À Madagascar, l’immobilier et l’hôtellerie figurent désormais parmi les secteurs surveillés de près par le Service de renseignements financiers (Samifin). Faute de signalements formels à ce jour, les autorités appellent néanmoins à la vigilance.
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Mamitiana Rajaonarison appelle à la vigilance face aux risques de blanchiment dans les secteurs de l’immobilier et de l’hôtellerie. |
Sous des apparences légales, les investissements dans l’immobilier et l’hôtellerie peuvent masquer des flux financiers d’origine illicite. Un scénario évoqué par Mamitiana Rajaonarison, directeur général du Samifin, lors d’un événement organisé hier au ministère des Affaires étrangères à Anosy. Il a rappelé que les détenteurs de capitaux d’origine douteuse peuvent préférer injecter leurs fonds dans des projets immobiliers ou hôteliers, plutôt que de passer par le système bancaire classique.
« Certains établissements hôteliers peuvent ne pas avoir de clients. Malgré tout, leur propriétaire effectue une déclaration de revenus auprès de l’administration fiscale. Pourtant, les sommes déclarées comme recettes de l’établissement peuvent provenir d’activités illégales », a-t-il expliqué. Cette méthode permettrait ainsi de légitimer des fonds, sans nécessairement générer une activité réelle.
Pour autant, le directeur du Samifin appelle à la nuance : tous les établissements du secteur ne sont pas à considérer comme suspects. En l’absence de déclarations d’opérations douteuses émanant des entités assujetties, notamment les banques, les compagnies d’assurances, les agences immobilières, les notaires, avocats ou huissiers, aucune affirmation ne peut être étayée.
Jusqu’ici, aucune déclaration de ce type n’a été enregistrée par le Samifin concernant spécifiquement l’immobilier et l’hôtellerie. Mais l’institution reste en alerte, renforçant sa coopération avec les professionnels soumis à déclaration obligatoire.
Les communes appelées à participer à la vigilance. Le Samifin entend également élargir son dispositif de surveillance en impliquant les autorités locales, en particulier les communes. Une collaboration pilote a été initiée avec la Commune urbaine d’Antananarivo (CUA). L’objectif : intégrer un filtre d’évaluation financière dès le stade des permis de construire. « La commune devrait ainsi signaler au Samifin tout dossier de demande de permis jugé douteux, par exemple lorsqu’un projet de construction dépasse visiblement les capacités financières déclarées du demandeur », a indiqué le directeur.
Des signaux faibles, mais des investigations en cours
Outre les signalements réglementaires, le Samifin s’appuie sur d’autres canaux : presse, acteurs privés, et administration publique. Des organismes comme la direction générale des douanes ou la direction générale des impôts ont d’ailleurs l’obligation légale de remonter toute anomalie financière suspecte.Des enquêtes ont ainsi été ouvertes sur la base d’informations croisées, dont certaines concernent des acquisitions immobilières à la provenance trouble.
Dans son rapport annuel 2024, l’Agence de recouvrement des avoirs illicites (Arai) avait déjà soulevé la question. Elle y documente la confiscation de 38 propriétés immobilières représentant 494 hectares, pour une valeur jugée inestimable. Ces biens seraient liés à des individus soupçonnés, notamment, de détournement de fonds publics.
Malgré l’absence de preuves formelles dans l’immédiat, les institutions financières redoublent de vigilance. L’immobilier et l’hôtellerie, en raison de leur porosité aux flux de capitaux opaques, restent dans le collimateur des services de lutte contre le blanchiment.
Tsilaviny Randriamanga
Au secours la censure avec la vérité qui fâche !
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