Justin Tokely, président de l’Assemblée nationale, au perchoir de l’institution. |
Des grognes de mécontentement contre le bureau permanent se font insistantes à la Chambre basse. Une menace de destitution de l’équipe au perchoir de cette institution est brandie.
Du classique. Une énième session démarre à l’Assemblée nationale et s’accompagne d’un énième vent de fronde. Dans ce nouvel épisode, c’est le bureau permanent qui est la cible d’une menace de destitution.
Le bruit rapportant des mécontentements des membres de la Chambre basse envers l’équipe au perchoir était en fond sonore de la cérémonie d’ouverture de la session ordinaire de l’institution, mardi. Le sujet a, toutefois, été éclipsé par le tri sélectif imposé aux journalistes. Une mesure allant à l’entrave de la Constitution, de la loi sur la communication médiatisée et de la liberté de la presse.
Il se chuchotait que dans l’après-midi de mercredi, certains députés allaient demander une séance à huis clos pour demander des comptes au bureau permanent. Cela ne s’est pourtant pas fait. La grogne dans les rangs des membres de l’Assemblée nationale ne s’est cependant pas tue. Elle a même dépassé les murs du palais de Tsimbazaza. Des membres du bureau permanent contactés affirment que leur relation avec les membres de l’institution est au beau fixe.
Des élus, présents à des événements hors de l’institution, ont confié leur frustration durant des discussions en aparté. «À l’allure où vont les choses, nous allons engager une procédure de destitution du bureau permanent», affirme sans équivoque l’un d’eux. Ses pairs ont confirmé cette intention à demi-mot. «Le problème porte sur la gestion financière de l’institution», glisse un autre avec un sourire timide. Une manière de dire que le motif du mécontentement est un sujet récurrent.
Les soucis dans «la gestion financière» animent les débats sur les affaires propres de l’Assemblée nationale à chaque session, qu’elle soit ordinaire ou extraordinaire. Cette fois-ci encore, «des retards de paiement d’indemnités de session», ou encore, «une amputation conséquente et arbitraire du budget de carburant destiné à chaque député et un retard de paiement», seraient parmi les motifs du mécontentement.
Épée de Damoclès
L’amputation du crédit carburant serait destinée à l’achat de véhicules pour les députés. «L’initiative a été prise sans consultation préalable», réagit un élu venant du Sud du pays. Des députés ayant déjà un véhicule, tout terrain notamment, voudraient garder leur crédit carburant. D’autres voudraient avoir leur mot à dire sur le modèle et la marque du véhicule à acheter et négocier le montant amputé.
L’autre motif de mécontentement est «le retard dans la prise de l’arrêté de nomination des assistants parlementaires et des conseillers des députés». Au fil des échanges avec les élus qui délient leur langue, les membres du bureau permanent qui sont directement concernés par les questions financières et administratives sont les principales cibles de mécontentement. Certains élus y trouvent, cependant, une opportunité pour s’arroger un des sièges au perchoir de l’institution de Tsimbazaza.
«Outre le vice-président pour l’opposition parlementaire, les membres du bureau permanent peuvent être démis de leurs fonctions respectives en tant que membres du bureau permanent pour motif grave par un vote des deux tiers des députés», prévoit le règlement intérieur de la Chambre basse. Depuis mercredi après-midi, jusqu’à hier, les membres du bureau permanent se seraient démenés pour calmer et taire les grognes.
Au regard des scénarios des présentes sessions à l’Assemblée nationale, les menaces de destitution du bureau ont pour but de pousser ce dernier à réagir et à répondre aux desiderata des députés. Une fois qu’ils obtiennent gain de cause, le vent de fronde tombe, avant de revenir en force en cas de nouveau mécontentement. Dans certains cas, c’est la carte de la motion de censure contre le gouvernement qu’ils jouent. À chaque session, il s’agit d’une épée de Damoclès brandie par les députés.
Garry Fabrice Ranaivoson