Le sens du devoir

Même les plus belles histoires ont une fin. Hélas, c’est le cas du Docteur Firoze Koytcha, président de l’association Médecins de l’océan Indien. Un sacerdoce qui se termine après 40 ans de bons et loyaux services en faveur des Malgaches, soixante-neuf missions de soins gratuits d’un bout à l’autre du pays, et plus de cinq cent mille malades traités. Excusez du peu.

Né à Madagascar en 1939, le Dr Firoze Koytcha a fait ses études de médecine en France avant de revenir servir ses compatriotes. Il raccroche à 85 ans, mais les missions continuent. Son ami Danil Ismael, natif de l’Androy et grand mécène de l’association depuis le début, reprend le flambeau à la présidence. Aucune inquiétude donc pour la continuation des missions sanitaires. Il ne peut en être autrement quand on sait que même le crash d’un DC 3 de l’armée dans lequel vingt médecins et infirmiers réunionnais ont péri le 18 juillet 1996, n’a pas douché les ardeurs du Dr Firoze Koytcha et ses collaborateurs. D’ailleurs, il part mais en quarante ans, il a constitué une relève compétente parmi ses collègues malgaches. Voilà pourquoi l’Association sanitaire karana, créée en 1987 et devenue Association sanitaire réunionnaise, a été rebaptisée Association des médecins de l’océan Indien.

C’est à juste titre que l’Ordre des médecins l’a désigné membre d’honneur à l’issue de sa carrière. C’est hautement mérité et il aurait dû l’être depuis longtemps. Mais on peut faire beaucoup mieux. Une telle œuvre, un tel dévouement, un tel engagement totalement désintéressé devraient être appréciés à leur juste valeur au niveau de l’État. C’est étonnant qu’en quarante ans, personne n’ait aperçu la noblesse des missions effectuées par le Dr Firoze Koytcha. S’il y a quelqu’un à qui on doit décerner les plus hautes distinctions du pays pour son sens du devoir, difficile de trouver mieux. Ce ne sera pas du tout une complaisance comme c’est le cas pour d’autres personnalités dont l’existence n’est connue de l’opinion publique que le jour où on lui remet la légion d’honneur ou le titre de Commandeur.

D’autres médecins dévoués comme le défunt Docteur Nouraly et de simples gens le méritent également. La reconnaissance ne coûte absolument rien. Au contraire, elle rehausse l’image de son auteur tout en donnant de la valeur à l’excellence, à la probité et à l’humanisme. On en a beaucoup besoin à un moment où tous les repères sont perdus, où il n’y a plus de boussole, où il n’y a plus de référence à part la corruption, le trafic et la violence. Il n’est jamais trop tard pour bien faire.

Sylvain Ranjalahy

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