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| Le secteur minier est encore dominé par les activités informelles. |
Si l’abondance des ressources minérales à Madagascar est plus ou moins avérée, tout le monde s’accorde à dire qu’il est nécessaire de faire preuve d’un engagement fort pour relancer le secteur et améliorer sa gouvernance.
Les différentes littératures qui s’intéressent au secteur minier malgache, suscitent, la plupart du temps, un fort sentiment de frustration et d’incompréhension. Car si les analystes ne cessent de souligner le potentiel que représente le secteur extractif pour l’économie du pays, les informations recueillies rappellent d’autres réalités : que nous apportent les dizaines de millions de dollars que génèrent nos mines chaque année ?
Il est évident que la professionnalisation et l’encadrement, voire tout simplement la gestion de cette filière, devraient constituer une priorité pour l’État en termes d’amélioration de la gouvernance. La gestion des filières les plus rentables est un domaine très complexe et concerne plusieurs départements ministériels. Si l’on suit la chaîne, depuis l’extraction jusqu’à l’exportation, les défaillances enregistrées nécessitent des améliorations strictes pour permettre la transformation des richesses de notre sous-sol en un véritable moteur de développement pour le pays.
Une chose est sûre : les ressources peuvent être exploitées de manière artisanale ou industrielle. Les impacts sur les communautés diffèrent alors très largement. Les mines artisanales pâtissent d’une mauvaise réputation. L’extraction, archaïque, surtout sur le plan technologique, mais intensive en travail, expose à de nombreux risques d’accidents et de santé ainsi qu’à des dégâts énormes sur l’environnement. Les gains économiques sont, en outre, minimes, du fait de leurs rendements comparativement faibles par rapport à ceux des exploitations industrielles.
Mais les grandes mines ne sont pas non plus exemptes de critiques. La part des redevances et ristournes, qui reviennent à l’État et aux collectivités, est régulièrement pointée du doigt. À Madagascar, le secteur minier représente actuellement 4% du PIB et 30 % des recettes d’exportation, soit 600 millions de dollars, selon l’Economic Development Board of Madagascar. Des chiffres qui sont loin d’être à la hauteur des espérances des uns et des autres. Mais le document de performance, publié dernièrement par le ministère de l’Économie et des finances, montre aussi que le secteur extractif enregistrera une croissance de 14,6% en 2024 et de 14,5% en 2025.
De plus, l’adoption du nouveau Code minier, qui a remplacé celui qui datait de 2005, est présentée par les autorités comme une opportunité d’assainir le secteur et donc pour mieux faire profiter la population des richesses naturelles. Quant au citoyen lambda, les choses sont simples : les mines, comme les autres richesses dont dispose le pays, ne pourront jamais contribuer à améliorer les conditions de vie de la population, sans une nette amélioration de la gouvernance.
Certains commentateurs avancent, pour leur part, que les discussions doivent désormais se focaliser sur la manière dont le pays devrait allouer les ressources issues des activités extractives. C’est là que le débat sur les projets comme la mise en place d’un fonds souverain ou encore l’opportunité ou non de contracter des financements adossés à des ressources naturelles prend toute son importance.
Privilégier la transparence
Dans tous les cas, on s’accorde à dire que le secteur minier doit privilégier la transparence pour assurer son développement et rassurer l’opinion. Un sujet, à plusieurs reprises souligné lors de la signature d'un protocole d'accord portant sur la transparence de la propriété effective dans le secteur minier. Cela s’est déroulé, le 4 décembre, à l’amphithéâtre Salle Lacroix du ministère des Mines et des ressources. Il s’agit d’un accord entre l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (EITI) et le Service de renseignement financier (Samifin)) pour des échanges d’informations et d’expériences afin d’aboutir à plus de transparence de la propriété effective dans le secteur minier.
Dans son allocution, le Directeur exécutif de l’EITI-Madagascar a insisté sur l’importance de l’Exigence 2.5 de la norme EITI et a rappelé que la propriété effective est l’une des exigences de la norme EITI. L’objectif de cette exigence est de permettre au public de connaître les personnes qui possèdent réellement les entreprises opérant dans le secteur extractif à Madagascar. Celles identifiées par le groupe multipartite, comme étant à haut risque, en font partie, afin de contribuer à dissuader les pratiques inappropriées et corrompues dans la gestion des ressources extractives et de contribuer au suivi de la propriété des personnes politiquement exposées.
