Il ne laisse pas indifférent. Certaines de ses déclarations paraissent farfelues, mais il n’a pas tout à fait tort. Le général Richard Ravalomanana, président du Sénat, a déclaré tout haut lors d’une cérémonie de mise en place de maires, dont certains ont demandé une immunité, ce que tout le monde pense tout bas. Il a répondu sèchement à la revendication des maires en déclarant qu’il n’est pas pour l’immunité. Mieux, il a suggéré qu’il faut supprimer ce privilège pour ceux qui en disposent. « Personne n’est au-dessus de la loi et cette disposition constitue un frein au développement ». Pour une fois, on ne peut que lui donner totalement raison.
Depuis que cette faveur existe pour les députés, il y a une course effrénée pour le palais de Tsimbazaza. Les opérateurs véreux, les auteurs de trafics, les acteurs de blanchiment de capitaux, les mauvais contribuables… se bousculent pour avoir le statut de député et pouvoir vaquer à leurs occupations favorites en toute tranquillité.
On a vu, dans un passé récent, des députés entrepreneurs frappés de redressement fiscal pour avoir osé s’opposer au pouvoir, des députés impliqués dans les vols de bœufs, des parlementaires pris dans une tentative de trafic d’or. Mais ils n’ont jamais été inquiétés sur le plan judiciaire, immunité oblige.
Les Forces de l’ordre et même certaines juridictions se plaignent des pressions exercées par certains élus dans des affaires de trafics ou de détournement de deniers publics, de crimes, de meurtres. Des refus d’autorisation de poursuite de la part des responsables concernés bloquent l’instruction de beaucoup d’affaires. La suppression des interventions est d’ailleurs la dernière bataille menée par l’équipe sortante du Comité pour la Sauvegarde de l’Intégrité dans la nouvelle stratégie de lutte contre la corruption. Une demande faite avec insistance, mais il y a encore loin de la coupe aux lèvres.
Le général Richard Ravalomanana, quoiqu’on dise, a de la suite dans les idées quand il affirme que la pauvreté n’est qu’une vue de l’esprit, étant donné que l’argent de la corruption et des trafics en tous genres reflète un semblant de développement. Un point de vue qualifié de primaire par une partie de l’opinion, mais au fond duquel se trouve une part de vérité.
L’écart social trop flagrant entre les riches et les pauvres, la lutte de place entre les bidonvilles et les quartiers résidentiels, le fossé entre le salaire minimum et l’argent du business, la différence de taille entre une famille pauvre et une famille riche font qu’on voit plutôt l’indigence dans la rue que l’aisance dans des résidences de luxe. Deux mondes qui cohabitent au quotidien avec un choc violent qui risque de barder à tout moment. Croisons les doigts.
Sylvain Ranjalahy