Terre à terre

Il était temps. Le président de la République a mis un holà hier sur une filière qui fait florès. Le vol de terrain. Eh oui, s’il est un domaine où la corruption bat son plein, c’est incontestablement les questions foncières. C’est tout un réseau qu’il va falloir démanteler, imbriquant le service des domaines, la justice, les autorités communales… C’est juste ahurissant.

Des prétendus propriétaires détiennent tous les papiers nécessaires pour justifier l’appartenance des terrains à eux, de même que les vrais propriétaires dont la tombe familiale s’y trouve. La décision du tribunal d’appel attribue pourtant la propriété aux spoliateurs. Une histoire comme celle-là, on en entend tous les jours. Une issue dramatique qui finit par la démolition des bâtisses érigées sur la propriété ou le scellage de la parcelle.

C’est le cas d’un terrain où se trouve un tombeau familial à Ambolokandrina, scellé par la CUA il y a quelques semaines. Le tombeau est la propriété commune de deux familles dont les aïeux y étaient enterrés. L’une des familles a exhumé les leurs pour les mettre ailleurs. Elle a ensuite vraisemblablement vendu le terrain. Ce qui n’est pas l’avis de l’autre famille, mais des formalités de vente ont déjà été faites, et un huissier, un géomètre et des membres du fokontany étaient venus pour délimiter le terrain et le clôturer. L’autre famille s’y est formellement opposée. L’affaire est allée au tribunal, mais le dossier a, semble-t-il, disparu. Une deuxième plainte a été déposée, mais aucune décision n’a été prise. Entretemps, la famille plaignante a entrepris des travaux de rénovation du tombeau familial suite à des fissures, alors que le litige a empêché certains membres de la famille décédés d’y être enterrés. Mais, à la surprise générale, des autorités communales, accompagnées des éléments de la Police nationale et de la Police communale, sont venues exécuter un arrêté communal du 26 juillet ordonnant l’arrêt des travaux et le scellage de l’endroit.

On en arrive ainsi à s’en prendre à un terrain où se trouve le plus sacré des patrimoines dans la culture malgache, en l’occurrence le caveau ou le tombeau familial, pour pouvoir le vendre. Les bornes sont visiblement dépassées. La famille attend la suite de cette affaire dans l’angoisse et l’inquiétude d’être dépossédée de son bien le plus précieux.

Ce n’est qu’un exemple de spoliation foncière. Le fléau mine tout le pays. De grosses sommes d’argent sont en jeu pour influencer les décisions de justice et pour corrompre diverses autorités à leur niveau. D’autres cas encore plus graves existent, mais ne sont pas signalés pour diverses raisons. Il fallait juste y mettre un terme.

Sylvain Ranjalahy

Enregistrer un commentaire

Plus récente Plus ancienne