Code barré

La Commune urbaine d’Antananarivo serre la vis. Pour lutter contre l’insalubrité de la ville, l’équipe du nouveau PDS entend appliquer au pied de la lettre les termes du Code municipal d’hygiène. Une initiative courageuse et salutaire pour tenter d’extirper la capitale de la profondeur du classement des villes les plus sales au monde. C’est bien de vouloir faire respecter la discipline dans une ville où l’anarchie règne en maître depuis quelques années. Il est grand temps de remettre les uns et les autres dans le droit chemin. Mais c’est une œuvre de longue haleine, un défi immense qu’on ne gagnera pas avec des effets d’annonce, des velléités sporadiques de rigueur.

Antananarivo a plus que jamais besoin d’un homme de poigne pour redresser une situation indescriptible. Il faut saluer le courage et la volonté de ceux qui continuent d’y croire et qui osent s’engager dans cette aventure dont l’issue est complètement aléatoire. S’il suffisait d’annoncer l’application stricto sensu d’un code, il y a longtemps qu’on ressemblerait à Kigali ou aux autres villes africaines dont la propreté ne donne aucune chance de survie aux mouches et aux autres bestioles vivant de la crasse. Ç’aurait été trop facile. Quand on voit que les nouvelles toilettes publiques installées par la CUA un peu partout dans la ville n’ont qu’un faible taux d’utilisation, on réalise combien le parti est compliqué.

Antananarivo est aujourd’hui une ville occupée à 80 % par des migrants, progénitures de l’exode rural, et à 80 % d’anciens ruraux dont le niveau d’étude et d’instruction laisse à désirer. Ils ont du mal à vivre en milieu urbain et continuent à fonctionner avec leur mode de vie et leurs habitudes. Élever du bétail en plein centre-ville est devenu monnaie courante alors que jadis on n’avait pas le droit d’élever ni volaille ni animaux de compagnie. Une image surréaliste qui illustre les efforts à faire pour redonner à la capitale son lustre.

Sanctionner les gens qui n’ont pas de toilette chez eux paraît déplacé étant donné que la plupart de la population manque de choses plus importantes. C’est d’autant plus inopportun que la plupart de ceux qui n’ont pas de toilettes vivent dans des constructions illicites où rien n’est exigé et qu’aucune autorité ne peut exiger quoi que ce soit.

Tout aurait dû être fait en amont, sans quoi les sanctions ne seront pas d’un grand recours. Redonner à Antananarivo ses lettres de noblesse passera peut-être ou sûrement par des actes ignobles, impopulaires voire dictatoriaux. Il faudra un Rambo en puissance pour le faire. Il faut plutôt amputer s’il le faut au lieu d’utiliser un placebo pour soigner une gangrène.

Sylvain Ranjalahy

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