Il a été expliqué que l'objectif commun de cette collaboration est de mettre en place un registre national des bénéficiaires effectifs, conformément aux recommandations du Groupe d'action financière ou Financial Action Task Force (GAFI). Pour le Samifin, il s’agit de faire le parallèle entre cette transparence et celle des bénéficiaires effectifs, dans la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, avec les différentes étapes dans le processus : la dissuasion, la prévention, la détection, les enquêtes, la poursuite et le recouvrement des avoirs. Il a aussi été souligné que le secteur d’exploitation minière est un secteur à risque et que le recouvrement des avoirs assure de meilleurs revenus pour l'État, d’où l’importance de cette signature entre les deux entités.
Le Samifin a invité l’EITI-Madagascar à rejoindre le Comité national d’orientation et de coordination de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme en tant que réseau d’acteur. « Le ministère des Mines et des ressources stratégiques est honoré de parrainer la signature de cette convention entre EITI et Samifin, qui répond à nos attentes par rapport à la politique menée par notre ministère sur l’assainissement du secteur minier, et est conforme avec l’article 297 du Code minier de Madagascar », relève, pour sa part, Henri Délice Razananirina, secrétaire général du ministère chargé des Mines.
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| La part du secteur minier dans le PIB malgache ne dépasse pas les 5%. |
Booster les recettes
Concernant la question de l’augmentation des recettes minières, le ministère de tutelle souligne que les activités de recherches et d’exploitation sont des sources de recettes pour le pays et c’est à travers le régime fiscal applicable dans le secteur que celles-ci sont perçues.
« Des recettes prévisibles dans le temps, stables et continues, font du secteur minier un levier du développement économique. Maintenir cet équilibre entre l’attractivité des investissements nationaux et internationaux et la perception optimale des recettes qui en découlent, reste une condition essentielle au développement de la filière extractive », soutient-on.
Et ce même département d’ajouter que la relance du secteur minier présente des retombées positives et palpables dans de nombreux domaines, pour ne citer que les emplois directs et indirects créés, le développement des infrastructures nationales et locales, les achats locaux et le transfert de technologie. « Ces retombées subsistent tout au long de la chaine de valeur, de la recherche, de l’exploitation, de la transformation à la commercialisation du produit minier, et se reflètent par la contribution du secteur minier à la production économique du pays. »
La société civile continue, pour sa part, de souligner que l’exploitation des ressources minières devrait être essentielle pour satisfaire les besoins de la vie quotidienne actuelle et future des populations. Et ces ressources, d’autant plus que non renouvelables, « doivent être exploitées en prenant en compte les défis d’ordre économique, environnemental et social. La recherche d’un équilibre constant entre ces défis devrait être la priorité de toutes les parties prenantes qui œuvrent dans le secteur ».
C’est ainsi que les autorités ont tenu à placer le contenu local au centre des nouveaux enjeux du secteur. Ce concept suppose le recours aux ressources locales, tant en matière de produits qu’en matière de ressources humaines. Il est aussi indiqué que la notion de Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) joue désormais un rôle de premier ordre lorsqu’il s’agit de promouvoir les investissements dans le secteur minier. Les composantes de cette RSE s’articulent notamment autour des questions de relations avec les collectivités, d’achat local, d’investissements sociaux, de santé et sécurité des populations, de l’emploi local et de l’accès à la terre.
Pour ce qui est de la traçabilité dans le domaine minier, il permet de tracer n’importe quel minerai acheté jusqu’à un maillon donné de la chaine d’approvisionnement. Cette traçabilité offre donc la possibilité de lier le minerai acheté avec ses conditions de production. Clarifier et mettre en application stricte les procédures de traçabilité des produits miniers qui s’appliquent aux opérateurs miniers permettent d’assurer des retombées tangibles aux collectivités d’origine du produit.
