Un village en pleine forêt orientale. |
Jean-Baptiste Fressanges, un jeune voyageur français, est surtout connu pour son livre Voyage à Madagascar. L'ouvrage paraît pour la première fois en 1808, dans les Annales des voyages, de la géographie et de l'histoire, deux ans après sa mort et à partir de son manuscrit. Il est repris en 1888, sans autre commentaire qu'une courte notice biographique sur l'auteur, dans les Archives coloniales: Maurice-Réunion-Madagascar.
J.-B Fressanges rédige son manuscrit alors qu'il est encore dans la Grande ile, en 1802-1803, quelque temps avant sa mort, survenue à La Réunion en 1806. Il est recueilli par l'un de ses compagnons de voyages, M. Bottard, qui le rapporte à l'Ile de France (Maurice) d'où ils sont partis pour leur grand voyage et où vit la famille Fressanges.
Ce voyageur entreprenant qu'est J.-B Fressanges meurt des fièvres, à l’âge de 24 ans pour avoir voulu connaître de près la Grande ile de Madagascar. C'est un Auvergnat, né à Clermont-Ferrand en 1782, fixé dès 1785 à l'Ile de France, fils d'un avocat de Port-Louis qui est le premier magistrat de cette ville en 1791. Le jeune Jean-Baptiste est élevé par sa mère, Élisabeth de Bar qui rêve pour lui d'une glorieuse carrière dans le métier des armes, et par son précepteur, M. Husson, pédagogue plein de savoir et de fantaisie: il lui apprend la peinture et la poésie, l'histoire et la géographie, les mathématiques et l'exercice des armes.
Mais la principale influence que subit le jeune Fressanges, est celle de son frère aîné, Guillaume, enfant prodige passionné de voyages, parti à 13 ans en 1794 « pour la Croisière » sur la frégate La Cybèle. Vingt-deux mois après, Guillaume raconte à son jeune frère le siège de Diu, port de l'Inde portugaise, et le combat épique du Centurion contre le Diomède. Et autres aventures dans mille pays inconnus.
À son tour, Jean-Baptiste rêve de voyages... On connaît depuis longtemps Cipangu et Cathay... Mais la Grande ile de Madagascar, si proche de l'Ile de France, reste encore presque totalement ignorée. Il dévore les ouvrages de Flacourt, de l'abbé Rochon, de l'abbé Prévost, et les innombrables récits qui couraient sur les aventures du baron de Benyowski. Et à son tour, « il partit avant d'avoir atteint 20 ans, apprit la langue du pays (Madagascar), parcourut les plaines de la côte, tenta de remonter les vallées des grands fleuves, aperçut les beaux lacs de l'intérieur, les forêts des montagnes élevées, prenant contact avec les populations diverses que les hasards de sa route lui permettaient de rencontrer... » (Simon Ayache et Jean Valette, archivistes paléographes).
Il se met en devoir de « regarder », d'observer avec sincérité ce pays nouveau, cette immense contrée. Et il a l’espoir secret d'être un jour l'initiateur d'une nouvelle installation française réussie, pacifique...
Abordant la valeur du témoignage de l'auteur, les deux archivistes signalent sa naïveté et quelques erreurs qu'il ne peut éviter. Il confond ainsi tous les peuples du Nord sous le même nom d'Antavarts (Nordistes). Il distingue, au contraire, Bezonsons et Antancayes (région de Moramanga) qui forment pourtant le même peuple des Bezanozano. Il se trompe sur les mœurs du pays et réserve aux seuls Antaximes (Antatsimo ou Sudistes) l'usage du bouclier. Mais il accorde une extension excessive sur toute l’ile, à la coutume d’exposer à des actes cruels, des enfants « nés dans les jours malheureux » (terak'Alakaosy)... Enfin, il ignore aussi presque tout de la côte Ouest et des peuples sakalava.
Néanmoins, le pays et les gens sont décrits avec exactitude, parfois même avec pittoresque. Au pittoresque et à la vérité, s'ajoute la sympathie quand l'auteur aborde la peinture des mœurs malgaches, en particulier les cérémonies rituelles du serment ou de la circoncision, et surtout quand il s'attache à décrire le caractère des insulaires. « Le principal mérite de ce témoignage réside à coup sûr dans la sincère objectivité avec laquelle J-.B Fressanges, en 1802, a voulu regarder vivre ce peuple des iles, si peu connu encore et si mal connu surtout. »
Pela Ravalitera