L’envol électoral

Le 13 novembre 1907, l’homme a effectué un bond majeur dans sa quête de s’affranchir des contraintes de la pesanteur en créant une distance d’un mètre et demi entre lui et le sol. L’auteur de l’exploit, Paul Cornu, a alors définitivement inscrit son nom dans l’estimé registre de l’histoire de l’aéronautique. L’appareil qui a permis cette performance, connu depuis sous le nom d’hélicoptère, est promis à un brillant avenir dont l’éclat scintille sous sa manifestation actuelle qui sillonne les cieux sinistres et controversés de la campagne électorale.

En 1907, le premier “vol” n’a fait qu’un saut de puce qui était pourtant une des étapes décisives franchies dans la poursuite infinie de l’ubiquité. L’hélicoptère, faute de donner un accès effectif à cette chimère qui veut abolir les distances, a pu au moins réduire l’importance de l’éloignement géographique en permettant aux candidats qui se sont lancés dans la course électorale de faire rapidement des kilomètres qui se dressaient comme obstacles entre les prétendants à la magistrature suprême et l’enclavement d’un nombre important de districts et villages.

Un célèbre aviateur, dont le nom a été retenu grâce surtout à son œuvre “Le Petit Prince”, a écrit que “L’essentiel est invisible pour les yeux”. Pendant longtemps, les marginalisés, ceux qui sont loin du pouvoir central, sont les grands oubliés, les laissés-pour-compte, loin des yeux et loin du cœur. L’hélicoptère a le potentiel précieux de rapprocher les deux réalités jusqu’ici en discordance et ainsi produire l’accord qui peut apporter l’harmonie. Mais le scepticisme s’incruste dans les esprits pour pourrir ces belles pensées qui sont, pour certains, bien trop naïves.

Et si le pouvoir de l’hélicoptère est seulement utilisé pour exploiter sa capacité ascensionnelle, capable de porter jusqu’aux confins du soleil du pouvoir les aspirations beaucoup moins nobles? Dans ce chaos politique qui prévaut, l’hélicoptère est un instrument bien efficace pour avoir le dessus (au sens propre et au sens figuré) sur ses adversaires qui ont aussi choisi leur stratégie.

Mais à trop persister dans cette élévation qui peut succomber aux péchés susceptibles de naître de cette déconnexion extrême avec la réalité qui assombrit la terre, se laisser porter aveuglément par une ambition démesurée pour se rapprocher encore plus du soleil peut être fatal. Icare, qui a péri dans la mer icarienne après que l’astre du jour ait fait fondre la cire qui était le liant des plumes des ailes confectionnées par son père Dédale, est un illustre prédécesseur.

Fenitra Ratefiarivony

Enregistrer un commentaire

Plus récente Plus ancienne