La colline de Kaloy qui abrite le village natal d’Andrianampoinimerina, n’est pas accessible à tous. |
Le règne des Quatre fils était un essai de décentralisation avant la lettre mais aussi la continuité du mode de gouvernance en associant les différentes générations à l’exercice du pouvoir de manière à assurer une stabilité et une seule dynastie à travers le temps (Ramisandrazana Rakotoariseheno Testaments politiques et mode de gouvernance des souverains de l’Imerina VIIIe-XVIIIe siècle , communication à l’Académie malgache, 19 décembre 2019).
« Mille ans ont passé depuis Andriantsaratahiry. C’était la seule et même dynastie, englobant celle des Vazimba par les mariages, que nous avions séquencée en lignées. La lignée d’Alasora, si elle a consolidé le Fanjakana, commença à se délabrer devant l’enrichissement global et n’a pu contrôler l’âpreté aux gains des uns et des autres jusqu’à l’avènement d’Andrianampoinimerina », résume l’académicienne (lire précédentes Notes).
Si l’on fait un parallèle avec d’autres dynasties, remarque-t-elle, tel en pays bara, Lahimanjaka succède à son père et est élu par le peuple. Ses frères ont des « menakely » (domaine féodal), mais tous rendent hommage à l’aîné, et ont l’obligation d’être solidaires en cas de guerre. À sa mort, son deuxième fils, Impoinimerina, le plus populaire, reprend le flambeau à la suite du choix des « Olobe », ratifié par le « Vohitse » ou peuple, selon Le Barbier ( Notes sur le pays bara Imamono , Bulletin de l’Académie Malgache ns, tome III, 1916-1917).
En Imerina, les Loholona commencent à s’affaiblir, puisqu’ils n’ont presque plus d’emprise sur Andriamasinavalona et ses quatre fils qui détiennent chacun un territoire. Ils n’ont voix au chapitre qu’à l’époque d’Andrianamboa-tsimarofy, roi d’Antananarivo, « qu’ils menaçaient de destitution pour cause de meurtre d’une de ses épouses et d’ivresse ».
Ramisandrazana Rakotoariseheno cite un cas similaire qu’elle retrouve en pays betsileo. Andriambelo-nandro de Vohibato fait tuer son frère cadet, les Loholona le punissent en l’exilant, pendant trois ans, dans la forêt noire chez les Tanala. Il ne récupère son trône qu’après ces trois années de bannissement. (le Firaketana , 1937, voir le nom).
En pays sakalava, la déchéance peut être également prononcée à l’encontre d’un souverain, ce qui provoque le mécontentement de ses vassaux et sujets. Et si ces derniers élisent son successeur, issu de la même famille, il garde toutefois ses officiers et vassaux immédiats, car il conserve à leurs yeux, son caractère sacré et indélébile d’Ampanjaka (V. Noel, 1844, Recherches sur les Sakalava, Extrait du Bulletin de la Société de Géographie).
L’historiographie merina, celle d’Alasora notamment, des « rois civilisateurs » est une forme de consécration de leur « triomphe apparent » sur les Loholona tout puissants des temps anciens. Les Sakalava recommencent alors à attaquer l’Imerina des quatre rois, jusqu’à l’avènement d’Andrianam-poinimerina.
Et si la gouvernance d’Andria-nampoinimerina mérite une autre étude particulière, souligne l’auteure de l’étude, l’on peut déjà avancer qu’il reprend beaucoup des anciennes méthodes et modes de gouvernance de ses ancêtres. Il aurait dit à la veille de sa mort qu’il « vaut mieux avoir un roi fou qu’un Loholona fou, les avis de la majorité sont le Fanjakana, soyez aimé du peuple pour que vous ayez l’éternité, eran-tany eran-danitra» (Manuscrit de l’Ombiasy de Ranavalona Ire).
De même, Andrianampoini-merina revalorise particulièrement l’émulation dans les travaux communautaires et la récompense par la notion de « Tsy maty manota», décret royal « qui ne s’applique que pour la sauvegarde de la personne physique du roi ». Mais cette proximité au souverain est devenue un autre problème de bonne gouvernance, quelle que soit l’origine de cette faveur. D’autant plus que les corruptions et les abus ont la vie dure et handicapent l’éthique de ses origines.
Mais d’ores et déjà, conclut Ramisandrazana Rakotoariseheno, l’on peut dire que les Loholona, à l’époque de ce grand roi, ont d’autres préoccupations que le souci de l’équilibre des pouvoirs et de leur bonne répartition. « Ils deviendront les grands oligarques du XIXe siècle, après le rétablissement de la paix. »
Pela Ravalitera