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| Une cheffe malgache et un chef mozambicain démontrent que l’art culinaire est une façon délicieuse d’aller au-delà des frontières. |
Durant trois jours, la jeunesse de l’océan Indien et d’Afrique ont discuté de nouvelles approches des échanges entre l’Europe et l’Afrique. Les représentants de plusieurs pays, dont Madagascar, ont cogité sur un florilège de domaines de prime abord différents, mais complémentaires.
Notre futur. C’est le thème central des cogitations initiées par l’Institut français et dont la 4e édition s’est tenue à Maurice, du 3 au 5 novembre. Durant ces trois jours, la parole a été donnée à la jeunesse de la région océan Indien et d’Afrique de l’Est, afin de répondre à une question centrale : “Comment définir de nouveaux axes de dialogues et d’échanges entre l’Afrique et l’Europe ?”.
Des jeunes et des universitaires de Madagascar, Maurice, La Réunion, Mayotte, du Kenya, de Tanzanie et de Mozambique, ainsi que ceux d’Europe se sont ainsi donné rendez-vous à l’île Maurice.
Il s’agit de la 4e édition d’un cycle de neuf forums régionaux Afrique-Europe, sur trois ans, sur le continent africain. “L’horizon par delà les frontières”, est le thème spécifique de cette 4e édition.
Dépasser les clivages, les frontières et définir des solutions communes aux défis communs sont ainsi les objectifs.
L’idée est d’édifier les bases de nouveaux axes de dialogues et d’échanges entre l’Afrique et l’Europe. “Le but est de faciliter les échanges et le dialogue entre des jeunes de différents pays, non seulement de la région océan Indien, mais également des pays du continent, afin d’aborder les défis communs et créer un lien durable, d’identifier des solutions”, explique Erol Ok, directeur général de l’Institut français, qui a fait le déplacement pour le forum de Maurice.
Afropéen
L’insularité, l’art et la culture, la connectivité, la sociabilité, sont parmi les sujets discutés à Maurice. Sur le volet culturel, la culture urbaine a été mise en avant. “C’est une autre forme d’expression. Une expression commune aux jeunes. Une autre forme de langage qui transcende les barrières de langue et à même de donner plus d'écho à leur voix et permettre un dialogue qui dépasse les frontières et les différences”, indique Muriel Piquet-Viaux, directrice de l’Institut français de Maurice.
Des questions globales comme les challenges qu’imposent le changement climatique, notamment, dans le domaine de l’habitat, la manière de faire entendre la voix des jeunes du Sud. De même pour la question de l’immigration et celle du rôle de la diaspora pour mettre en lien les différentes populations et créer l’interculturalité. Dans cette idée de partage, de mobilité et de circulation des personnes, mais aussi des cultures, des connaissances et des idées, entre en scène le concept “d’Afropéen”.
“Afropéen”, est un mot-valise qui, à la base, désigne le fait d’être une personne noire ayant grandi ou vivant en Europe. Il a ensuite été repris par le monde culturel pour parler d'échanges et de mix culturels entre l’Afrique et l’Europe. Dans cette 4e édition du forum Notre Futur, l’idée est d’appliquer le concept “d’Afropéen”, selon sa lecture dans la sphère culturelle, à l’enseignement supérieur et la recherche scientifique. Ceci afin de faciliter le partage et la circulation des idées et des connaissances, mais aussi les chercheurs et les étudiants.
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| Caylah Razanadranto, slameuse malgache, partage la scène avec Siti Amina, une chanteuse venant de Zanzibar. |
Motivés et engagés, les participants à cette 4e édition du forum Notre Futur ont eu des idées et des propositions de solution à foison. Des propositions pour réduire et casser les distances, les frontières, ou encore les barrières qu’elles soient matérielles, culturelles, ou économiques, suivant le thème de l’événement “L’horizon par delà les frontières”. Dans les discussions et les travées de l’événement, toutefois, une question s’est fréquemment posée, qu’en est-il de la concrétisation des recommandations ?
Questions à... Tsimihipa Andriamazavarivo, coordonnateur de l’ONG TOLOTSOA - «L’action est la seule issue»
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| Tsimihipa Andriamazavarivo, coordonnateur de l’ONG TOLOTSOA, argue sur la manière de faire entendre la voix de la jeunesse africaine. |
Le thème "Notre futur" veut dire quoi pour vous ?
Ce thème me renvoie surtout à cette idée d' intrication et d'interconnexion qui existe malgré la distance géographique et les frontières physiques. Il évoque aussi le fait qu'on doive aussi tenir compte de paramètres et endogènes et exogènes et donc une prise de décision plus complexe et de moins en moins évidente que ce soit pour l'individu ou pour des horizons plus vastes.
Qu'est ce qui vous motive à y prendre part ?
Obtenir des réponses à des questionnements qui s'imposent et auxquelles on tarde à apporter des réponses sans équivoques : Comment on avance ensemble si on continue ensemble et surtout dans quels termes, comment on conjugue seuls, chacun de son côté si c'est la voie que l'on convient, dans quelles mesures pourrait-on revenir sur nos choix, avec quelles marges de manœuvres. Mais une chose est sûre, il est évident qu'un changement s'annonce et on pourra ou ne pourra pas nécessairement pouvoir définir toutes ses modalités, la période que nous vivons maintenant surtout en Afrique est faite de mutations sociales qui partent de l'intérieur et principalement des jeunes sur la base de revendications et d'aspiration de renouveau qui sont maintenant la plus grande génération de jeunes que le continent africain et chaque pays aura porté.
