Les législatives suscitent des vocations comme d’habitude. Si l’objectif des partis est d’avoir la majorité pour pouvoir mener à bien la politique de l’État ou de tout faire pour empêcher l’exécution de cette politique selon le bord où on se trouve, ce n’est pas la motivation de tout le monde. Depuis la seconde République, l’Assemblée nationale a souvent été qualifiée de « Chambre croupion » dans la mesure où elle a été composée dans la majorité de députés du même bord, où tous les projets de loi étaient votés en deux temps, trois mouvements et les yeux bandés. Une petite éclaircie avait eu lieu lors de la troisième République où l’Assemblée nationale a pleinement joué son rôle, trop bien même, poussant la chansonnette jusqu’à empêcher le président de la République. Puis c’était le retour aux anciennes pratiques. Le changement de Président et de République n’a apporté aucune évolution dans les mœurs et les devoirs d’un député. Le taux d’absentéisme atteint des sommets alors que les députés sont devenus pratiquement des fonctionnaires. À chaque vote de projet de loi, ils ne sont qu’une vingtaine de députés assidus à respecter leurs électeurs et les contribuables.
Chaque session fait l’objet de surenchère autour du vote de la Loi de finances ou d’autres projets de loi. Les histoires de mallette et d’espèces sonnantes et trébuchantes sont devenues monnaie courante. La revendication d’un 4x4 est un classique. Beaucoup de candidats pensent aux avantages immenses offerts par un siège de député plutôt qu’à leurs devoirs et obligations en tant qu’élus du peuple. Certains sont en quête d’une immunité parlementaire pour pouvoir faire des trafics ou pour disposer d’un bouclier et d’un parapluie qui les protègent contre tout recours à la loi. À se demander si un pays pauvre a besoin d’institutions soi-disant symboles de la démocratie mais qui ne sont d’aucune utilité pour le développement et qui pompent les finances de l’État.
Des journalistes, des artistes et des farfelus figurent parmi les candidats aux législatives du 29 mai. Ce n’est pas une première. Beaucoup d’artistes composent l’Assemblée nationale sortante. Certains sont sérieux et assument bien leurs tâches. D’autres n’ont jamais assisté à aucune session ordinaire mais se rappellent au souvenir des électeurs à quelques semaines de l’élection, à travers des gestes de charité en faveur des familles en difficulté. Dans le passé plus ou moins récent, des célèbres artistes ont également siégé à Tsimbazaza et ont été animés de bonnes intentions au départ mais ont été noyés dans cette masse d’opportunistes et ont fini par être… dépités. Moralité de l’histoire, c’est bien d’avoir de bonnes idées et de bonnes visions pour prétendre conquérir l’Assemblée nationale, mais c’est un coup d’épée dans l’eau si la Chambre basse continue d’être le refuge de valets de chambre et de servir de caisse de résonance plutôt que d’être un véritable censeur de l’Exécutif. Aux urnes citoyens.
Sylvain Ranjalahy