Les autorités, comme les opérateurs du secteur extractif et les partenaires techniques et financiers, s’accordent sur l’importance majeure de ces nouveaux défis car, explique-t-on, les richesses qui sont réparties inégalement à travers un pays minier, doivent profiter à tous. Et c’est au nom de ce principe que le gouvernement affirme vouloir implémenter un mécanisme de redistribution qui va réduire les écarts de richesses, en l’occurrence minière, réduire les inégalités de développement des collectivités et aboutir à « un enrichissement réparti uniformément à travers le pays ».
TÉLÉDÉTECTION
Pour mieux connaitre nos richesses minérales
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| Coopération avec le Japon dans le domaine de la télédétection minière. |
La télédétection facilite la localisation et l’identification des potentiels géologiques et en ressources minérales dont Madagascar dispose. Elle permet de collecter des données à distance à travers l’analyse des images satellitaires.
Dans ce cadre, un atelier de renforcement de capacités et de transfert de technologie sur la télédétection appliquée aux études géologiques et minières, a été organisé du 4 au 8 décembre au ministère des Mines et des ressources stratégiques à Ampandrianomby, en collaboration avec des géologues du « Japan Organization for Metals and Energy Security » (Jogmec) de Tokyo et de Botswana.
Cet atelier qui a duré une semaine, visait à renforcer les compétences des techniciens au sein du département ministériel, afin de promouvoir les études géologiques et minières à Madagascar. Bénéficier de l’expertise de ces géologues japonais du Jogmec, acquérir de nouvelles compétences, sont une opportunité pour les techniciens malgaches de maîtriser les technologies avancées.
Avant la tenue de cet atelier, des techniciens japonais, conduits par Takumi Onuma, géologue et expert en télédétection, ont déjà effectué une mission à Madagascar, au mois d’octobre. Il a été précisé à cette occasion, qu’en collaboration avec l'Agence internationale de coopération japonaise (Jica), une étude basée sur la télédétection concernant le suivi environnemental des activités minières, a été menée dans cinq pays en développement, y compris Madagascar. Dans ce cadre, une réunion s'est tenue à Antananarivo, durant laquelle les techniciens japonais ont présenté les grandes lignes et les objectifs ainsi que les résultats préliminaires de l'étude aux hauts responsables et techniciens du ministère des Mines.
Pour effectuer cette étude à Madagascar, ils ont choisi une zone touchant les sites concernés par les activités du projet Ambatovy, l'exploitation de graphite dans la partie Est de Madagascar, quelques sites de Kraoma et quelques sites d'exploitations minières artisanales. Cette étude consiste principalement à collecter, analyser et interpréter les images détectées par satellites. Les études sommaires menées nécessitent des descentes afin de constater de visu les réalités sur terrain et de compléter les analyses d'images satellitaires. Un défi reste encore à relever sur l'utilisation de la télédétection pour les petites mines.
« Ce projet permettra à Madagascar de connaître davantage les informations et actualités sur les activités minières, de prendre des mesures appropriées selon l'ampleur des cas détectés à temps réel, et d'explorer de nouveaux horizons en termes de collaboration. Outre le ministère des Mines, les techniciens japonais ont rencontré d'autres responsables au sein d'autres départements ministériels concernés durant leur visite », précise-t-on aussi.
VERBATIM
Hugues Rajaonson, économiste et ancien secrétaire général du ministère des Mines
« Pour relancer le secteur minier et s’assurer que celui-ci profite au développement inclusif du pays, il est indispensable de définir une politique minière. C’est tout aussi important que la mise en place des cadres réglementaires, comme il est nécessaire d’associer tous les acteurs malgaches du secteur minier, car ce sont eux qui connaissent les besoins réels du pays mais aussi la réalité des investissements miniers internationaux ».
David Rakoto, économiste et enseignant-chercheur
« À Madagascar, il existe, d’un côté, les petites exploitations minières par les opérateurs locaux à faible niveau de capitaux et les grandes mines nécessitant d’importants investissements et de grands investisseurs. Nous ne pouvons pas développer notre secteur minier sans les investisseurs étrangers. Il faut aussi mettre en place des programmes de formation correspondant aux projets miniers. »
LE SECTEUR MINIER EN CHIFFRES
L'Express de Madagascar