Aussi, nous avons considéré le dossier comme une tractation qui n’a pas abouti”, ajoute-t-il.
Les cinq avions étaient alors censés être stationnés en Chine. Seulement, l’ACM aurait été contactée par son homologue du Cambodge pour validation du CIP et du CDN des mêmes aéronefs. L’ACM aurait affirmé qu’ils étaient expirés et que les dates communiquées par les autorités cambodgiennes étaient falsifiées. Déjà, une plainte pour faux et usage de faux aurait été déposée suite à cet épisode. “Nous avions estimé que l’affaire était close”, déclare le ministre Ramonjavelo.
“Les autorités cambodgiennes savaient que ces avions devaient être immobilisés puisque les certificats n’étaient plus valides. (...) Donc, les autorités cambodgiennes ont autorisé un plan de vol de ces avions vers un pays sous embargo”, ajoute Valery Ramonjavelo. Une demande d’explication auprès de l’État cambodgien et la demande d’une enquête internationale auprès du secrétariat général de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) ont aussi été faites, selon le ministre.
Deux avis de recherche ont été émis hier. Il s’agirait du promoteur local et de son associée. Il y aurait déjà des arrestations, selon le ministre de la Sécurité publique, sans plus de précision. Il ajoute juste que l’enquête menée par la police et la gendarmerie est toujours en cours. Selon les indiscrétions, il n’y a pas eu d’arrestation jusqu’à l’heure à l’ACM. Suite à l’épisode du 20 juin, une enquête interne aurait été ouverte au sein de cette entité pour débusquer une éventuelle complicité.
Quoi qu’il en soit, le mal est fait. Tel qu’il a été concédé à demi-mot hier, au-delà des faits, c’est l’intérêt supérieur de l’État qui est en jeu. Pour l’heure, l’image de Madagascar est entachée par cette affaire de suspicion d’avoir joué le facilitateur pour aider un pays à contourner les sanctions internationales. Une situation qui risque d’engendrer des conséquences diplomatiques et économiques hautement préjudiciables pour le pays.
Le fait que le promoteur et le supposé investisseur n’aient plus donné suite aux discussions après avoir obtenu le CIP et le CDN aurait dû motiver la vigilance des responsables concernés. Une vigilance qui aurait dû être décuplée après l’épisode du 20 juin, au lieu d’estimer que “l’affaire était close”. Au nom de l’intérêt supérieur de l’État, le principe de “responsabilité sans faute” devrait s’appliquer aux autorités gouvernementales et administratives concernées. Surtout que ce scandale, plus que d’autres, risque de coûter cher à l’État.
Garry Fabrice Ranaivoson
Imaginer un commandant de bord sous somnifère. Avec les conséquences inéluctables qu'une telle négligence pourrait faire.
RépondreSupprimerUne histoire d'avions qui cherche à mener tout le monde en bateau.
les requins sont partout.