Faire passer la part du secteur industriel au PIB de 15% aujourd'hui à 30% en 2040 |
Madagascar s’efforce de placer son secteur industriel parmi les principaux moteurs de la croissance de son PIB. Un challenge de taille car la valeur ajoutée manufacturière par habitant est toujours de moins de 100 USD et la croissance annuelle de la valeur ajoutée manufacturière par habitant tourne autour de 2,5%.
Le secteur industriel ne contribue que pour 16,3% du PIB national malgache, contre 41,5% pour la moyenne africaine. Les filières alimentaire et énergétique représentent 52% du PIB industriel. Le tissu productif du pays est encore particulièrement restreint. Raison pour laquelle le ministère de l’Industrialisation, du commerce et de la consommation (MICC) a décidé d’initier plusieurs réformes et programmes pour muscler et pérenniser la croissance industrielle du pays. Une politique favorablement accueillie par les acteurs du secteur privé.
À noter que ces dernières années, le secteur malgache de la transformation a surtout tiré une grande partie de sa valeur ajoutée des activités des entreprises franches industrielles, spécialisées, notamment, dans les produits textiles et les huiles essentielles, et dont le poids ne représente jusqu’ici que moins de 5% du PIB. Et les analystes s’accordent à rappeler que l’industrialisation à grande échelle est un passage incontournable dans tout processus de développement et, particulièrement, pour acter l’émergence économique de Madagascar.
Pour changer la donne, la Grande île dispose de ressources variées susceptibles d’être transformées pour générer des gains économiques importants et contribuer directement à l’accroissement des revenus, des emplois et des recettes fiscales. « Pour tirer bénéfice de ces avantages, le pays doit absolument faire sa révolution industrielle en boostant l’entreprenariat et l’innovation », souligne le
ministère. Il est temps, alors, d’en finir avec un secteur industriel qui accuse une faible transformation et une répartition inéquitable entre les régions.
Impulser des dynamiques de développement économique focalisées sur la valorisation de potentialités des territoires est le nouveau défi lancé par les autorités à travers le Pacte d’industrialisation. Dans ce cadre, le MICC compte redimensionner les actions sur le terrain comme le déploiement des zones pépinières industrielles. Ce concept consiste à mettre en place au niveau local des espaces propices aux activités génératrices de revenus et au développement de l’entreprise.
« Pour donner un saut qualitatif aux conditions de vie dans les campagnes et acter le véritable développement rural par la transformation des ressources locales, les responsables publics sont conscients qu’il faudra surmonter un certain nombre de blocages comme la propriété foncière, les procédures administratives ou le manque de valorisation des potentialités locales. Mais nous progressons », soutient le MICC qui vient d’inaugurer de nouvelles unités de production d’huile d’arachide à Ankadinondry Sakay et Analavory, en présence du ministre Edgard Razafindravahy.
Le membre du gouvernement qui a profité de cette occasion pour rappeler que par le biais de la politique de développement de l’industrialisation de Madagascar et du programme de renforcement de l’autosuffisance alimentaire, le pays s’engage dans une optique de valorisation des forces vives régionales à la base. Il s’agit, a-t-il poursuivi, de développer des infrastructures industrielles locales pour promouvoir l’entrepreneuriat sur l’ensemble du territoire.
Capitaliser sur les atouts
Les interventions publiques visent ainsi le développement des entreprises, des opérateurs locaux par la promotion des activités créatrices de valeurs ajoutées et sources de revenus stables et décents aux producteurs (coopératives et groupements, PME/PMI) ainsi des communautés locales, entre autres, celles qui œuvrent dans l’essor de la population locale et particulièrement des femmes et des jeunes.
Le ministère s’engage également à octroyer des matériels industriels et de transformation tout en assurant des modules de formation pour renforcer les capacités techniques, technologiques et managériales aux structures bénéficiaires afin d’assurer la croissance de leurs capacités de production au niveau local.
Madagascar veut notamment accélérer le développement du programme ODOF (One District, One Factory) et des Zones Pépinières Industrielles qui permettront de capitaliser sur les atouts déjà identifiés, de développer des chaines de valeur locales, et attirer des investisseurs de divers horizons. Il a été souligné que la politique mise en œuvre actuellement acte l’industrialisation régionale comme cela est visible au Ghana, par exemple, afin que le développement industriel profite à tous.
C’est à travers cette vision que la création du Fonds National de Développement Industriel (FNDI) a été lancée pour « apporter une aide financière aux petites unités de production tout en les accompagnant pour leur intégration dans les chaînes de valeur industrielle ». On note également une bonne volonté des partenaires techniques et financiers de jouer le jeu.
Selon la Banque Africaine de Développement (BAD), partie prenante de premier plan dans le programme d’industrialisation du pays, les principaux bénéficiaires des actions des PTF sont l’État, à travers notamment le renforcement des capacités institutionnelles des structures en charge du développement industriel, les entreprises qui bénéficieront d’un cadre institutionnel plus favorable à leur expansion, les femmes et les jeunes entrepreneurs qui seront soutenus activement pour doper la création d’emplois décents et améliorer la qualité de vie des populations.
À noter que l’agence d’exécution du projet de la BAD est le MICC qui, dans le cadre de l’accord signé avec le bailleur de fonds, aura à concrétiser le souhait du gouvernement d’ accélérer la reprise économique « avec un nouveau plan national de développement qui met l’accent sur l’industrialisation ».
