Foire, Salon, Vitrine : les Tananariviens apprécient l’exercice. Seul, en couple, avec la famille. Par ici la sortie du weekend. Ce Salon ITM-IHM 2024 (selon que l’on soit tantôt Tourism ou plutôt Handicraf) a été pensé pour que tous les stands soient au moins arpentés du regard. Le labyrinthe avance de A à Z, en ne laissant sauter aucune consonne ni voyelle intermédiaire. Le visiteur, poussé de lui-même, toujours vers l’avant, s’aperçoit trop tard qu’il est inutile de rebrousser chemin. Là-bas seulement, l’Exit.
Bémol pour l’animation. Les décibels tonitruants n’ont manifestement toujours pas convaincu de leur nocivité : les stands les plus proches du podium des musiciens peuvent témoigner qu’on ne s’y entendait pas discuter. Sans parler de l’inconfort du tapage sonore continuel pour les préposés.
Le bruit n’est définitivement pas chic. Or, j’avais cru comprendre une volonté de monter en gamme dans la vision globale de cet ITM-IHM 2024. J’avais pu visiter le Salon de l’Auto porte de Versailles ou un Apple Expo à l’époque de la renaissance du Macintosh : le fonds musical se fait oublier ; la signature audio, d’ailleurs soigneusement choisie, accompagne sans agresser. Il faut espérer un futur Salon du Tourisme et/ou de l’Artisanat qui marie cette élégante discrétion avec le désir manifeste d’une certaine classe.
Dans ce parcours en jeu de l’oie, le Food Court offre une halte salutaire, et suffisamment diversifiée : snacking, sakafo gasy, bistrot de L’Express de Madagascar, cuisine chinoise, restaurant indien, saveurs de Côte d’Ivoire (pays invité d’honneur), choucroute du Chef Johary… Manquait à l’appel la bière nationale dont une version spéciale Export aurait pourtant participé avantageusement à l’embourgeoisement général. La 1664 et ses cousines Lager savent se faire Premium pour devenir fréquentables et ne pas s’encanailler.
J’ai traversé rapidement les stands corporate pour faire cap sur les « Village Madagascar» et «Village des Régions ».
Bien sûr, venir à Madagascar pour ses fabuleux paysages, son extraordinaire faune, sa non moins formidable flore. Sauf que la compagnie aérienne nationale est en panne tandis que les routes, déjà trop longues en bon état, s’embourbent chaque jour toujours plus dans des ornières devenues légendaires sur Facebook. Dans ces conditions, le « Tourisme national » relève du discours incantatoire.
Heureusement, j’étais venu pour l’Artisanat qui n’oblige pas à se déplacer en off-road puisqu’il fait le déplacement marketing. J’y ai rencontré de petits chefs d’œuvre qui nous changent favorablement des linéaires interminables d’exactement la même chose. Un malencontreux copier-coller où les uns et les autres se cannibalisent sans valeur ajoutée ni pour la destination, ni la profession, ni les métiers.
Bois, pierre, fibre végétale, cuir, soie, coton, pharmacopée traditionnelle 2.0, l’aluminium national… Les grandes rubriques sont connues. Je singularise l’apparition du « cuir végétal » avec les guillemets de rigueur. Ici marié au raphia (un nom bien malgache comme en attestent les plus vieux dictionnaires), le « PU » doit s’inventer un autre nom par respect du « genuine leather ». C’est comme pour la boucherie et la charcuterie : c’est une absurdité, en dépit du bon sens multi-millénaire, que de parler de « viande végétarienne ». Être vegan, ne dispense pas de respecter la viande naturellement authentique.
J’ai également pu admirer les beaux objets, tellement futiles mais c’est justement leur beauté, de « D Meuble et Archi ». Plus loin, et bien que je la connaisse depuis une éternité, Dorel a su me surprendre avec ses coussins cuir-lamba (qui ne déparent pas à la foire de Paris, dit-elle). Encore plus loin, comment ne pas saluer ces sacs cousus avec des vêtements de récupération dont un bouton épargné de jean ferme malicieusement une vraie poche…
J’ai certainement oublié d’autres créatifs talentueux. On aura l’occasion de leur dédier une « Chronique libre de publicité ».
Nasolo-Valiavo Andriamihaja