GEL DES AVOIRS - Les détenteurs d’argent sale évitent les banques

Rado Rajhonson assure la fonction de DG par intérim de l’ARAI.

Craignant la saisie de leurs avoirs, de nombreux détenteurs d’argent illicite évitent les banques. Cela rend plus difficile la traque des flux financiers douteux, selon l’ARAI.

La montée en puissance des dispositifs de lutte contre le blanchiment d’argent et le renforcement des contrôles bancaires poussent désormais les détenteurs d’avoirs illicites à repenser leurs stratégies de dissimulation. En effet, de plus en plus de personnes soupçonnées dans des affaires de biens mal acquis ne déposent plus leur argent en banque, selon le directeur général par intérim de l’Agence de recouvrement des avoirs illicites (ARAI), Rado Rajhonson, lors de la présentation du rapport d’activité annuel de cet organisme, hier à Imerimanjaka. En témoigne le montant des comptes gelés, en nette diminution en 2024 par rapport à l’année précédente. Si en 2023, l’ARAI a pu geler près de 6 milliards d’ariary, ce montant est descendu à 290 millions d’ariary en 2024.

« Comme l’Association professionnelle des banques fournit périodiquement des renseignements à l’ARAI, ceux qui détiennent de l’argent sale évitent de déposer leur argent en banque pour échapper au gel », a expliqué Rado Rajhonson.

Pour contourner le contrôle, les détenteurs d’argent sale choisissent le secteur de l’investissement. C’est notamment le cas de l’immobilier, qui fait désormais partie des secteurs où est investi l’argent illicite. Si en 2023 aucune propriété immobilière n’avait été saisie, en 2024, l’agence a confisqué trente-huit propriétés immobilières, d’une superficie totale de 494 hectares, pour une valeur inestimable.

« Notre objectif est désormais d’identifier les secteurs où est investi l’argent acquis frauduleusement », poursuit le DG par intérim de l’ARAI.

Pour l’heure, ce sont les opérateurs du secteur privé qui sont les plus concernés par le gel de comptes bancaires et la confiscation de biens. Ils représentent 60 % des personnes dont les avoirs ont été confisqués. D’autres personnes, en dehors de cette catégorie, ont également fait l’objet de décisions de gel et de confiscation, d’après les mêmes explications.

Vide juridique

Toutes les personnes poursuivies dans des affaires de corruption, de détournement, de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme font automatiquement l’objet d’un gel et d’une confiscation de leurs avoirs, et ce, quelle que soit leur fonction ou leur statut.

Le cas des ministres ou autres hautes personnalités, dont les dossiers sont traités par la Haute cour de justice (HCJ), pose toutefois problème. À en croire toujours Rado Rajhonson, la loi organique n° 2014-043 relative à la HCJ n’a pas encore prévu le recouvrement des avoirs illicites, étant donné que la disposition y afférente n’est apparue que plusieurs années plus tard.

De ce fait, cette juridiction ne dispose pas encore de chambre de saisie et de confiscation des avoirs. Par conséquent, les personnes poursuivies pour corruption, détournement ou blanchiment de capitaux devant la HCJ ne peuvent pas encore faire l’objet d’une saisie ni d’une confiscation de leurs biens. Il en va de même pour ceux poursuivis par la Chaîne spéciale de lutte contre le trafic de bois de rose ou de bois précieux. Une modification des textes est ainsi jugée nécessaire afin de remédier à cette situation.

Tsilaviny Randriamanga

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