En tant que représentant de la jeunesse malgache dans vos domaines respectifs quel plaidoyer comptez-vous porter durant ce forum ?
Ce serait surtout d'appeler la responsabilité des dirigeants et des jeunes aussi dans ce qui a été, ce qui est et ce qui sera. Les problèmes sont des choses qui sont par définition difficiles à résoudre. Et les crises sont des problèmes qu'on n'a pas résolu à temps ou pas du tout. Nos pays, notre monde a de moins en moins de problèmes et de plus en plus de crises et notre futur, celui des jeunes semble condamné à n'être fait que de crises car le passé de nos parents n'a été fait que de problèmes non solutionnés parce non solutionnés bien que mise en évidence et vu et connu. L'action est la seule issue mais il semblerait qu'elle ne viendra pas ceux et celles qui ont le pouvoir de décider mais plus de la violence et du désarroi de jeunes hommes et femmes dont la survie et donc le futur sont en jeu.
Ainsi, quelles sont vos attentes ?
Principalement, une prise de conscience de l'urgence et surtout que cette prise de conscience ne soit pas stérile et non suivie des seules actions qui s'imposent car de plus en plus évidentes et réduites en diversités. La génération qui s'engage et qui s'exprime aujourd'hui sera peut-être la dernière à vouloir dialoguer pour accorder le bénéfice du doute mais celle d'après n'aura pas d'autres choix que la violence parce que nous aurons été les derniers à résoudre les problèmes avant qu'ils n'aient disparu car se seront mué en crises que les jeunes auront le malheur d'affronter.
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| Une partie des représentants de Madagascar, issus de différents domaines, avec comme leitmotiv, construire un futur meilleur. |
Ils ont dit
Felana Andriatahina, entrepreneure en éco-construction : “La motivation et l’engagement de chacun est palpable”
J’ai particulièrement apprécié la diversité, la motivation et l’engagement des participants. Tous se sont appliqués à travailler pour dégager des recommandations et des solutions concrètes par rapport au thème de l’événement. Tous ont voulu apporter leur part à l’édifice d’un futur commun. La solidarité pour faire face aux conséquences des changements climatiques, particulièrement, nous qui sommes des îliens, m'a ravi. Surtout qu’il s’agit d’enjeux actuels et réels. Des enjeux qui motivent justement mon engagement dans l’éco-construction. Toutefois, je suis un peu restée sur ma faim. L’engouement et la motivation sont une chose, mais après, ça va donner quoi ? Je m’attend à des actions concrètes après ce forum.
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| Felana Andriatahina, entrepreneure en éco-construction, explique sa vision du quartier idéal à Antananarivo. |
Simériun, artiste urbain, grapheur : “L’art permet de s’exprimer plus librement”
L’art est une manière plus libre et plus universelle de s’exprimer. Il y a moins de restrictions, moins de règles. C’est plus accessible et multidisciplinaire, plus spontané aussi. C’est d’autant plus le cas dans l’art urbain. C’est un médium démocratique. Il exprime vraiment le thème de ce forum. Avec mes tags et les graffitis, je peux matérialiser mon imaginaire. M’exprimer de plusieurs façons. Je peux communiquer en transcendant les barrières et les frontières. Il n’y a pas de règle de langue ou de langage à laquelle il faut s’en tenir. Même en parlant différentes langues, ces dessins parlent à tout le monde.
Dina Valisoa, du pôle jeu vidéo Projet ONY et Game Designer chez Red Raketa Studio : “C’est une possibilité d’ouverture sur le monde”
Le thème du forum permet une réflexion sur les réalités actuelles afin de se questionner sur les perspectives possibles pour un futur commun Afrique - Europe. Pour, c’est une opportunité d’ouverture sur le monde et d’avoir une plus large connaissance des courants de pensées actuels. D’aller au-delà des frontières justement, en tant que ressortissante d’un pays insulaire. C’est une occasion de plaider pour l’inclusion des industries créatives et culturelles parmi les vecteurs d’un futur plus humain et viable. Le projet ONY est une association qui a pour but de développer et valoriser des projets dans la musique, le cinéma, l’animation et les jeux vidéo à Madagascar. J’attend de ce forum qu’il ouvre ainsi des dialogues, des perspectives et des opportunités afin de mener à bien la construction d’un meilleur futur à Madagascar, que ce soit au niveau de l'engagement citoyen, ou au niveau industries créatives et culturelles.
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| “Le jeu des frontières”, un jeu de société pour faciliter la compréhension des enjeux des relations internationales et de la gouvernance d’un Etat. |
Se faire entendre coûte que coûte
Un des points marquants du forum de Maurice est le débat sur le sous-thème “Jeunes du Sud : Faire entendre nos voix”. Des jeunes activistes dans différents domaines allant de la défense des droits humains, la protection de l’environnement, la revendication des droits des personnes LGBTQIA+, le droit des femmes, ou encore des défenseurs des droits communautaires ont fait face au public. Une ligne de conduite est ressortie des discussions, “se faire entendre coûte que coûte”.
Surpasser les barrières sociales et culturelles par une prise de conscience, par les jeunes, de sa majorité. Transcender le manque de moyen, de mobilité ou encore la distance et les frontières par la technologie. Se faire entendre, non seulement, par les mots, mais aussi par les actes, chacun à son niveau par le biais d’innovations, une autre “voix”, mise en avant durant ce débat.
Garry Ranaivoson