Le juste milieu

Il y a quinze ans, le 9 janvier 2010, «tournait le dos» le Cardinal Razafindratandra. Cette Chronique date de cette époque. Certaines actualisations peuvent s’avérer nécessaires. Entre autres, le concept de «Palestine» dans la définition ci-dessous, que j’avais reprise du Larousse 1999, totalement différente de celle du Larousse 1935, qui ne cite pas une seule fois le mot de «Palestine» en parlant de Jésus. Se remémorer simplement le Cardinal Razafindratandra fait passer en revue l’histoire contemporaine des quinze dernières années. Quelques relativisations de jugements trop abrupts de l’époque peuvent également être salutaires. Et une leçon politique, qui est déjà une philosophie de vie : on ne restaure pas une autonomie, quelque peu compromise, par un excès de zèle contraire. Ce qu’il faut au pendule, ce n’est pas d’osciller d’un extrême à l’autre, mais de trouver son équilibre, au juste milieu. 

(début de citation)

Je suis de trop loin son cadet et je fis sa connaissance trop tardivement pour appeler le Cardinal Armand Gaëtan Razafindratandra autrement que par son titre ou lui donner, trop cérémonieusement, du « Eminence », sinon en détaillant exhaustivement ses prénoms. L’homme était un missionnaire à l’ancienne, prélat de son Église, prosélyte sans complexe. « Si je pouvais, avouait-il sans ambages, je ferais de Madagascar une république chrétienne ». J’ai toujours oublié de lui demander si son œcuménisme ne concernait que cette communauté-là, ceux des croyants en « Jésus, Juif de Palestine, fondateur du christianisme ». 

Il n’a jamais renié ses études chez les Jésuites du Collège Saint-Michel, mais il n’avait pas lui-même rejoint la Compagnie. Lors de la célébration du 450ème anniversaire de la mort d’Ignace de Loyola, fondateur de la Compagnie des Jésuites, le Cardinal s’était passablement énervé que les pères de Saint-Michel revendiquent l’événement en excluant implicitement les Catholiques. Faut-il d’ailleurs écrire « autres Catholiques » puisque les Jésuites ont toujours cultivé une certaine indépendance d’esprit ?

L’unanimité de façade qui entoura ses obsèques et ses funérailles n’exclut pas les dissensions prudemment tues ou savamment aplanies. Par exemple, son amitié ostensible pour Marc Ravalomanana, tombeur, en 2002, d’un autre Ancien de Saint-Michel, Didier Ratsiraka. Et quand, au dernier 14 juillet, l’ambassadeur de France avait réfléchi tout haut à certaines questions que personne n’avait osé poser à Marc Ravalomanana, le Cardinal Razafindratandra faisait partie de ce proche entourage qui a oublié de mettre le holà tant qu’il en était encore temps. 

Ce n’est pas insulter la mémoire d’un Grand Monsieur que de rendre hommage à la véracité des faits. Aussi, quand, au 450ème anniversaire d’Andriantompokoindrindra, que fallait-il penser du Cardinal Razafindratandra précédant Marc Ravalomanana auquel, dans la foulée des discours, il sera donné du 

« Ny Andriana » par les habituels orateurs laudateurs qui se murent dans un mutisme assourdissant depuis le 17 mars 2009 ? 

Bien sûr, tous ceux qui ont pu le côtoyer ont eu le sentiment de fréquenter un homme exceptionnel, tranchant sur l’anonymat de l’Humanité moyenne. Il me considérait avec un courroux amusé quand j’osai évoquer ma demande de radiation des registres du baptême, adressée quelques seize années auparavant à son prédécesseur. Parmi toutes les photos de retrouvailles des Anciens, cette silhouette solitaire suçotant sa pipe, un curé pas encore «Monseigneur», n’allait pas être n’importe qui. 

Nasolo-Valiavo Andriamihaja

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