Le dernier rapport de la Banque mondiale fait état de l’avancée de la pauvreté urbaine. Un grand bond en avant en quelque sorte puisque, en dix ans, elle a cru de 13% passant de 42,2 en 2012 à 55,5 en 2022. Pire la pauvreté touche 61% de la population dans les villes secondaires. La pauvreté rurale est assez stable passant de 80,6% en 2012 à 79,9% en 2022. Dans l’ensemble 75,2 % de la population était pauvre en 2022.
Des chiffres qui n’ont rien de surprenant et qui ne cessent de se détériorer depuis plus de quarante ans. Les bailleurs de fonds devraient être les premiers à constater l’échec cuisant de leur politique de développement dans les pays pauvres. Comment peut-on améliorer ces statistiques quand on sait que toutes les thérapies administrées par les bailleurs de fonds ont globalement échoué?
La Banque mondiale avance la détérioration de l’environnement des affaires, le manque d’investissement dans l’éducation, la santé et l’infrastructure urbaine comme principales causes de cette descente aux enfers. C’est en partie vrai mais il faut dire que c’est l’inefficacité des politiques de redressement préconisées ou imposées par les bailleurs de fonds, le manque de suivi et d’évaluation des projets, le laxisme dans la gestion des fonds alloués… qui aggravent la pauvreté déjà chronique d’une année à l’autre.
La Banque mondiale annonce une subvention de 4,5 milliards de dollars en faveur de Madagascar pour les années à venir mais la population ne se fait plus guère d’illusion quant à l’effet d’une telle somme sur sa condition de vie. Depuis quarante ans, les bailleurs de fonds auraient injecté peut-être vingt ou trente fois cette somme mais le fait est que le pays continue de s’enliser dans une pauvreté glauque. La situation n’a pas évolué ou plutôt si, mais le pays progresse à reculons.
On ne peut pas rêver d’un développement approprié en procédant à des programmes d’assistanat et de charité. Cela ne fait qu’infantiliser la population même si l’urgence impose une assistance immédiate pour la survie des habitants dont une bonne partie vit dans une sous-alimentation chronique.
Si l’on veut avoir des résultats palpables des actions des bailleurs de fonds sur les conditions de vie de la population, il faut avoir le courage de changer de paradigme et cesser de mettre le pays éternellement sous perfusion et maintenu en vie grâce à une bouteille d’oxygène. Eh oui, beaucoup de personnes, pour oublier la misère, se mettent sous sérhum en permanence.
Sylvain Ranjalahy