MODERNISATION - La Douane acte sa métamorphose

Digitalisation et dialogue font partie des priorités de la Douane. (Src photo: DGD)

L’écosystème douanier du pays est en pleine mutation. Selon la direction générale des Douanes, les réformes engagées matérialisent le plan stratégique de modernisation du système douanier qui comporte une trentaine de projets spécifiques dont la mise en œuvre est appuyée par les partenaires bilatéraux et multilatéraux, dont la Corée du Sud et les États-Unis.

Selon les explications fournies, la politique menée par la Douane malgache ces dernières années est orientée dans le but d’une augmentation tangible des recettes et dans un esprit «focus on : Douane, partenaire et accompagnateur du décollage économique de Madagascar ». Dans cette optique, la digitalisation contribuera à accélérer les procédures et à sécuriser les recettes, tout en contribuant à la lutte contre les fraudes douanières. C’est ainsi que le Data Warehouse a été mis en place dernièrement. Ernest Lainkana Zafivanona, directeur général des Douanes, a précisé qu’il s’agissait d’une base de données relationnelle hébergée sur un serveur dans un data center ou centre de données. Il recueille des données de sources variées et hétérogènes dans le but principal de soutenir l’analyse et faciliter le processus de prise de décision.

Il est constaté en effet qu’à l’heure du big data, la Douane fait face au défi majeur de la sauvegarde et de l’exploitation optimale des données. Le Data Warehouse est donc un outil de l’informatique décisionnelle, ou business intelligence. Disposer d’un Data Warehouse présente de nombreux avantages pour l’administration douanière et s’impose comme une solution incontournable au vu des quantités de données à gérer au sein de l’administration. Leur exploitation constitue un enjeu stratégique pour atteindre l’efficacité en matière de contrôle et de facilitation.

Aussi, la Douane dispose-t-elle désormais d’un outil de pointe pour consolider ses données au sein d’un référentiel unique. « L’administration douanière détient et sauvegarde une quantité de volumétrie très élevée des données sensibles et stratégiques. Il devient indispensable d’avoir recours à un Data Warehouse pour centraliser et consolider les données dans un même endroit », a-t-on aussi expliqué. La capacité de stockage de cette nouvelle infrastructure lui suffit pour une période de 50 ans. Par ailleurs, les données sont organisées de façon transverse afin que la Douane puisse disposer des informations utiles sur un sujet souvent transversal aux structures fonctionnelles.

On sait en outre que le Data Warehouse permet de croiser fonctionnellement les données. Les données y sont organisées de manière à préserver leur stabilité contextuelle et à faciliter les requêtes et prises de décision. « Pour obtenir rapidement des informations stratégiques, le Data Warehouse fait partie des dispositifs de la business intelligence, ou BI, soit l’analyse assistée par ordinateur des données brutes de l’entreprise sur laquelle elle s’appuie pour prendre des décisions stratégiques», a-t-on ajouté.

En effet, la centralisation d’une quantité élevée d’informations offre un aperçu complet d’ensembles de données hétérogènes et permet ainsi de prendre en compte tous les paramètres pertinents pour prendre une décision. De plus, la disponibilité des données et leur caractère non volatile assure une certaine efficacité. Dorénavant, l’administration des douanes peut construire rapidement des analyses fiables. Le Data Warehouse répond donc au besoin décisif de maîtriser l’information et de l’exploiter au mieux.

Le Data Warehouse pour historiser les données

Pouvoir conserver les données tout en veillant à leur non-volatilité, c’est une possibilité qui n’était pas à la portée de la Douane malgache auparavant. Tandis qu’aujourd’hui, en préservant la traçabilité des informations et des décisions prises, il est maintenant possible qu’une requête, quel que soit le moment où elle est faite, aboutisse toujours au même résultat. Le principe de conservation des données est ainsi une condition sine qua non à la fiabilité des résultats délivrés par le Data Warehouse. Par ailleurs, lors de leur intégration, les données sont normalisées et rationalisées de façon à créer une cohérence entre elles, bien qu’elles proviennent de sources disparates. Cette démarche contribue également à maintenir un niveau de qualité élevé des analyses basées sur les données stockées.

