PROJET DE LOI DE FINANCES - Le budget 2025 passé à la loupe

Les députés s’accordent deux jours pour étudier le projet de loi de finances 2025 en travaux de commission.

Le projet de loi de finances 2025 entre en travaux de commission à l’Assemblée nationale, ce jour, en vue d’un vote en séance plénière, vendredi. Le texte vise une hausse des recettes, mais certaines taxations prévues vont à l’encontre des lignes politiques affirmées.

Deux jours. C’est le temps que s’accorde l’Assemblée nationale pour passer au crible, discuter et éventuellement proposer des amendements au projet de loi de finances 2025. Deux jours qui paraissent limités au regard de l’importance et des enjeux du texte budgétaire.

Le projet de loi de finances 2025 entre, en effet, en travaux de commission, ce jour, jusqu’à demain. Ceci, en vue d’un vote en séance plénière, vendredi. Le texte vise essentiellement une hausse des recettes. Comme indiqué à demi-mot dans l’exposé des motifs du projet de texte budgétaire, cet objectif découle des conditionnalités au décaissement des subventions du Fonds monétaire international (FMI).

«Pour l’année 2025, l’administration [fiscale] prévoit des recettes fiscales de 5 628,4 milliards d’ariary [et] la prévision de recettes douanières est établie à 4 366 milliards d’ariary», sont les projections indiquées dans le projet de loi. Les appuis budgétaires du FMI constituent, justement, une des incertitudes du projet de loi de finances 2025. Les prévisions de budget 2025 prennent en compte le décaissement par le FMI de 1 100,4 milliards d’ariary, dans le cadre de la Facilité élargie de crédit (FEC), et la Facilité pour la résilience et la durabilité (FRD). Des décaissements qui sont pourtant soumis à condition.

À l’allure où vont les choses, la décision du board du FMI pour le décaissement de la FEC, qui est prévue en cette fin d’année, sera connue bien après l’adoption du projet de loi de finances 2025 par le Parlement. Le dossier Madagascar ne figure pas à l’agenda du conseil d’administration de l’institution de Bretton Woods, durant les sept prochains jours.

Certes, le projet de texte budgétaire s’applique à améliorer les recettes étatiques par la suppression d’exonérations fiscales sur plusieurs produits, ou encore la réforme des droits d’accises. C’est justement la raison de la taxation à 0,5% des transactions financières par «mobile money». Seulement, il y a un point d’achoppement dans les discussions entre l’État et le FMI. Il s’agit du mécanisme d’ajustement automatique des prix du carburant.

Nette hausse  

Cette mesure est hautement impopulaire et risque d’être le coup de grâce pour les ménages vulnérables et ceux de la classe moyenne. L’État devra, cependant, se plier aux conditionnalités de l’institution de Bretton Woods, au risque de voir les perfusions budgétaires bloquées. En principe, les mécanismes de compensation prévus par le projet de loi de finances pour atténuer le choc de l’application des mesures sur le carburant devraient être des points sur lesquels les députés doivent être pointilleux.

L’ajustement des prix risque, de plus, d’entraîner une hausse conséquente du litre du pétrole lampant qui est le plus utilisé par les ménages vulnérables. Le projet de loi de finances 2025 présente, par ailleurs, des incohérences par rapport à des lignes politiques affirmées par l’État. C’est le cas, par exemple, de la hausse à 10% de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA), pour le gaz comprimé ou liquéfié.

Les opérateurs du secteur ont pris les devants en appliquant d’ores et déjà une hausse au prix de la bouteille à gaz auprès des détaillants. Cette mesure risque d’amener les consommateurs à privilégier le charbon de bois. Déjà, avec les coupures de courant et l’instabilité de la tension électrique dans les foyers, le marché du charbon a repris des couleurs, pour réchauffer l’eau ou même faire la cuisine. Elle devrait revenir au top des produits de consommation de milliers de foyers avec cette hausse du prix du gaz.

Une autre incohérence concerne justement le budget de la Chambre basse elle-même. Une politique d’austérité est mise en avant, surtout pour répondre à la crise de l’eau et de l’électricité. Afin de soutenir l’effet de redressement de la Jirama, les budgets d’investissement de l’ensemble des entités publiques sont amputés de 10%, au moins. Des institutions comme le Sénat et la Haute Cour Constitutionnelle (HCC) voient leur budget d’investissement ramené à zéro. 

Le budget «d’investissement interne», de l’Assemblée nationale connaît une nette hausse. Elle passe d’un peu plus de 47 millions d’ariary dans la loi de finances rectificative 2024 à plus de 16 milliards d’ariary dans le projet de loi de finances 2025. Il n’y a pas d’explication avancée à cette hausse. Des observateurs y lisent une prévision budgétaire pour l’achat des 4x4 destinés aux députés. Une initiative qu’aucun des élus ne refuse réellement. Le seul désaccord ne concerne juste que le concessionnaire ou l’endroit où acheter le véhicule et le modèle de véhicule.

Visiblement, les députés ont aussi quelques explications à fournir sur l’agencement des prévisions budgétaires. Du reste, plusieurs mesures prévues dans le projet de loi de finances pourraient impacter directement le portefeuille des citoyens. Charge à eux de décortiquer correctement le texte afin que les contribuables ne soient pas lésés. Reste à voir si les deux jours de travaux de commission suffiront.

Garry Fabrice Ranaivoson  

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