Pendant une vingtaine d’années, le monde du sport a trouvé une recette électrique et a fourni une période magnétique qui a su captiver les esprits. Durant trois décennies bénies (les années 2000, 2010 et 2020), on a savouré le tennis, qui a été élevé à son sommet par ceux que les observateurs voient, à la quasi-unanimité, comme les trois plus grands joueurs de tous les temps, le fameux Big 3 composé de Novak Djokovic, Roger Federer et Rafael Nadal. Une ère de délectation dont le déclin, amorcé par la retraite de Federer en 2022, connaît une autre phase avec la fin de la carrière de Nadal.
Comme durant les semaines, voire les mois qui ont suivi le jour où on a tourné la dernière page du parcours épique de Federer, le sentiment de grand dépeuplement nous envahit maintenant qu’on est encore dans les premiers pas de l’univers du tennis, qui ne peut que ressentir la pesanteur de ce lourd manque, privé de la présence d’un géant qui a tant imposé son nom. Sans lui, les courts perdent une quantité considérable de leurs émanations flamboyantes, celles qui ont eu pour origine le parcours de Rafael Nadal, à la source d’une aura illuminée par un palmarès grandiose.
Rafael Nadal est le héros d’un récit légendaire qui éblouira l’histoire du tennis, qui n’oubliera pas son parcours exceptionnel, sublimé par un grand Chelem doré en carrière quand il a immortalisé son nom dans l’histoire des Jeux olympiques et des quatre tournois du Grand Chelem. Ses 22 titres en Grand Chelem porteront la marque du phénix qu’il était, capable de renaître de ses cendres, auxquels l’ont réduit, à de multiples occurrences, ses blessures à répétition. Il a alors su, admirablement, transcender ses pépins physiques, aidé par une force et une volonté qui ont laissé leurs traces indélébiles sur sa surface de prédilection : la terre battue de Roland-Garros.
Les fans inconditionnels de Roger Federer gardent en mémoire de douloureux souvenirs des premières années du long règne de Rafael Nadal aux Internationaux de France, au cours desquelles sa domination et sa maîtrise de la terre battue ont longtemps frustré l’artiste suisse. Une apogée surhumaine portée en triomphe quatorze fois à Roland-Garros, un record qui ne tombera pas avant longtemps. Il est, à jamais, le roi indétrônable de cette surface lente. Et ce n’est pas cette retraite qui effacera ce fabuleux récit que la postérité continuera de narrer.
Les générations actuelles et celles qui vont suivre ne cesseront de chanter, comme elles n’arrêtent pas de louer la bravoure d’Achille et la ruse d’Ulysse, l’épopée de Rafael Nadal. Sa retraite est une entrée définitive dans la légende. Et nous, qui étions là pour vivre en direct la construction de ce monument, lui serons toujours reconnaissants.
Fenitra Ratefiarivony