« Nous avons rêvé que les décisions douanières, de valeur, d’admission temporaire, de regroupement tarifaire, de décisions anticipées, etc., passent par un processus de validation digitalisé et rapide pour servir les usagers. Dorénavant ce n’est plus un rêve. Nous avons rêvé que les demandes de franchise se fassent en ligne, puissent se faire de n’importe où dans le monde et que les décisions soient octroyées avant même que les marchandises arrivent au port. Maintenant, nous évoluons sur un business process basé sur la performance, où les KPI sont les maîtres mots pour dicter l’avenir de l’administration. Maintenant, c’est chose possible », a précisé avec enthousiasme Ernest Lainkana Zafivanona.

Si la mise en place du centre de données, en partenariat avec la douane coréenne, constitue une étape majeure dans le processus de digitalisation douanière, les responsables rappellent que d’autres initiatives ont aussi été lancées. La direction générale des Douanes a annoncé dernièrement le déploiement de la phase pilote du projet d’Amélioration du système électronique de dédouanement à Madagascar. Bénéficiant également de l’appui financier et technique de la Corée du Sud, ce programme qualifié d’ambitieux s’articule autour de plusieurs axes principaux dont le renforcement de la gestion des risques grâce à la création de l’ERA (Enhanced Risk Management), permettant une gestion automatisée des risques, en utilisant l’intelligence artificielle, accompagnée d’une indexation directe des scorings à la déclaration sur Sydonia World. On note aussi la digitalisation de la gestion des ressources humaines basée sur la compétence.


La Douane mise beaucoup sur sa Data Warehouse. (Src photo: DGD)

Échanges et dialogue

À noter qu’une réunion de restitution organisée le mois dernier a marqué la fin de la mission des techniciens de la CUPIA, envoyés par la douane coréenne, qui ont été présents à Madagascar pendant deux mois pour l’installation du Data Warehouse, de l’ERA, et de l’application dédiée à la gestion des ressources humaines, ainsi que pour former les utilisateurs, et pour corriger les erreurs de la phase test. Le chef de mission du projet, issu de la partie coréenne, a tenu à féliciter les équipes de gestion des projets de la douane malagasy, ainsi que les agents, utilisateurs finaux, qui ont bénéficié du transfert de compétences y afférentes, pour leur engagement et leur enthousiasme sans faille tout au long du déploiement de la phase pilote.

Le directeur général des Douanes a aussi tenu, en retour, à remercier la douane coréenne et la CUPIA, pour leur « soutien indéfectible », tout en soulignant l’impact positif significatif que ce projet aura pour la douane de Madagascar, à savoir la réduction du délai de dédouanement, l’augmentation des recettes douanières, et l’amélioration de la gestion des ressources humaines.

Si l’intégration des nouvelles technologies pour moderniser la gouvernance douanière est en marche, la direction générale des Douanes a aussi tenu à souligner que des efforts sont déployés pour améliorer les échanges et le dialogue avec les différentes parties prenantes et les usagers. D’où la tenue du premier « Mardi de l’AFE » (Accord sur la Facilitation des Échanges) ce 16 juillet 2024 au Grand café de la Gare, Soarano. Ce nouveau rendez-vous, a-t-on expliqué, réunira chaque premier mardi du mois les acteurs, partenaires et usagers de la Douane pour des discussions en rapport avec la facilitation des échanges.

Pour cette grande première, la Douane était accompagnée des représentants du Comité National de la Facilitation des Échanges (CNFE), de la confédération du tourisme, des groupements des transitaires, des groupements des entreprises, des opérateurs, des compagnies aériennes et des journalistes, avec la participation en ligne de l’OMD (Organisation Mondiale des Douanes). Cette occasion a permis de présenter les nouveaux outils développés en alignement avec les recommandations de l’Accord sur la Facilitation des Échanges, à savoir la Décision anticipée, la Commission de conciliation et d’expertise douanière, l’Observatoire du délai de dédouanement, le programme des Opérateurs Économiques Agréés et le Cadre de consultation douanière.

