Des années d’histoire, dont l’ensemble s’est maintes fois présenté comme une roue où les mêmes infortunes ne cessent de se répéter, n’ont pas suffi à faire assimiler une leçon que l’être humain, pour son bien, aurait dû comprendre : celle professée par la fourmi à la cigale. Hier, aujourd’hui et sûrement demain, un commandement est toujours inscrit sur la table du code de la route qui mène à la sortie de cette ronde infernale : “le futur tu ne perdras pas de vue”.
“La Cigale, ayant chanté/Tout l’été,/Se trouva fort dépourvue/Quand la bise fut venue.” Ainsi s’ouvrit le récit servi par la voix poétique de Jean de La Fontaine, un choc auquel devraient être habitués ceux qui s’épuisent dans les excès du présent et, par ricochet, épuisent les ressources vitales. Quand toute l’énergie est dépensée dans l’abus des plaisirs éphémères incapables d’enrichir l’esprit et le cerveau, l’avenir ne peut que prendre la forme d’une chute douloureuse. Et se relever ne peut que passer par l’application du précepte qu’on peut tirer de la sagesse de la fourmi.
“Elle alla crier famine/chez la Fourmi sa voisine,/la priant de lui prêter/quelque grain pour subsister.” Une autre situation familière, un extrait qui semble aussi raconter une histoire qui n’est pas si loin de nous. Après avoir longtemps endormi la conscience dans les délices et les chants apparemment enivrants des plaisirs passagers et destructeurs, la facture est plus que salée quand on doit payer, entre autres, le prix des heures où les réseaux sociaux l’ont emporté sur les besoins intellectuels, ou quand les massacres environnementaux, pour des fugaces instants de gloire, ont ensuite impacté les besoins physiologiques.
L’insouciance de la cigale se retrouve aujourd’hui dans les actes inconscients qu’on inflige à la nature pour servir les besoins primaires. Des pulsions dans lesquelles l’avenir est exclu de l’équation. Un futur au-dessus duquel a été suspendue une épée de Damoclès qui a la capacité d’exacerber les crises environnementales et socio-économiques. Un péril qui a un terrain favorable quand s’érodent l’éducation et l’instruction, armes que doivent privilégier ceux qui se réclament de la fourmi, car en formant les jeunes correctement, elles leur offrent un avenir éclairé par la lumière du savoir.
“— Vous chantiez ? J’en suis fort aise./Eh bien ! Dansez maintenant.” fut la dernière réplique cinglante qu’on a retenue de la sagesse de la fourmi. Et aujourd’hui, les années d’inconscience et d’insouciance forcent à exécuter, quotidiennement, une danse brûlante sur des charbons ardents.
Fenitra Ratefiarivony