Les autorités entendent dorénavant mettre en avant le développement industriel comme moteur du plan de relance économique. Rappelons que Madagascar enregistre un déficit commercial important, près de deux milliards USD, soit 15% du PIB de manière récurrente, pour les produits manufacturés. Mais selon un membre du Syndicat des Industries de Madagascar (SIM), booster la croissance industrielle nécessite aussi des infrastructures routières fiables et un secteur énergétique performant. D’où le nouvel appel du patronat et des groupements professionnels en faveur d’un démarrage rapide des projets hydroélectriques.
Plusieurs nouvelles unités industrielles sont installées dans les districts |
Des centaines d’unités à lancer
Si l’on se réfère aux objectifs d’installer les petites et moyennes industries au niveau des Districts, il en ressort que dans les prochaines années, plusieurs centaines d’unités industrielles de différentes tailles sortiront de terre et redimensionneront significativement le tissu industriel sur l’ensemble du territoire.
Selon le MICC, divers sites de production vont voir le jour primordialement dans des zones desservies par des infrastructures énergétiques et de distribution d’eau. Ce paramètre est indispensable pour permettre aux exploitations de tourner efficacement. Pour ce faire, des démarches seront entreprises avec les autorités compétentes pour assurer le raccordement des projets industriels aux réseaux électriques et assurer l’accès à des points d’eau et la mobilisation efficiente de l’eau afin de sécuriser l’approvisionnement.
Le MICC projette, en outre, de développer des infrastructures innovantes car les espaces rassemblant les unités industrielles ne sont pas prévus pour être seulement de simples zones de transformation mais des zones de convergence et de combinaison productive originale entre tous les acteurs des chaines de valeurs inclusifs qui vont y être exploités.
Rappelons, par ailleurs, que du 27 novembre au 1er décembre derniers, lors de la 20e assemblée de l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel, Madagascar a fait part des avancées qu’il a réalisées en termes de développement de ses industries, à court et à long termes. « Pour respirer à pleins poumons l’air du développement industriel, Madagascar dispose de sa conception ainsi que des objectifs bien précis pour réaliser avec brio sa politique industrielle», a indiqué le ministère.
Pour ce faire, la Grande île, à travers son ministère de l’Industrialisation, du commerce et de la consommation, a élaboré des projets à court et à long termes, adaptés aux réalités du pays et aux aspirations de grandeur industrielle, « parfaitement réalisables, moyennant l’utilisation à bon escient du potentiel des ressources naturelles du pays ». C’est ce qui a été mis en évidence par Edgard Razafindravahy à la tribune de l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel (ONUDI).
Pour le membre du gouvernement, les objectifs du pays en termes de développement industriel sont clairs. « À l’instar de nombreux pays, Madagascar veut faire de l’industrialisation un de ses principaux moteurs de développement, fort de ses immenses ressources naturelles ».
Nonobstant ses multiples atouts naturels et humains, la Grande île doit faire face à plusieurs défis de taille, car pour accélérer son développement industriel, Madagascar doit, entre autres, développer lui-même ses industries mais aussi, sur un autre front, faire face au problème du pouvoir d’achat. « Chez nous, le constat est simple, nous ne produisons pas assez et nous importons trop. Mais nous avons une contrainte de taille : le pouvoir d’achat de notre population », regrette le ministre de l’Industrialisation, avant de lancer « Notre défi est donc double, industrialiser tout en étant capable de produire à des prix abordables pour notre population ».
INDUSTRIALISATION LOCALE
Le Sud joue sa carte
Madagascar dispose de nombreuses matières à transformer |
Le ministre Edgard Razafindravahy, lors d’un déplacement de travail effectué dans cette partie de l’île, a déclaré : « Cette usine de sucrerie industrielle servira de pilote pour les autres implantations de ce genre dans toute l’île. Ce genre d’initiative est essentiel pour insuffler le rythme de développement accéléré et durable dans le Sud et pour mettre un terme au phénomène des matières premières agricoles perdues ».
À savoir que le projet de sucrerie dans la Région Anosy est aussi une prise de responsabilité suite à la sollicitation d’un maire d’une commune rurale située dans le district de Tolagnaro, qui a insisté sur les difficultés auxquelles font face les populations de cette localité alors qu’elles sont disposées à apporter leur contribution au développement local.
L’initiative a été saluée par la coopérative de planteurs de canne à sucre qui peuvent désormais préparer la commercialisation de leurs produits et réfléchir aux moyens pour accroitre la production. Madame Vololo, entrepreneure en charge de l'usine, a déclaré, pour sa part, que cette volonté de transformer le tissu économique du District, sous l’impulsion du président de la République et du ministre en charge de l’Industrie, donne des ailes aux producteurs et aux coopératives paysannes qui ne souhaitent que la valorisation des richesses locales dont disposent les différentes communes.
VERBATIM
« Une étape majeure a été franchie dans la mise en œuvre du Pacte sur l’industrialisation, signé entre l’État et le secteur privé, suite à la mise en place du Conseil national pour l’industrialisation de Madagascar (CNIM). Notre ambition est de faire passer la part du secteur secondaire au produit intérieur brut de 15% aujourd’hui à 30% en 2040 en transformant au maximum les ressources locales de manière compétitive et intégrée aux échanges internationaux ».
Josielle Rafidy, directrice générale de l’Économic Development Board of Madagascar (EDBM).
« Pour une croissance robuste et durable de l’industrie, nous avons toujours souligné la nécessité de mettre en place des mesures fortes d'accompagnement, ainsi que l’importance d'une collaboration étroite entre l'EDBM et le MICC pour la promotion des zones industrielles, le renforcement du dispositif de dialogue public-privé constructif et, enfin, un soutien actif des porteurs de projets aussi bien nationaux qu'étrangers ».
L’INDUSTRIE EN CHIFFRES
L'express de Madagascar