Fatalité

Cent vingt ans. Eh oui, on n’a pas vu le temps passer. Plus d’un siècle que le Centre de rééducation des mineurs existe. C’est une institution dont l’importance est capitale pour la société, mais qui est passée quelque peu au second plan. Son existence est méconnue par une grande partie de l’opinion. Il est vrai qu’avoir un enfant pensionnaire de ce centre n’a rien d’honorable. C’est un fait que l’on cache autant que possible aux connaissances et aux voisins.

On ignore, d’ailleurs, combien d’enfants sont passés dans ce centre depuis 120 ans. Il doit y avoir une liste «  d’anciens élèves » quelque part. Certes, ce n’est pas une fierté d’y figurer, mais des témoignages pourraient servir d’exemple aux jeunes. Le ministère de la Justice a bien fait de réhabiliter ce centre, ce qui n’est pas souvent arrivé depuis deux siècles, pour donner un environnement décent aux pensionnaires. Ce centre est en quelque sorte une prison pour les délinquants mineurs. Ce n’est pas pour autant qu’il doit ressembler à celle d’Antanimora où les conditions d’existence des détenus sont justes inhumaines et qui sont maintes fois dénoncées par divers organismes de protection des Droits de l’Homme.

Ce centre ne devrait pas exister si tous les problèmes sociaux n’existaient pas. Mais avec la pauvreté et les écarts sociaux très marqués au sein de la population, des milliers d’enfants et de jeunes sont condamnés à emprunter cette voie dès leur naissance. Beaucoup naissent sans acte de naissance, vivent dans la rue, ignorent leurs parents, ne connaissent pas l’école, n’ont aucune éducation.

Avec l’augmentation du taux de pauvreté, la situation n’est pas prête de s’améliorer. On a eu une parfaite illustration lors de la distribution d’une lampe solaire aux familles vulnérables dans les quartiers d’Antananarivo. Une longue queue arpente les rues de la capitale et, en parallèle, défile un cortège de voitures rutilantes.

Au moins il y a ce centre et certainement d’autres dans divers endroits pour offrir un salut et un espoir à ces enfants. Eh oui, il y en a qui ont pu réussir dans la vie grâce à ce centre de rééducation physique, mentale et spirituelle. Les enfants suivent une scolarité et passent des examens afin de leur offrir un avenir après leur passage au centre. Une perche tendue que certains enfants savent saisir pour rebondir et surmonter cette fatalité.

Sylvain Ranjalahy

Enregistrer un commentaire

Plus récente Plus ancienne