Un mal pour un bien. Vexée par la demande de rappel de son ambassadeur Isabelle Delattre-Burger par l’État au mois d’avril suite à ses déclarations sur la castration chirurgicale des violeurs et le non-respect des normes dans la construction d’infrastructures, l’Union européenne aurait mis en stand-by plusieurs projets de coopération. Deux contrats de 336 milliards ariary attendant validation et concernant la formation professionnelle et la biodiversité sont en cause.
L’Union européenne est engagée à hauteur de 2265,6 milliards ariary dans des projets de développement dont 1094,4 milliards ariary dans les infrastructures et les énergies, 72 milliards ariary pour le secteur privé et 748,8 milliards ariary pour le développement rural. Autrement dit, des sommes colossales sur lesquelles on ne peut pas cracher.
Mais au-delà de toute question d’ingérence et de souveraineté, il faut voir les choses avec objectif. À y voir de plus près, on se demande si toutes ces sommes servent à quelque chose dans le développement. À l’image des subventions ou des prêts d’autres bailleurs de fonds, l’impact sur le développement est plus que discutable. À preuve, cette pauvreté qui prend davantage d’ampleur au fil des années. Des infrastructures dans un état lamentable, le monde rural reste à l’époque des Cro-Magnon.
Qu’est-ce qu’on a gagné en presque un demi-siècle de coopération avec l’Union européenne ? On a toujours parlé des projets routiers du Fonds européen de développement dont c’est la 13e édition actuellement. La construction des routes nationales dépend en grande partie du projet FED mais il suffit de voir l’état des réseaux routiers pour se faire une idée de l’efficacité de ce projet.
Il en va de même pour l’Accord de Coopération Économique établissant une zone de libre- échange entre l’UE et les pays ACP. À l’arrivée, il y a plus de produits importés dans les pays ACP causant une baisse des prix des produits locaux et une fragilisation des secteurs productifs nationaux.
Pire, certains accords comme celui de la pêche a été pendant longtemps un véritable marché des dupes en défaveur de Madagascar. Les autorités ont heureusement fini par réaliser la fumisterie et ont demandé à reconsidérer l’accord. Un long bras de fer a eu lieu.
Justement, bien que le revenu tiré des ressources halieutiques pourrait combler le vide laissé par l’Union européenne. Sans parler des 2640 milliards ariary rapportés par l’exportation de la vanille, l’exportation de nickel, de girofle, des entreprises franches, du tourisme…
Et d’ailleurs, on ne ressent pas trop cette suspension des subsides des bailleurs de fonds aussi bien ceux de l’Union européenne que ceux du Fonds Monétaire International à en juger les infrastructures inaugurées ces derniers temps en l’occurrence des universités, des unités industrielles, des hôpitaux, des ponts, des hôtels de finances, des bureaux administratifs …
Certes, l’état des routes nationales est déplorable, l’électricité est rationnée, l’eau a totalement disparu presque dans tout Tana, mais il faut accepter qu’il y a des réalisations. Et le plus important c’est de savoir que nous pouvons construire sans être obligés de s’endetter. Tout est ainsi question de priorisation et de bonne gestion. C’est la seule garantie contre une eurosion de nos ressources.
Sylvain Ranjalahy