LA DOUANE MALAGASY EN CHIFFRES



Coopération

La Douane s’active

La Douane compte sur une augmentation tangible des recettes  dans les prochaines années. (Src photo : DGD)

Le renforcement de la gestion des risques grâce à la création de l’ERA (Enhanced Risk Management) permet à la Douane une gestion automatisée des risques, en utilisant l’intelligence artificielle, accompagnée d’une indexation directe des scorings à la déclaration sur Sydonia World, la digitalisation de la gestion des ressources humaines basée sur la compétence et la mise en place d’un entrepôt de données, un outil de l’informatique décisionnelle ou « business intelligence ». La phase test du projet a été lancée suite à l’opérationnalisation du Data Warehouse.

Le directeur général, Ernest Lainkana Zafivanona, et son staff ont aussi reçu, le 18 juillet dernier, une délégation composée de la prestigieuse DEA (Drug Enforcement Administration), accompagnée d’un représentant du ministère de la Défense américaine ainsi que de la Sécurité de l’ambassade des États-Unis à Madagascar. La DEA est une agence fédérale américaine chargée de lutter contre le trafic et la distribution de drogues aux États-Unis ainsi que de la coordination des enquêtes américaines sur la drogue, tant au niveau national qu’à l’étranger. Les discussions ont porté sur les stratégies mises en œuvre par la Douane malgache pour combattre ce trafic, ainsi que sur les futurs projets de l’administration douanière en la matière. Les représentants de la DEA ont réaffirmé leur engagement à soutenir la direction générale des Douanes dans ses efforts, notamment en matière d’infrastructures et de renforcement des capacités.

Le directeur général des Douanes a souligné l’importance de la coopération et de l’appui technique et financier des partenaires internationaux dans le cadre de la lutte contre le fléau du trafic de stupéfiants. Il a mis en avant la nécessité de pérenniser les initiatives et de former l’ensemble des acteurs frontaliers afin de favoriser un partage d’informations en temps réel. Cette approche garantirait une meilleure coordination des actions, rendant ainsi la lutte contre ce fléau plus efficace et proactive. 

Rappelons enfin qu’au mois de mars dernier, le gouvernement américain a décidé de s’associer à l’administration douanière malgache en lançant un nouveau projet d’appui à la douane. D’une durée de deux ans, cette initiative bénéficiant d’un financement de 1,25 million de dollars a pour objectif d’améliorer l’efficacité et la transparence du système actuel de gestion douanière de Madagascar. « Ce partenariat avec les États-Unis contribuera principalement à l’amélioration des procédures aéroportuaires, notamment en ce qui concerne la gestion des passagers et le traitement des marchandises. Il s’agit notamment d’intégrer les services de livraison express et le commerce électronique », a-t-on précisé.

VERBATIM

Ernest Lainkana Zafivanona, directeur général des Douanes

« La Douane malgache évolue dans un processus axé sur la performance, où les KPIs ou indicateurs clés de performance sont les maîtres-mots pour orienter l’avenir de l’administration. Nous avons rêvé d’un avenir où les décisions douanières, telles que, entre autres, celles concernant la valeur, l’admission temporaire, le regroupement tarifaire, et les décisions anticipées, seraient validées à travers un processus digitalisé et rapide, conçu pour mieux servir les usagers. C’est désormais une réalité. »

Claire Pierangelo, ambassadrice des États-Unis à Madagascar

« L’amélioration de la transparence et de l’efficacité des procédures douanières peut avoir des effets positifs en cascade sur l’économie malgache et contribuera à instaurer la confiance nécessaire pour accroître les investissements des entreprises dans le pays. Nous sommes heureux de soutenir la douane dans cette étape importante pour le développement durable de Madagascar. »

L'Express de Madagascar

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